La mort du pape François est l’occasion de voir remonter à la surface du web un vieux texte ésotérique qui fait couler l’encre des férus d’eschatologie depuis 500 ans : la prophétie de saint Malachie. Selon elle, nous serions au bord de l’Apocalypse et il resterait à l’humanité tout au plus quelques mois ou un an.
Concrètement, la prophétie est un texte « découvert » à la fin du XVIe siècle par le moine Arnold Wion et attribué par celui-ci à Malachie d’Armagh, évêque d’Irlande dans la première moitié du XIIe siècle. Elle consiste en une liste de 112 devises censées représenter les papes depuis Célestin V (1113-1114) jusqu’au dernier successeur de saint Pierre.
Ce 112è pontife est le pape François. La devise qui lui est attribuée dans la prophétie est, traduite du latin, “Dans la dernière persécution de la sainte Église romaine siégera Pierre le Romain qui fera paître ses brebis à travers de nombreuses tribulations. Celles-ci terminées, la cité aux sept collines sera détruite, et le Juge redoutable jugera son peuple.” Bon, François ne s’appelle pas Pierre et il n’est pas né à Rome, mais on ne va pas chipoter. Et, après lui, ce sera donc le Jugement dernier, l’Apocalypse, la fin des temps…
Il va sans dire que cette prophétie a été très vite considérée comme un faux. Personne n’en a entendu parler entre sa soi-disant rédaction et sa découverte par Arnold Wion. De plus, les devises concernant des temps postérieurs à ce dernier sont souvent suffisamment floues pour pouvoir s’appliquer à tout le monde et à n’importe qui ou presque. Pourtant, la prophétie a connu un retour en grâce aux XIXe et XXe et je viens encore de voir plusieurs sites d’informations en faire mention plus ou moins sérieusement…
J’ai eu la chance d’aller passer le long week-end du 15 août à Munich en famille. Denis et moi en avons profité pour aller visiter l’Alte Pinakothek de la ville. Elle possède une des plus belles collections de tableaux d’Europe et nous y avons (re)découvert de nombreuses merveilles.
Voici l’une d’elles : La Mort de Sénèque peinte par Pierre Paul Rubens en 1612.
Sénèque était un philosophe romain du premier siècle de notre ère. Il prônait une doctrine stoïcienne : le sage devait, entre autres, mettre l’éthique au cœur de ses réflexions, vivre en harmonie avec la Nature et accepter calmement son destin quel qu’il soit, sans se laisser déborder par les émotions comme la peur ou la colère. La vertu étant suffisante pour trouver le bonheur, le reste devenait accessoire, voire nocif.
Dans certains cas, Sénèque pensait pourtant que la vie ne valait plus d’être vécue : quand on était menacé d’être réduit en esclavage par exemple ou bien quand on sentait trop décliner son intellect. Alors, il prônait le suicide comme idéal moral et ultime moyen de libération du sage.
On le voit ainsi se suicider sur le tableau de Rubens : un esclave lui ouvre les veines à sa demande. Pourtant, Sénèque n’obéit pas alors à une injonction philosophique. Il meurt non par sa propre volonté mais parce que l’empereur Néron le lui a ordonné.
Pour être un philosophe majeur de son temps, Sénèque n’en était pas moins un homme de cour et d’État. Il avait été le précepteur du fils d’Agrippine et était resté ensuite son conseiller. Il en avait profité pour s’enrichir considérablement et vivre en grand aristocrate romain. Bref, il mena une vie bien en contradiction avec l’idéal qu’il prônait.
Hélas pour lui, il finit par être compromis dans la conjuration de Pison, un complot visant à assassiner Néron. On ne sait pas quel rôle exact le philosophe y joua, voire s’il y participa réellement ou fut simplement dénoncé à tort par un jaloux. Mais l’empereur n’hésita pas et lui ordonna de se suicider avec d’autres conjurés.
La Mort de Sénèque conservée à l’Alte Pinakothek (Munich)
Ceci posé, Rubens ne cherche pas à donner une vision réaliste de la mort de Sénèque, mais bien à montrer la fin idéale d’un philosophe. Les yeux levés vers le ciel, le stoïcien accepte sereinement son destin, que sa condamnation soit juste ou non.
Le peintre reprend d’ailleurs quelques éléments de la description de la mort de Sénèque par l’historien romain Tacite. Dans ses derniers instants, le philosophe aurait appelé des secrétaires pour leur dicter un discours. On ne se refait pas… Puis comme il était toujours en vie, il serait entré dans un bain chaud, ici réduit à un baquet, et aurait répandu de l’eau sur ses esclaves en disant « J’offre cette libation à Jupiter libérateur ». Une vraie dernière parole de stoïcien, dont on ne sait, bien sûr, si elle est vraie ou inventée.
La Mort de Sénèque, conservée au Musée du Prado (Madrid)
Rubens, qui réalisa une deuxième version de son tableau que je vous montre ci-dessus, eut aussi une autre source d’inspiration, esthétique celle-là : une statue romaine du deuxième siècle de notre ère, copie d’un original hellénistique. Elle avait été découverte à Rome au XVIe siècle et était très célèbre au temps du peintre. Aujourd’hui, plus qu’une représentation du suicide du philosophe, on pense qu’il s’agit d’une représentation d’un vieux pêcheur, un type de statuaire propre à l’époque hellénistique.
Jupiter, Neptune et Pluton, fresque du Caravage (29 septembre 1571 – 18 juillet 1610). Elle orne le cabinet d’alchimie du cardinal des Monte dans la villa Ludovisi à Rome.
Comme son nom l’indique, la fresque représente les trois fils du titan Cronos: Jupiter le roi des dieux et du ciel, assis sur son aigle, Neptune, le dieu des mers sur son cheval marin, et Pluton, le maître des Enfers avec Cerbère, son chien à trois têtes.
Ils entourent une sphère céleste que Jupiter fait tourner de la main. En regardant bien, on y voit les constellations zodiacales printanières au centre, devant la Terre. En bas, le cercle lumineux est le soleil.
La symbolique alchimique de l’ensemble a suscité diverses interprétations : les dieux seraient des symboles des éléments ou bien des différentes étapes du Grand Œuvre. Je vous laisse en juger 🙂
L’actualité récente me donne envie de vous montrer ce tableau d’Elisabeth Vigée-Lebrun aux thèmes finalement bien contemporains : La Paix ramenant l’Abondance, peint en 1780 et conservé au Musée du Louvre.
Quand Élisabeth Vigée Le Brun réalise cette toile, elle va à l’encontre de toutes les conventions sociales de son époque.
Au XVIIIe siècle, les femmes peintres sont cantonnées à la réalisation de portraits et de natures mortes. Représenter un sujet historique ou mythologique est réservé aux hommes tout comme la peinture de nu. Or, ici, Elisabeth Vigée Le Brun fait les deux à la fois. Elle peint des allégories et ose montrer le sein dénudé de l’Abondance.
« Circonstance aggravante », elle peint ce tableau pour sa réception à l’Académie royale de peinture et demande à y être admise comme peintre d’Histoire. Son entrée dans cette institution suscite de fortes oppositions : c’est une femme et, en plus, l’épouse d’un commerçant (un marchand de tableau). Il faut l’intervention de la reine Marie-Antoinette, dont Elisabeth Vigée-Lebrun est le peintre officielle, pour qu’elle soit finalement acceptée à l’Académie.
Mais elle n’aura jamais le titre de peintre d’Histoire.
Tous les jours ou presque, je poste sur les réseaux sociaux des images qui me plaisent beaucoup sans mériter un vrai article sur ce site. Alors je les rassemble pour les publier quand j’en ai l’occasion. Si vous n’avez pas envie d’attendre, vous pouvez aller voir mes murs Instagram et Facebook : tout est visible par tous.
Voici les dernières :
– Un peu de douceur dans ce monde de brutes.
Madeleine aux deux flammes peinte par Georges de la Tour vers 1640 et conservée au Metropolitan Museum of Art, à New York.– Comment doivent s’habiller les députés quand ils siègent à l’Assemblée Nationale ?
Le peintre Jacques-Louis David – celui du Serment du jeu de paume par exemple – répond à cette épineuse question vers 1795-1799 :
Projet de costume de représentant du peuple conservé au Musée Carnavalet.
– Portrait d’une jeune Vénitienne réalisé par Albrecht Dürer en 1505 et conservé au Musée d’Histoire de l’Art de Vienne.
– Bon j’avoue, je ne vous montre pas ces photos pour Maurice Garin mais beaucoup plus pour la voiture avec ses entraîneurs. Toute une époque !
Ci-dessous donc :
Maurice Garin, futur premier vainqueur du Tour de France au départ de la première étape en 1903.
Photo prise par Jules Beau et restée dans sa collection
et
Automobile de Maurice Garin, conduite par ses entraîneurs lors de la course Paris-Brest de 1901
Photo prise par Jules Beau et restée dans sa collection
– Tête d’une épouse ou d’une fille du pharaon Akhenaton réalisée en quartzite peinte vers 1350-1340 avant notre ère et conservée au Musée égyptien de Berlin.
Tous les jours ou presque, je poste sur les réseaux sociaux des images qui me plaisent beaucoup sans mériter un vrai article sur ce site. Alors je les rassemble pour les publier ensemble quand j’en ai l’occasion. Si vous n’avez pas envie d’attendre, vous pouvez aller voir mes murs Instagram et Facebook : tout est visible par tous.
Voici les dernières :
-” Dickens’ Dream “, peinture inachevée de Robert W. Buss (1875) conservée au Musée Charles Dickens de Londres
– Jeune travailleuse attachant des têtes de poupées dans une usine de jouets en Grande-Bretagne, septembre 1918.
Photo de George P. Lewis.
– Premier autoportrait connu d’une femme peintre peint par la Flamande Catharina van Hemessen en 1548 et conservé au Musée des beaux Arts de Bâle.
– Quelques photos du télescope Hubble :
Rencontre de deux galaxies en spirale
Echos lumineux demeurant 3 ans après l’explosion de l’étoile V838
Vous le savez nous n’en sommes pas à notre première canicule. La plupart d’entre vous doivent même se souvenir de l’été 2003 qui fit énormément de victimes parmi les personnes âgées. Au total, on enregistra cette année-là plus de 15 000 décès surnuméraires.
Mais d’autres étés furent encore plus meurtriers en France. Celui de 1636 emporta ainsi plus de … 500 000 personnes, ceux de 1718-1719, quelques 700 000. L’essentiel des morts était causé par la dysenterie : par manque d’eau, on se mettait à boire des étendues de liquides plus ou moins croupis qui ne tardaient pas à rendre malade.
Plus près de nous, la canicule qui sévit entre le 5 juillet et le 13 septembre 1911 fit plus de 40 000 victimes. Un quart d’entre elles étaient déjà des personnes âgées. Les autres étaient des enfants, quasiment tous de moins de 2 ans. Les plus frappés étaient ceux des deux extrémités de l’échelle sociale : les enfants abandonnés et les bébés mis en nourrice. Ils étaient nourris au biberon et, cette année-là, une épidémie de fièvre aphteuse causa une pénurie de lait de vache et obligea à leur donner des aliments moins appropriés pour eux. Cela les fragilisa face à l’eau parfois croupie voire franchement polluée qu’on leur fit absorber pour les hydrater pendant les chaleurs.
Cette tragédie frappa les esprits et une vaste politique sanitaire fut mise en place à destination des nourrissons. Mais, comme on le vit en 2003, on oublia un peu vite qu’ils n’avaient pas été les seuls frappés par la canicule intense.
Cette semaine, j’ai posté de plusieurs images sur Facebook que je ne vous ai pas encore montrées. Voici donc un post pour me rattraper.
–Barrau épouse de Leyrac secourant son mari blessé, œuvre de Labrousse (graveur) et de Berricourt (dessinateur), conservée à la Bibliothèque Nationale de France.
« Alors que la guerre était associée au masculin, quelques femmes en France ont combattu au cours des guerres civiles des XVIe-XVIIe siècles ou ont servi dans les armées royales, qu’accompagnaient de plus de nombreuses civiles. Avec la Révolution française, le service dans la garde nationale et, moins directement, dans l’armée est lié à la citoyenneté. En réclamant le port des armes au sein de la garde nationale, des militantes révolutionnaires revendiquaient ainsi un des droits politiques du citoyen, ce qui provoqua un ferme refus. Mues par le désir de défendre la République et de partager avec les hommes la gloire de se battre pour elle, des citoyennes s’engagèrent par ailleurs individuellement dans les armées, où elles continuèrent à servir après le décret du 30 avril 1793 qui les en chassait. »
Extrait de De la guerrière à la citoyenne. Porter les armes pendant l’Ancien Régime et la Révolution française. par Dominique Godineau
– Suzanne et les Vieillards , tableau peint par Artemisia Gentileschi en 1610, collection Schönborn, Pommersfelden (Allemagne).
Voici la première œuvre attribuée à Artemisia Gentileschi. Elle l’a peinte à 17 ans.
Ce tableau illustre un épisode de l’Ancien Testament. Suzanne, une belle jeune femme, est surprise au bain par deux vieillards qui, non contents de la regarder contre sa volonté, lui font des propositions sexuelles agressives. Bien sûr, Suzanne refuse tout contact avec eux. Mais, furieux de n’avoir pas eu ce qu’ils voulaient, les deux hommes accusent leur victime d’adultère et obtiennent sa condamnation à mort. Heureusement, on est dans la Bible et pas dans la réalité : le prophète Daniel intervient avant qu’il ne soit trop tard, prouve l’innocence de Suzanne et fait à son tour condamner ses accusateurs.
Suzanne et les Vieillards peint par Artemisia Gentileschi en 1610, collection Schönborn, Pommersfelden (Allemagne)
– Portrait d’une noble dame saxonne peint par Lucas Cranach l’Ancien en 1534 et conservée au Musée des Beaux-Arts de Lyon.
On ignore l’identité exacte de cette dame richement parée en noir et orange, le W dans ses cheveux est peut-être un indice ??
–Les Bulles de savon par Jean Siméon Chardin, vers (après) 1733, conservée à la National Gallery of Art de Washington.
Dans les premiers jours de juillet 1608, une pluie de sang (oui, une vraie !) se mit à tomber sur les faubourgs d’Aix-en-Provence, déclenchant une vague de terreur dans toute la ville. On crut à la colère divine voire à la fin du monde.
Heureusement, une des rares personnes à garder son sang-froid fut Nicolas-Claude Fabri de Peiresc, un conseiller du Parlement qui était aussi un homme de lettres et un érudit. Il devait plus tard devenir l’avocat de son ami Galilée.
En 1608, il ne paniqua donc pas. Il recueillit quelques gouttes du sang tombé du ciel sur le mur du cimetière de la cathédrale. Il l’observa et finit par faire le rapprochement entre ce sang et le nombre particulièrement élevé de chrysalides de papillons qu’il avait observées dans les faubourgs d’Aix dans les jours précédents.Le sang était en réalité du méconium, un excrément liquide et rougeâtre, que produisent les papillons tels que le Vulcain quand ils sortent de leur chrysalide. Ce début juillet 1608, ils avaient été exceptionnellement nombreux à le faire en même temps, provoquant une véritable pluie rouge sur certaines rues.
Mais, malgré les explications de Peiresc, nombreux furent ceux qui continuèrent de croire à un prodige ou une malédiction divine et la peur demeura encore quelques temps sur la ville.
Voici Vanité aux portraits, par David Bailly, 1651, conservée au Stedelijk Museum de Leyde aux Pays-Bas.
Au XVIIe siècle,les bulles de savon sont souvent utilisées dans les tableaux pour exprimer la brièveté de la vie. On les retrouve ici avec d’autres symboles habituels de mortalité : crâne, fleurs fanées, sablier…
Ils sont là pour nous montrer la « vanité », le caractère vain et trop vite passé, de la plupart des choses de la vie : plaisirs simples (vin, pipe) mais aussi science (livres) et arts (musique, sculptures, peinture…).
Le passage du temps est aussi indiqué sur cette toile d’une manière plus inhabituelle : le peintre, âgé de 67 ans au moment où il la réalise, s’y est représenté deux fois. Il est l’homme âgé du petit tableau central mais aussi le jeune homme qui le tient en main.