Narration : une page d’Alinoë, le tome 8 de Thorgal

Christophe Bec termine ces jours-ci notre Thorgal Saga. Cela m’a donné envie de refeuilleter une énième fois les albums de Jean Van Hamme et Grzegorz Rosinski.

Je suis donc retombée sur cette page 40 d’Alinoë, le tome 8 de la série. Dans cet album, Aaricia et Jolan, restés seuls sur leur île (oui, c’est un album quasiment sans Thorgal !), affrontent un étrange garçon aux cheveux verts, Alinoë. Je ne vous spoilerai pas le fin mot de l’histoire mais j’espère que ce post vous donnera envie de la lire.

Voici donc la page 40. C’est le début de l’affrontement final entre Aaricia et Alinoë et, visiblement, c’est mal parti pour la mère de Jolan. Comme dans toutes les bonnes histoires d’horreur des années 80 (d’horreur tout public ici ), il faut que les héros passent par une phase désespérée avant de remporter la victoire finale sur les monstres qui les attaquent. Mais, ici, les auteurs ne se sont pas contentés de raconter leur histoire en mettant bout à bout leurs cases : ils ont aussi donné une dimension esthétique à leur page, dimension qui vient renforcer la puissance de ce qu’ils racontent et des émotions qu’ils veulent faire partager.

La page est divisée en 3 strips et 5 cases, symétrisés autour d’une diagonale allant du coin en haut à droite au coin en bas à gauche. La case 5 est l’écho de la 1 et la 4 de la 2. Autour de cette diagonale, on retrouve 3 fois Aaricia dans une position de plus en plus difficile. Parallèlement, les plans serrés alternent avec les plans larges. Tout cela participe à montrer le côté sans issue de la situation. Non seulement le danger se rapproche d’Aaricia, mais, en plus, elle n’a pas d’endroit où fuir. Elle est totalement encerclée. Elle est prisonnière de la page comme d’Alinoë.

À ce titre, la dernière case avec Jolan est une rupture avec le reste de la planche. Pourtant, les auteurs ont réussi à en faire un subtil rappel : Jolan est encerclé par les eaux comme sa mère l’est par ses ennemis. Mais l’effet de rupture reste dominant et il est, lui aussi, significatif : c’est de Jolan que viendra le salut d’Aaricia, c’est lui qui lui permettra finalement d’échapper à l’emprise d’Alinoë et de se sauver.