L’épée de Damoclès

Peinture de Léon Viardot, conservée au Musée Anne-de-Beaujeu

Voilà plusieurs fois que j’entends citer « l’épée de Damoclès » dans les discours politiques ces derniers jours pour désigner une catastrophe menaçant de nous tomber dessus incessamment sous peu.

Vous vous en doutez, cette expression, « l’épée de Damoclès », date de l’Antiquité, de l’Antiquité grecque pour être précise. Mais elle a été popularisée par Cicéron qui s’en est servi dans ses Tusculanes, les discours qu’il a prononcés dans sa cité de Tusculum pour présenter sa philosophie morale. Pour ceux qui ont vu la série « The Good place », Cicéron, était un peu le Chidi des guerres civiles romaines. Il a d’ailleurs beaucoup tergiversé lui aussi, mais c’est une autre histoire.

Revenons à Damoclès et à son épée. Selon la légende, Damoclès était un orfèvre qui vivait dans la cité grecque de Syracuse, en Sicile au IVe siècle avant notre ère. Il était proche du tyran local, Denys l’Ancien, auquel il ne cessait de dire à quel point il avait de la chance d’être le maître absolu de la ville. Denys, à force d’entendre son courtisan lui répéter les mêmes choses, finit par lui proposer de prendre sa place un jour durant pour voir en quoi consistait vraiment la vie d’un tyran. Damoclès accepta.

La journée se passa au mieux et se conclut par un somptueux festin. L’orfèvre était au comble de la joie quand il leva la tête et aperçut une épée suspendue par un unique crin de cheval au-dessus de lui. Elle pouvait tomber et le tuer à tout moment.

Bien sûr, c’était Denys qui l’avait fait accrocher là. Il voulait ainsi montrer à Damoclès que, si un tyran jouissait d’une grande richesse et d’un grand pouvoir, il avait aussi constamment peur d’être assassiné. Il était donc plus angoissé, voire plus malheureux que la plupart des hommes, que ceux en tout cas qui ne recherchaient ni le pouvoir ni la richesse.

On voit bien où Cicéron voulait en venir en racontant cette histoire… Un dernier détail « amusant » : il a rédigé les Tusculanes en 45 avant notre ère, quelques mois avant l’assassinat de Jules César. Le dictateur perpétuel de Rome aurait peut-être dû prendre le temps de lire un peu plus de philosophie morale.