Courrier des lecteur de Casemate de ce mois-ci :
D’abord, je m’interroge sur le fait qu’une série puisse passer de 19 000 exemplaires au tome 1 à seulement 10 000 au tome 2. Est-ce que la moitié des ventes du tome 1 ont été faites sur un malentendu ? Est-ce que la maison d’édition a mis des moyens marketing sur le tome 1 et s’est contenté de voir venir au tome 2 ? Démarrer à près de 20 000 exemplaires aujourd’hui est tellement miraculeux que je n’arrive pas à comprendre que tout le monde ne se soit pas battu pour maintenir voire augmenter ce chiffre au tome 2. (Après il y a sans doute des explications plus complexes qu’Yves Schlirf pourrait donner, d’autant plus que je sais bien que c’est un des éditeurs les plus volontaristes pour défendre la Bande Dessinée grand public.)
Ensuite, Yves dit tout haut ce que la plupart des auteurs savent, la Bande Dessinée réaliste qui se vend à moins de 25 000 exemplaires n’est économiquement pas viable pour les auteurs. C’est pourtant le cas de la très grande majorité des sorties. Le travail d’une “grande richesse” dont il parle s’accompagne, hélas, aujourd’hui d’une grande pauvreté, comme nous l’avions constaté dans notre étude des États Généraux de la Bande Dessinée.
En connectant ces deux informations, il y a de quoi s’inquiéter sur l’avenir de cette forme de Bande Dessinée qu’est la série grand public. Elle est condamnée au succès pour pouvoir exister et continuer, mais on peut se demander si elle est encore assez soutenue en terme d’investissements financiers et humains par le système éditorial actuel.
Pour conclure, quid d’une Bande Dessinée sans ces grandes séries ? Croit-on vraiment que son économie se contentera de quelques spectaculaires succès de romans graphiques de temps en temps ?
Malgré un emploi du temps trop chargé je me suis donc réengagée pour le prix de la série pour le festival d’Angoulême, parce que j’aime autant en lire qu’en faire, mais aussi parce que je pense que si ce secteur de l’édition venait à s’effondrer, ce serait toute la Bande Dessinée qui serait menacée dans sa survie économique. Il faut sauver le soldat grand public, il faut sauver le soldat série.