Femme du jour : Violette Nozière

Née le 11 janvier 1915, Violette Nozière est l’héroïne d’un fait divers qui prend les proportions d’un véritable fait de société par son retentissement médiatique.

Tout commence en août 1933, en pleine montée du fascisme en Europe sur fond de grave crise économique. Le corps du père de Violette est découvert dans l’appartement familial, tout près de sa mère qui respire encore. Quelques jours plus tard, elle avoue avoir essayé de les empoisonner tous les deux.

Son crime fait immédiatement les gros titres de la presse. Sa personnalité aussi : jeune étudiante de 18 ans issue de la classe moyenne, elle menait en fait une double-vie très peu avouable. Elle volait ses parents et se prostituait pour s’offrir des « toilettes », pouvoir passer ses journées dans les cafés et surtout entretenir son « amant de cœur ».

©Collection-Kharbine-Tapabor

Chacun se doit de prendre position sur l’affaire et les politiques n’hésitent pas à l’instrumentaliser brutalement. La droite dénonce ainsi en Violette Nozière le prototype d’une jeunesse décadente qui menace l’ordre social en s’attaquant à son fondement par excellence : la famille. La gauche, au contraire, transforme la jeune femme en symbole de la lutte contre les dérives de la société bourgeoise. Les surréalistes en font même leur muse. Dans une chronique dans l’Humanité, Louis Aragon parle d’elle comme d’une victime du patriarcat.

Il faut dire que si Violette reconnaît son entière culpabilité, elle explique son geste par sa haine envers son père qui abusait d’elle depuis plusieurs années. Elle maintient ses accusations, jugées crédibles par les enquêteurs, pendant son procès. Néanmoins, elles n’y sont jamais clairement abordées. Le viol et encore plus l’inceste sont des sujets complètement tabous à cette époque. Même la presse la plus sensationnaliste évite d’employer ces termes.

Dans ce contexte, le procès ne peut déboucher que sur un seul résultat : Violette Nozière est condamnée à la peine de mort pour parricide et empoisonnement, sans aucune circonstance atténuante. Heureusement, on ne guillotine plus les femmes dans les années 30. Sa peine est commuée en travaux forcés à perpétuité. Pétain la réduit plus tard à 12 ans d’enfermement et De Gaulle finit par gracier la jeune femme en 1945, preuve du malaise qu’a provoqué sa première condamnation dans une partie importante de la société.

En 1963, son avocat parvient même à obtenir sa réhabilitation et à la rétablir dans tous ses droits. Détenue modèle qui a renié son ancienne vie et s’est muée en catholique convaincue, Violette Nozière est alors devenue une respectable veuve, mère de 5 enfants, qui gère un hôtel avec sa mère. Elle mourra seulement trois ans plus tard d’un cancer des os, au milieu des siens.

Affiche du film inspiré à Claude Chabrol par l’affaire Violette Nozière en 1977