Fdj : Les sœurs Press et l’intersexualité des athlètes

Le 10 mars 1939, naît à Kharkov la petite Irina Press. Avec sa sœur Tamara, elle va faire couler beaucoup d’encre dans l’Occident de la Guerre Froide.

Le 10 mars 1939, naît à Kharkov la petite Irina Press. Avec sa sœur Tamara, elle va faire couler beaucoup d’encre dans l’Occident de la Guerre Froide.

Le début de leur histoire est malheureusement typique de l’URSS de cette époque. Leur père meurt pendant la Seconde Guerre mondiale et elles doivent fuir les Nazis qui détruisent leur maison. Plus tard, elles deviennent toute deux étudiantes à l’université de Léningrad.

Mais c’est dans le domaine du sport qu’elles révèlent tout leur potentiel : Tamara est médaillée d’or aux Jeux olympiques de 1960 au lancer du poids et de 1964 au lancer du poids et du disque tandis qu’Irina gagne le 80 m haies en 1960 et le pentathlon en 1964. Elles deviennent des héroïnes très populaires dans tout le bloc de l’Est.

À l’Ouest, au contraire, les média se déchaînent contre elles : on les dit hermaphrodites ou bien bourrées d’hormones masculines, on les surnomme les « frères Press » et on en fait le symbole des déviances réelles ou supposées d’un URSS prêt à tout pour obtenir des médailles et la suprématie sportive mondiale.

La polémique devient telle que lors des championnats d’Europe d’Athlétisme de 1966, les officiels introduisent un « test de féminité » qui doit déterminer, et donc empêcher de participer, les athlètes femmes qui seraient en fait intersexuées. On le pratiquera ensuite pendant tous les Jeux Olympiques jusqu’en l’an 2000. Et ce n’est qu’en 2011 que la fédération internationale commencera timidement à accepter les personnes intersexuées en autorisant les femmes atteintes d’hyperandrogénie à participer aux compétitions avec les autres femmes… si elles affichent des niveaux d’androgène inférieurs aux valeurs des hommes. Aujourd’hui ce règlement discriminatoire existe toujours, même s’il a été plusieurs fois suspendu, et le débat autour des athlètes intersexués demeure très vif.

Mais revenons en 1966 : dès que la fédération soviétique d’athlétisme a connaissance du nouveau test de féminité, elle retire les candidatures d’Irina et de Tamara Press. Cela vaut aveu pour la presse occidentale. Aujourd’hui, on ignore toujours ce qu’il en est en réalité et les noms des deux sœurs demeurent au palmarès des Jeux.

Après la fin de leur carrière sportive, elles se reconvertissent facilement. Irina s’engage dans les troupes dédiées aux frontières et Tamara devient ingénieure civile.

Tamara (à gauche) et Irina Press © Getty Images