L’actualité

Fdj : Yvonne Baseden

Yvonne Baseden est une agente secrète du Special Operations Executive (la Direction des opérations spéciales), le service secret britannique qui opère en France pendant la Seconde Guerre mondiale.

Elle naît le 20 janvier 1922 à Paris et a la chance de passer son enfance à voyager en Europe. En 1937, ses parents finissent par s’installer à Londres et elle devient totalement bilingue anglais-français. Dès ses 18 ans, en 1940, elle s’engage dans la Women’s Auxiliary Air force. Deux ans plus tard, devenue officier (« Section Officer »), elle entre dans le service de renseignement de la Royal Air Force et participe avec succès aux interrogatoires de prisonniers allemands. Cela lui vaut d’être versée au SOE dès 1943.

© Madelgarius

Dans la nuit du 18 au 19 mars, elle saute en parachute au-dessus des Landes avec Gonzague de Saint-Geniès (dit « Lucien »). Tous deux parviennent séparément dans le Jura où ils doivent fédérer des maquis très dispersés. Yvonne devenue « Odette » joue alors surtout un rôle d’opérateur-radio. Mais elle se tient prête à prendre la place de « Lucien », si celui-ci venait à disparaître.

Le 26 juin 44, ils se réunissent avec tous les principaux membres de leur réseau dans une fromagerie de Dole. Un gros parachutage d’armes a eu lieu la veille et les résistants s’attardent pour fêter ça. Hélas, au même moment, un maquisard capturé par la police militaire allemande livre à ses geôliers l’emplacement de la réunion. On est tard dans la nuit. Il pense que tout le monde est déjà reparti de son côté.

À leur arrivée, les Feldgendarmes découvrent une grande table couverte d’assiettes. Ils postent des gardes un peu partout et attendent. Plusieurs heures plus tard, un bruit se fait entendre dans le grenier. Le soldat posté en dessous n’hésite pas et tire dans le plafond. Du sang s’en écoule. Les Allemands jette alors une grenade dans la soupente. Lucien est blessé. Il s’empoisonne pour ne pas tomber vivant aux mains des Allemands. Tous les autres, à l’exception du gardien de la fromagerie qui s’est caché dans la cave, sont fait prisonniers.

Odette est conduite à la feldgendarmerie avec les autres. Elle a des faux papiers et les policiers ne savent pas qui elle est. Torturée, soumise à un simulacre d’exécution, elle « fait l’idiote », obstinément. Ses compagnons ne la trahissent pas non plus. Cela lui sauve la vie, mais elle est quand même déportée au camp de Ravenbrück. Là, d’autres femmes identifiées comme appartenant au SOE sont exécutées. Yvonne faiblit mais parvient à toujours cacher son identité.

En avril 1945, Yvonne est finalement remise à la Croix rouge suédoise dont le vice-président, Folke Bernadotte, a réussi à passer un accord avec Heinrich Himmler, le chef suprême des SS en charge des camps de concentration et d’extermination. Ayant compris que la guerre ne va pas se terminer comme prévu, celui-ci a autorisé une opération de sauvetage de déportés surtout danois, norvégiens et francophones. Plus de 15 000 personnes sont sauvées à cette occasion. Les compagnons d’Odette ont moins de chance : la moitié sont exécutés par les Allemands et les autres ne sont libérés qu’à la fin des camps.

Fdj : Livie

Livie, Livia Drusilla de son vrai nom, est la troisième épouse d’Auguste. Elle n’est pas née le 18 mais le 30 janvier 58 av. J.-C. Or, le 30 janvier prochain, je serai à Angoulême et je ne pourrai pas vous faire de chronique quotidienne, faute de temps. Mais ça aurait quand même été dommage de passer à côté de la meilleure ennemie d’Alix senator, non ?

Livie est donc née en – 58 dans la plus haute aristocratie romaine. À quinze ans, elle épouse Tiberius Claudius Nero et donne naissance l’année suivante au petit Tibère, le futur empereur. Mais on est en pleine guerre civile et chacun doit prendre parti. Livie et son époux sont des césariens. Après les ides de mars, ils combattent les assassins du dictateur aux côtés de Marc Antoine. Ils prennent aussi son parti contre le jeune Octavien, le futur Auguste. En – 40, ils doivent même prendre précipitamment la fuite pour échapper à ses proscriptions. Ils se réfugient en Sicile puis en Grèce. Ils ne reviennent en Italie qu’après la paix de Brindes qui réconcilie provisoirement les deux triumvirs.

C’est l’occasion pour Livie de rencontrer Octavien/Auguste en septembre – 39. Coup de foudre, coup politique ou les deux, elle quitte immédiatement son mari pour son ancien ennemi. Lui attend que sa précédente épouse ait accouché de leur fille, Julie, et la renvoie aussitôt. Dès le lendemain, le 17 janvier -38, il épouse Livie. Elle est enceinte de six mois de Tiberius et accouche en avril de son second et dernier fils, Drusus. Elle n’aura jamais d’enfant d’Auguste.

Statue de Livie représentée en déesse Ops avec sa gerbe de blé et sa corne d’abondance, début du 1er siècle de notre ère, musée du Louvre.

Leur mariage dure pourtant jusqu’à la mort de l’empereur, 52 ans plus tard. S’il est à peu près constamment infidèle, les époux restent malgré tout très proches. Livie est présentée par la propagande impériale comme la matrone idéale, vertueuse et volontairement confinée à la sphère privée. Mais la réalité est assez différente : elle continue de s’intéresser activement à la politique toute sa vie. Auguste a des discussions avec elle avant de réunir ses conseillers officiels et de prendre ses décisions. Il prépare même leurs entretiens politiques par écrit, tant il craint ses réflexions et ses réparties. Les autres aussi d’ailleurs : beaucoup se méfient de l’influence de Livie et lui attribue les « mauvaises » décisions de l’empereur – les bonnes étant de lui en personne, forcément. C’est le début de la légende noire de Livie.

Sa mauvaise réputation auprès des historiens antiques va beaucoup plus loin. Ils l’accusent, par exemple, de faire empoisonner tous ceux qui se trouvent entre son fils Tibère et la succession impériale : le fils d’Octavie, la sœur d’Auguste, mais aussi Gaius et Lucius César, les petits-fils préférés de l’empereur. Livie aurait d’ailleurs fini par l’assassiner aussi en lui offrant des figues empoisonnées. On sait aujourd’hui que tout cela est pure invention.

Planche montrant Livie rendant visite aux galles, les prêtres de Cybèles, dans son temple du Palatin, juste à côté de la demeure impériale, Alix senator, tome 7, éditions Casterman.

Devenue veuve en 14 apr. J.-C., Livie devient une prêtresse du « divin Auguste » qui a rejoint officiellement son grand-oncle César parmi les immortels. Elle continue cependant de jouer un rôle politique auprès de Tibère. Celui-ci le vit de plus en plus mal et leurs rapports sont conflictuels. En 26, il part vivre en solitaire dans l’île de Capri et ne reviendra jamais à Rome.

Livie, elle, meurt en 29, à 86 ans. Elle rejoint Auguste dans son mausolée. En l’absence de Tibère, c’est Caligula, l’arrière-petit-fils de la défunte, qui prononce son éloge funèbre. En 42, un autre de ses descendants, l’empereur Claude, lui accorde l’apothéose et en fait une déesse à l’égal d’Auguste.

Femme du jour : Eartha Kitt

Eartha Mae Kitt est une célèbre chanteuse et actrice américaine qui a connu plusieurs heures de gloire au siècle passé.

Sa vie commence comme un mauvais film : elle nait le 17 janvier 1927 dans une plantation de coton de Caroline du sud, du viol d’une jeune femme noire et cherokee par un homme d’origine allemande ou néerlandaise.

Dès 1943, elle danse dans la troupe de Katherine Dunham, une pionnière de la danse afro-américaine, et fait des tournées dans le monde entier. Mais c’est en 1950 qu’elle rencontre la notoriété en incarnant Hélène de Troie dans Time runs d’Orson Wells. Celui-ci justifie son choix, jugé très iconoclaste à l’époque, d’une artiste « noire » pour incarner la « blonde » Hélène par le fait qu’Eartha Kitt est « the most exciting woman in the world ».

Par la suite, elle enregistre de nombreux titres qui deviennent des classiques comme la chanson de Noël Santa Baby. Elle continue aussi à participer à des comédies musicales à Broadway, à tourner des films (The Mask of the hawk  de Sidney Poitier en 1957) et des séries télévisées. En 1967, elle est la Catwoman de Batman.

©Closer

Parallèlement, Eartha Kitt qui appartient à la Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté s’engage contre la guerre du Viet-Nam. En 1968, une intervention dans ce sens lors d’un déjeuner à la Maison Blanche lui vaut d’être mise à l’index aux États-Unis. Elle doit aller poursuivre sa carrière à l’étranger jusqu’en 1974. Cette expérience très dure ne l’empêche pas de s’investir plus tard dans le combat pour les droits LGBT et le mariage des personnes de même sexe, cela jusqu’à sa mort en 2008.

Entretemps, Eartha Kitt renoue avec le grand succès dans les années 80. Sa voix gutturale très particulière lui permet même d’enchaîner les tubes internationaux de 1983 à 86 : Where Is My Man, I Love Men, This Is My Life et I Don’t Care.

©Closer

Femme du jour : Dian Fossey

Dian Fossey est une primatologue américaine qui a étudié les gorilles au Rwanda des années 60 à 1985.

Née le 16 janvier 1932, Dian Fossey est très jeune attirée par les animaux, mais ses études de vétérinaire ne la mènent nulle part. Déçue, elle se replie sur l’ergothérapie et, son diplôme en poche, s’occupe d’enfants en difficulté dans un hôpital du Kentucky. Pourtant, elle n’oublie pas ses rêves d’enfance : en 1963, elle emprunte l’équivalent de trois ans de son salaire et part six mois en Afrique. Elle y découvre le Rwanda et ses grands singes. C’est le coup de foudre.

Dian Fossey joue avec de jeunes gorilles, © Robert I.M. Campbell, National Geographic Creative

Elle revient ensuite le plus souvent possible dans la région et, en 1967, crée le Karisoke Research Center, dans les montagnes des Virunga. Sept ans plus tard, elle obtient son doctorat en zoologie à l’Université de Cambridge. Elle ne cessera plus d’étudier les gorilles jusqu’à sa mort et sera reconnue comme une de leurs plus grandes spécialistes.

La couverture du National geographic de 1970

En janvier 1970, sa photo en couverture du « National geographic », qui finance la fondation qui la soutient, la rend mondialement célèbre. Elle commence à sensibiliser le public sur le sort des grands singes et le danger de leur possible extinction. Le braconnage est alors endémique dans le Parc national où elle travaille. Les bébés gorilles sont enlevés, les parents tués (ils luttent jusqu’à la mort pour conserver leur progéniture) et leurs têtes et leurs mains… vendues comme trophées aux touristes.C’est peut-être cet engagement qui cause la perte de Dian Fossey en décembre 1985 : elle est retrouvée assassinée à coups de machette dans sa hutte. A ce jour, son meurtrier reste inconnu. Le principal suspect, Protais Zigiranyirazo, soupçonné de diriger un trafic de bébés gorilles, est aussi le préfet de la région qui commande l’enquête sur la mort de la primatologue. Il est plus tard considéré comme un des principaux responsable du génocide du Rwanda de 1994.

Femme du jour : Sofia Kovalevskaia

Sofia Kovalevskaia est une mathématicienne russe qui participe à la Commune de Paris.

Née le 15 janvier 1850, elle suit des cours à l’université allemande de Heidelberg avant de convaincre Karl Weierstrass, le « père de l’analyse moderne » qui travaille surtout sur les fonctions elliptiques, de la prendre comme élève. Comme les femmes ne sont pas admises à la faculté de Berlin où il enseigne, il accepte de lui donner des leçons privées.

Très vite cependant, Sofia Kovalevskaia quitte l’Allemagne pour la France où elle rejoint sa sœur, Anna Jaclard. Toutes deux sont des socialistes et des féministes révolutionnaires. Anna, qui appartient à la section russe de l’Internationale, siège au Comité de vigilance de Montmartre et a co-fondé le journal « La Sociale ».

Après le dramatique échec de la Commune, Sofia retourne aux mathématiques. Elle travaille sur les équations aux dérivées partielles, améliorant un résultat d’Augustin Cauchy et finissant par définir le théorème de Cauchy-Kovalevskaia. Pour les amateurs : le théorème de Cauchy-Kovalevskaia est un théorème d’analyse à plusieurs variables stipulant qu’une équation aux dérivées partielles bien posée admet une solution unique pour un ensemble complet de conditions initiales. (Ne m’en demandez pas plus).

Sofia Kovalevskaia écrit aussi un traité sur les intégrales abéliennes et un autre sur la forme des anneaux de Saturne. Ces travaux lui permettent d’obtenir le titre de docteur de l’université de Göttingen en 1874. Une femme doit alors présenter trois traités de mathématiques différents quand un homme peut se contenter d’un seul. Le sexe de Sofia l’empêche aussi de soutenir ses thèses publiquement et elle est reçue « in absentia ». Bien sûr, elle n’est pas non plus autorisée à enseigner.

De retour en Russie, elle n’y trouve toujours pas de faculté prête à l’embaucher. Après le suicide de son mari, un paléontologue nihiliste comme elle, elle voyage à nouveau, vers la Suède cette fois. En 1884, elle est enfin nommée à l’université de Stockholm. Elle y étudie la rotation d’un corps solide autour d’un point fixe, un vieux problème sur lequel elle jette un regard là encore résolument novateur.

Aujourd’hui, son apport aux mathématiques est unanimement reconnu. Elle a d’ailleurs donné son nom à deux prix de mathématiques : le Prix Sofia Kovalevskaïa décerné en Allemagne à de jeunes scientifiques et le prix Kovalevskaïa qui promeut les femmes scientifiques sciences des pays en développement.

Femme du jour : Berthe Morisot

Berthe Morisot est une peintre appartenant au premier groupe des impressionnistes.

Née le 14 janvier 1841, elle se voit offrir des leçons de peinture avec ses deux sœurs pour « faire une surprise » à leur père qui est amateur d’art. Mais les jeunes filles n’apprécient pas du tout le style néo-classique de leur premier professeur. Elles en changent, vont rencontrer des copistes au Louvre, demandent à peindre en plein air et finissent par devenir les élèves de Camille Corot. C’est un néo-classique lui aussi, mais il aime peindre des paysages d’après nature, sur le vif, et travailler ses lumières.

Berthe Morisot vers 1877

 

Les jeunes filles envoient leurs premiers tableaux au Salon, l’exposition la plus courue de Paris, dès 1864. On les remarque à peine mais Berthe Morisot ne cesse plus de peindre jusqu’à sa mort, au contraire de ses sœurs qui arrêtent après leur mariage ainsi que le veut la bienséance bourgeoise de l’époque.

Femme et enfant au balcon 1872. Ittleson foundation.

Berthe Morisot reste « vieille fille » jusqu’à 33 ans et épouse alors Eugène Manet, le frère d’Édouard, qui l’encourage à poursuivre sa carrière. Ses rapports sont plus compliqués avec l’auteur du « Déjeuner sur l’herbe ». Elle pose de nombreuses fois pour lui et ils s’influencent réciproquement, malgré des propos parfois acerbes de Manet. Il écrit ainsi à l’un de ses amis : « Je suis de votre avis, les demoiselles Morisot sont charmantes, c’est fâcheux qu’elles ne soient pas des hommes. Cependant, elles pourraient, comme femmes, servir la cause de la peinture en épousant chacune un académicien et en mettant la discorde dans le camp de ces gâteux »

Le berceau, 1873. Musée d’Orsay.

Mais Berthe Morisot ne va pas choisir le camp des « gâteux » au contraire. En 1874, elle adhère à la Société anonyme des artistes peintres, sculpteurs et graveurs fondée par Monet, Pissarro, Sisley et Degas (mais pas Manet qui a refusé de venir). Puis, abandonnant le Salon, elle participe à leur côté à la première exposition des « impressionnistes », comme les appelle le critique Louis Leroy d’après le tableau de Monet « Impression soleil levant ». Berthe Morisot est la seule femme exposée et la presse s’en donne à cœur joie contre elle. Albert Wolf écrit ainsi : « Il y a aussi une femme dans le groupe comme dans toutes les bandes fameuses ; elle s’appelle Berthe Morisot et est curieuse à observer. Chez elle, la grâce féminine se maintient au milieu des débordements d’un esprit en délire. » Furieux, Eugène Manet veut provoquer en duel le journaliste mais sa femme parvient à le retenir.

Jour d’été, 1879. National Gallery, Londres.

Au final, l’exposition est un succès et sept autres ont lieu jusqu’en 1886. Berthe Morisot pousse de plus en plus loin ses audaces esthétiques et finit par être considérée comme une figure de proue de l’impressionnisme. Elle n’en continue pas moins d’expérimenter de nouvelles techniques et de nouvelles thématiques : des nus au fusain, pastel, aquarelle… par exemple.

En mars 1895, elle meurt après avoir réalisé environ 400 œuvres. Cela ne suffit apparemment pas pour en faire une vraie peintre : son certificat de décès indique qu’elle est « sans profession ».

Bords de Seine, 1883, Galerie nationale d’Oslo.

Femme du jour : Lucy/Dinqnesh

Ou plutôt AL 288 – 1 est née il y a… 3,18 millions d’années dans l’actuelle Éthiopie. C’est une Australopithecus afarensis, une espèce éteinte d’hominidés d’Afrique. Elle ne fait pas partie des ancêtres des Homo sapiens (nous) mais appartient à une branche collatérale.

Ses restes furent découverts le 24 novembre 1974 par une équipe d’une trentaine de chercheurs éthiopiens, américains et français, codirigée par Donald Johanson, Maurice Taieb et Yves Coppens. Constitués de 52 fragments osseux (sur les 203 os du corps humain), ils forment le fossile le plus ancien à être aussi « complet ». Pendant que les savants les répertoriaient, ils écoutaient Lucy in the sky with diamond d’où le surnom donné au petit squelette. Mais les Éthiopiens l’appellent plutôt Dinqnesh : « tu es merveilleuse ».

Mais que sait-on d’elle au final ? Dinqnesh/Lucy mesurait environ 1,10 m et pesait moins de 30 kg. Elle est morte vers 25 ans sans doute en faisant une chute d’une douzaine de mètres. Cela ne doit pas surprendre : si elle pouvait marcher sur ses deux jambes comme nous, Dinqnesh/Lucy était aussi arboricole.

Depuis 1995, des chercheurs remettent en question son sexe. Ils analysent son os pelvien comme étant celui d’un individu mâle (bien que son bassin soit plus « féminin »). Si cela venait à être vérifié, ils proposent d’appeler Lucie, Lucien ou… Lucifer.

Femme du jour : Violette Nozière

Née le 11 janvier 1915, Violette Nozière est l’héroïne d’un fait divers qui prend les proportions d’un véritable fait de société par son retentissement médiatique.

Tout commence en août 1933, en pleine montée du fascisme en Europe sur fond de grave crise économique. Le corps du père de Violette est découvert dans l’appartement familial, tout près de sa mère qui respire encore. Quelques jours plus tard, elle avoue avoir essayé de les empoisonner tous les deux.

Son crime fait immédiatement les gros titres de la presse. Sa personnalité aussi : jeune étudiante de 18 ans issue de la classe moyenne, elle menait en fait une double-vie très peu avouable. Elle volait ses parents et se prostituait pour s’offrir des « toilettes », pouvoir passer ses journées dans les cafés et surtout entretenir son « amant de cœur ».

©Collection-Kharbine-Tapabor

Chacun se doit de prendre position sur l’affaire et les politiques n’hésitent pas à l’instrumentaliser brutalement. La droite dénonce ainsi en Violette Nozière le prototype d’une jeunesse décadente qui menace l’ordre social en s’attaquant à son fondement par excellence : la famille. La gauche, au contraire, transforme la jeune femme en symbole de la lutte contre les dérives de la société bourgeoise. Les surréalistes en font même leur muse. Dans une chronique dans l’Humanité, Louis Aragon parle d’elle comme d’une victime du patriarcat.

Il faut dire que si Violette reconnaît son entière culpabilité, elle explique son geste par sa haine envers son père qui abusait d’elle depuis plusieurs années. Elle maintient ses accusations, jugées crédibles par les enquêteurs, pendant son procès. Néanmoins, elles n’y sont jamais clairement abordées. Le viol et encore plus l’inceste sont des sujets complètement tabous à cette époque. Même la presse la plus sensationnaliste évite d’employer ces termes.

Dans ce contexte, le procès ne peut déboucher que sur un seul résultat : Violette Nozière est condamnée à la peine de mort pour parricide et empoisonnement, sans aucune circonstance atténuante. Heureusement, on ne guillotine plus les femmes dans les années 30. Sa peine est commuée en travaux forcés à perpétuité. Pétain la réduit plus tard à 12 ans d’enfermement et De Gaulle finit par gracier la jeune femme en 1945, preuve du malaise qu’a provoqué sa première condamnation dans une partie importante de la société.

En 1963, son avocat parvient même à obtenir sa réhabilitation et à la rétablir dans tous ses droits. Détenue modèle qui a renié son ancienne vie et s’est muée en catholique convaincue, Violette Nozière est alors devenue une respectable veuve, mère de 5 enfants, qui gère un hôtel avec sa mère. Elle mourra seulement trois ans plus tard d’un cancer des os, au milieu des siens.

Affiche du film inspiré à Claude Chabrol par l’affaire Violette Nozière en 1977