Les très Riches du duc de Berry reviennent avec le 1er jour du mois.
Sur terre
Septembre est illustré par le thème classique des vendanges. Cette miniature serait postérieure à la mort du duc et daterait des années 1440. En effet, le château représenté est celui de Saumur en Anjou, région viticole dès le Moyen-Âge, qui appartenait à un ennemi du duc et qu’il n’aurait sans doute pas fait représenter de son vivant. Entre le château et les vendangeurs, vous pouvez apercevoir une lice, un espace clos qui servait aux tournois. Justement, en 1446, René d’Anjou, propriétaire du château y aurait fait organiser une joute en l’honneur du roi de France Charles VII.
Au-dessus de la miniature, un ensemble de demi-cercles. Au centre, le Soleil est représenté sous la forme d’Apollon. L’image du dieu reprend une miniature byzantine qui appartenait au duc de Berry et montrait en fait l’empereur Héraclius (mort en 641).
Dans le ciel
Au-dessus de ce demi-disque solaire, sont dessinés 7 autres demi-cercles. En commençant par le plus petit, on a :
– les n° des jours du mois, 30 pour septembre.
– les lettres des premières lunes, une application du nombre d’or astronomique qui sert à faire coïncider les cycles lunaires et solaires.
– des croissants de lune qui rappellent les lettres des premières lunes situées en dessous.
– l’inscription « primaciones lune mensis septembribus dies XXX » : « première lune mois de septembre 30 jours »
– des signes du zodiaque qui débutent selon la position des astres au XV7 siècle: la Vierge et la Balance pour septembre
– le nom des signes du zodiaque montrés en dessous.
– les degrés de longitude contenu dans ces signes du zodiaques selon les astrolabes de la fin du Moyen-Âge.
Depuis Abyme, j’avais de nouveau envie de raconter une histoire au cœur de ma bonne ville de Bayeux. Alors quand Casterman m’a proposé d’écrire une aventure de Jhen, le Alix du Moyen-âge, je n’ai pas hésité longtemps. C’était « oui » mais à condition qu’il se déroule chez moi, à l’ombre de la cathédrale Notre Dame et de sa tapisserie de la reine Mathilde. Heureusement pour moi, et Casterman et le dessinateur Paul Teng ont été d’accord.
Voici donc une première case du Conquérant, le futur tome 17 des aventures de Jhen, à paraître l’an prochain. Vous voyez, rien ne sera épargné au héros.
La Jeanne d’Arc dont Jeanne Puchol et moi vous parlerons demain mardi et après-demain sur France Culture est très particulière : c’est une Jeanne sorcière (oui, les Anglais avaient raison…) et féministe.
Je m’étais expliquée de ces choix très particuliers dans la préface de l’album. Je vous la remets ici :
” Ecrire une Jeanne d’Arc en 2010 est devenu risqué : le personnage historique a complètement disparu derrière la figure patriotique célébrée chaque 1er mai par le Front national. On se trouverait facilement suspecté d’être un sympathisant du même parti. C’est oublier bien vite que Jeanne a longtemps été un symbole de gauche : celui de la fille du peuple abandonnée par le roi de France puis martyrisée par l’Eglise.
Alors Jeanne, vierge en armure ou victime des puissants ? A mon sens, aucune des deux. Dans Moi, Jeanne d’Arc, j’essaie de montrer un troisième visage de la Pucelle d’Orléans, celui d’une femme libre et émancipée qui choisit son destin, fût-ce au prix de la pire mort qui soit. Après tout, la Jeanne historique refusa le choix offert à son époque à toutes les jeunes filles : devenir épouse et mère ou religieuse. Au contraire, elle devint chef de guerre. Encore aujourd’hui beaucoup sont surpris de voir une femme s’accomplir dans l’armée. Les clichés sur la douceur et la sensibilité féminine ont la vie dure.
Mais pourquoi avoir fait de Jeanne d’Arc une sorcière ? Sans doute un peu pour énerver les tenants extrémistes de sa sainteté tardive, je le confesse. Mais surtout pour donner des racines à ses choix de vie, les inscrire dans une culture féminine à la fois riche, fertile et totalement en marge de la société. Ce n’est pas pour rien que l’une des premières revues féministes s’est intitulée Sorcières. Devenir l’une de ces magiciennes, c’est à la fois rompre avec le rôle traditionnel de la femme et s’affirmer comme femme avant tout. J’ai beaucoup de sympathie et d’admiration pour celles qui ont relevé ce défi. Et je serais fière qu’on me fasse des procès en sorcellerie pour cet album. ”
Les 7 et 8 août prochain, vous pourrez m’entendre ainsi que Jeanne Puchol vous parler de notre sorcière bien aimée, de Moi, Jeanne d’Arc, dans la Grande Traversée, l’émission estivale de France Culture diffusée de 9h à 11h et de 22h à minuit.
Notre interview commune sera diffusée dans le cadre des émissions consacrées à “Jeanne d’Arc, une rencontre ” du 6 au 10 août.
Nous participons à l’épisode 2 : l’âme de Jeanne, et l’épisode 3 : Jeanne de fer.
Pour en savoir plus l’album, vous pouvez bien sûr aller sur la page dédié de ce site mais aussi sur celui de notre éditeur Les Ronds dans l’O ici : Moi, Jeanne d’Arc
Voici le folio du mois d’août des Très riches Heures du duc de Berry. Comme je vous l’expliquais le 1er juillet, ce livre d’heures contient un calendrier avec tous les rites chrétiens annuels. Commandé par Jean de Berry (1340 – 1416), il ne fut terminé qu’après sa mort vers 1485-86.
La page dédiée à août montre à l’arrière-plan le château d’Étampes (Essonne) dont le donjon ou tour de Guinette est toujours debout de nos jours. Le duc de Berry l’acheta à la mort du comte d’Etampes et l’offrit au mari de sa petite-fille. Une interprétation fait donc des personnages nobles du premier plan le duc et ses petits-enfants. Mais cette identification est très discutée.
Derrière ces figures aristocratiques, on voit des paysans se livrant aux travaux des champs ou se baignant dans une rivière. Leur nudité est parfois interprétée comme une manière de les montrer comme des êtres vulgaires et grossiers. On aurait alors une opposition claire entre les nobles et les paysans qui serait un reflet de l’idéologie du commanditaire du livre d’heure. Jean de Berry idéaliserait les aristocrates mais mépriserait les paysans.
Le 26 juillet 1346, a lieu un des événements marquants le début de la guerre de 100 ans entre la France et l’Angleterre : le siège de Caen.
Débarqué le 12 juillet à Saint-Vaast-la-Hougue, à la pointe du Cotentin, le roi Edouard III d’Angleterre est à la tête de 40 000 hommes d’armes. Après avoir conduit une chevauchée meurtrière de deux semaines en Normandie, il met le siège devant Caen. Son fils, le Prince Noir, prend l’abbaye aux Dames tandis que d’autres capitaines prennent l’abbaye aux Hommes (les deux grandes abbayes fondées par Guillaume le Conquérant) et s’installent dans les faubourgs de la ville.
En face, la garnison française ne compte même pas 5 000 hommes dont moins de 1 000 hommes d’armes. De plus, Raoul de Brienne, qui défend la ville, n’est pas d’accord avec les bourgeois sur la stratégie à adopter. Malgré ça, la résistance de la ville est acharnée. Toute la population participe farouchement à sa défense.
Le soir venu, seul le château de Caen (défendu, pour l’anecdote par Guillaume Bertrand, évêque de Bayeux) résiste encore. Edouard III est finalement vainqueur. Mais il est furieux d’avoir dû mener un « combat long et disputé » alors que la prise de la ville aurait dû être si facile.
Dans sa colère, il ordonne le massacre de toute la population et l’incendie de la cité. « Heureusement » un de ses compagnons parvient à le calmer en partie. Le roi ne donne finalement le droit à ses soldats de piller la ville « que » pendant trois jours.
Pendant qu’Edouard III se recueille sur la tombe de Guillaume le Conquérant, son ancêtre, ses hommes massacrent au moins 2 500 personnes, rançonnent les nobles et les bourgeois, violent les femmes, et accumulent assez de butin pour remplir une centaine de bateaux.
Ils repartent le 31 juillet pour la suite de leur chevauchée normande à l’exception de 1 500 d’entre eux. Aussitôt, la population se soulève et ils sont à leur tour massacrés par les défenseurs du château.
Ci-dessous :
– Illustration du siège de Caen dans les Chroniques de Jean Froissart, auteur inconnu, XVè siècle, manuscrit conservé à la Bibliothèque Nationale
– Plan de Caen, issu de François de Belleforest, La Cosmographie universelle de tout le monde. Paris, 1575.
Ce plan est largement postérieur au siège de Caen mais je ne résiste pas à l’envie de le poster pour vous donner une idée de la structure ancienne de la ville.
Les 7 et 8 août prochain, vous pourrez m’entendre ainsi que Jeanne Puchol vous parler de notre sorcière bien aimée dans la Grande Traversée, l’émission estivale de France Culture diffusée de 9h à 11h et de 22h à minuit.
Notre interview commune sera diffusée dans le cadre des émissions consacrées à “Jeanne d’Arc, une rencontre ” du 6 au 10 août.
Nous participons à l’épisode 2 : l’âme de Jeanne, et l’épisode 3 : Jeanne de fer.
Tous les ans, nous allons au festival d’Angoulême, tous les ans nous passons par le quartier Saint-Cybard et tous les ans je me demande, “mais enfin qui c’est ce Cybard ?” avant de l’oublier pendant un an…
Eh bien la réponse est enfin venue à moi sous la forme de l’éphéméride du mois de juillet qui m’a appris qu’hier on fêtait ce mystérieux personnage.
Cybard, ou plutôt Eparchus de son nom latin, est le saint patron d’Angoulême. Il vécut au VIè siècle. Moine, il fonda l’abbaye qui portait son nom. Surtout, il resta reclus pendant 44 ans dans la grotte sous le rempart de la ville dont je vous mets la photo en dessous. Pour les locaux, c’est juste à côté du Jardin Vert.
Une situation pas tellement différente de celle des auteurs de BD qui passent toute leur vie dans leur atelier finalement.
Puisque nous sommes le 1er juillet, voici la page correspondant à ce mois dans les très Riches heures du duc de Berry.
Un livre d’heure est un ouvrage permettant à son propriétaire de connaître les différentes prières quotidiennes. Il comprend aussi souvent un calendrier avec tous les rites et cérémonies annuels.
Jean de Berry (1340 – 1416) commanda les illustrations du sien aux frères Paul, Jean et Herman de Limbourg vers 1410-1411. Inachevé à leur mort à tous, il ne fut terminé que vers 1485-1486.
Ici, sont représentés les travaux de juillet : la tonte des moutons et la moisson. A l’arrière-plan, derrière la rivière Boivre, on peut voir le château de Poitiers. Incendié par les Anglais (on est en pleine guerre de 100 ans), il avait été reconstruit pour le duc par l’architecte Guy de Dammartin vers 1378-1380.
Les Musulmans célèbrent aujourd’hui l’Aïd el-Fitr. Il s’agit de la fête marquant la rupture du jeûne et la fin du Ramadan.
Ce matin, ils se sont réunis dans les mosquées pour dire une prière particulière ou salat al aïd, et écouter le sermon d’un imam. Puis, ils ont pu rejoindre leurs proches pour leur présenter leurs vœux.
S’ils ne l’ont pas encore fait, il ne leur reste plus qu’à verser « l’aumône de rupture du jeûne » ou zakât al-fitr qui doit les purifier des péchés commis pendant le Ramadan. Cette année, elle a été fixée à 7 € par personne.