L’actualité

Combat de Carnaval et de Carême

Demain, c’est Mardi Gras, le dernier jour du Carnaval. Il sera suivi, pour les Catholiques, du Mercredi des Cendres, le premier jour du Carême. Ils passeront alors d’une période de fête à une période de pénitence qui ne finira qu’au moment de la fête de Pâques.
Le tableau de Pieter Brueghel l’Ancien ci-dessous illustre cette idée. C’est le « Combat de Carnaval et de Carême ». Peint en 1559, il montre une place de village flamand avec deux cortèges qui s’affrontent au premier plan. À gauche, du côté de l’auberge et de ses plaisirs, se trouve Carême assis sur un tonneau de bière orné de viande. À droite, du côté de l’église, on a Carême avec sa triste figure et ses poissons, symbole du jeûne, du temps où il est justement interdit de manger de la viande ou des œufs.
Je vous laisse découvrir la multitude des autres détails. Il ne manque que Charlie. 🙂

Publié le Catégories Éphéméride, Histoire moderne, Peinture
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Fils des âges farouches

C’est le 3 mars 1969 qu’est apparu pour la première fois Rahan dans le journal Pif Gadget.
Ses aventures écrites par Roger Lécureux et dessinées par André Chéret l’ont mis aux prises avec de dangereux sorciers prompts à abuser des désirs et des peurs de « ceux qui marchent debout », des fauves de toutes sortes et même… des dinosaures ! Avec ses seuls colliers de griffes et coutelas en ivoire qui ont fait rêver des générations d’enfants, il a exploré le monde à la recherche de la « tanière du soleil » jusqu’en 2010.
Entre temps, Pif Gagdet a disparu, Chéret a été en procès avec son éditeur, Vaillant, la série a rechangé plusieurs fois de maison d’édition et Roger Lécureux est mort en 1999, laissant la place à son fils, preuve que dans la réalité comme dans la fiction Rahan était prêt à survivre à tout.

Ci-dessous : Rahan découvert par Crâo qui deviendra son père adoptif et lui donne son nom.

Le Carnaval

Le carnaval est de retour ces jours-ci de Venise à Dunkerque en passant par Rio.

Son nom dérive du latin « carnelevare », « enlever la viande » car il marque, pour les Chrétiens, le dernier moment où on peut manger de la viande avant le début du Carême, le jeune relatif, qui précède Pâques.

Mais le carnaval est aussi l’héritier de célébrations plus archaïques. A l’origine, les déguisements sont là pour rappeler et surtout conjurer les esprits de la nature et les démons qui risquent de faire basculer le monde dans le chaos. À la fin de la fête, ils sont symboliquement vaincus : le Roi Carnaval est brûlé et tout rentre dans l’ordre pour un an.

Ci-dessous: Le menuet ou scène de carnaval par Giandomenico Tiepolo, 1754-1755, Louvre

Très riches Heures du duc de Berry: mars entre printemps de féérie

Avec le mois de mars revient enfin le printemps au Moyen-Âge. On est alors très loin d’avoir plus de 20° en février et de craindre le réchauffement climatique. Au contraire, vers 1410-1420, on est en plein dans le petit âge glaciaire qui durera jusqu’à la fin du XIXe siècle. On est donc content de pouvoir labourer un champ, tailler sa vigne ou aérer le sol comme les paysans de cette peinture des très riches Heures.

Derrière eux, on voit le château de Lusignan, un des plus grands château fort de France situé dans le Poitou. Il appartient au duc de Berry qui l’a fait complètement rénové et « modernisé ». Mais il est surtout censé avoir été fondé par la fée Mélusine, une ancêtre légendaire du duc.
Quelques années auparavant, en 1392, le poète Jean d’Arras a composé pour lui la Noble histoire de Lusignan dans laquelle il raconte comment Mélusine interdisait à ses proches de venir la voir le samedi, jour de son bain. Lassé, son mari, Raymondin de Lusignan, finit par briser l’interdit. Hélas, il découvrit que sa femme était victime d’une malédiction : une fois par semaine, le bas de son corps se changeait en queue de serpent ! Découverte, Mélusine se transforma complètement en dragon et s’enfuit pour toujours par la fenêtre. C’est elle que l’on voit voler au-dessus de la tour de droite du château.

©Photo. R.M.N. / R.-G. Ojda

Dans les très riches Heures, vous pouvez découvrir aussi :

les autres mois : janvier, février, mars, avril, mai, juillet, août, septembre, octobre, novembre , décembre

une fête chrétienne illustrée dans le livre : l’Ascension

Un étonnant “homme zodiacal”

Des Martiens en Algérie

Plusieurs milliers années avant notre ère, les Martiens ont atterri dans le désert algérien, sur les plateaux rocheux du Tassili n’Ajjer. C’est du moins la conclusion ésotérique à laquelle sont arrivés de nombreux lecteurs d’« A la découverte des fresques du Tassili » d’Henri Lhote.

Dans les années 1956 -1957, ce très sérieux préhistorien réalisa une grande campagne de relevés des peintures et gravures rupestres du sud-est de l’Algérie. Il fut notamment marqué par une représentation humanoïde de 6 mètres de haut qu’il appela le… « grand dieu martien ». Lui-même y voyait un trait d’humour à une époque où la conquête spatiale et les soucoupes volantes étaient très à la mode. On est 20 ans après le canular radiophonique d’Orson Wells et le Spoutnik sera envoyé dans l’espace par l’URSS cette même année 1957.

Mais Lhote fut pris au pied de lettre en 1960 par Louis Pauwels et Jacques Bergier, les auteurs du « Matin des magiciens », un livre consacré aux « domaines de la connaissance à peine explorés », « aux frontières de la science et de la tradition ». Vendu à un million d’exemplaires, il interroge : « Les fresques découvertes dans la grotte de Tassili, au Sahara, représentent notamment des personnages coiffés de casques à longues cornes d’où partent des fuseaux dessinés par des myriades de petits points […]. Et s’il s’agissait de la représentation de champs magnétiques ? ». Pour les auteurs pas de doute : les peintures sont une preuve parmi d’autres « des visites d’habitants de l’extérieur » sur notre planète.

Bergier et Pauwels firent de nombreux adeptes et leurs idées persistent toujours auprès d’une partie du public qui reconnaît, par exemple, dans la procession ci-dessous un autre groupe de Martiens. Plus « scientifiquement », cet art rupestre saharien dit des « têtes rondes » reste difficile à dater et à interpréter, d’autant que des études des années 1990-2000 ainsi que les aveux d’un ancien membre de l’équipe de fouille de Lhote ont montré qu’une partie des gravures ont été réalisées pendant les fouilles à l’insu du scientifique.
Les autres sont aujourd’hui datées de 5 000 à 6 000 ans avant notre ère. Elles pourraient évoquer des personnes portant des masques, exécutant peut-être des danses rituelles.


Ci-dessous :
– Une procession de « Martiens » à tête ronde sur une paroi de Tassili. © Patrick Grubban
– Henri Lhote devant des gravures rupestres en 1967 © gbaku
– Le « grand dieu » de Sefar. © DSstrech
– Des touristes devant le grand dieu. © DSstrech

Nathalie Henneberg, autrice de SF

Quand j’ai commencé à lire de la science-fiction, j’ai eu une grande période « Charles et Nathalie Henneberg », deux des premiers auteurs de fantasy français. J’ai adoré la Naissance des Dieux (1954), la Plaie (1964)… Aujourd’hui j’apprends par Télérama (lien plus bas) qu’en fait Nathalie Henneberg a écrit seule tous les romans et a dû demander à son mari de les co-signer car le genre était jugé « trop virile » pour elle et que cela ne passerait pas si on savait que l’auteur était une femme… Même après la mort de son conjoint, elle dut continuer à invoquer « des manuscrits inachevés » de celui-ci qu’elle ne faisait que terminer… Toute une époque… Ce n’est qu’à partir des années 60 qu’elle put enfin assumer petit à petit ces créations.
On n’en est plus là de nos jours… enfin j’espère. Quand j’ai commencé le Fléau des Dieux des gens bien intentionnés m’ont conseillé de me faire appeler « Valérie Bajram » plutôt que « Mangin », c’était quand même plus vendeur. D’autres, après la publication des premiers albums et le succès qu’ils ont rencontrés, ont douté que je les avais écrits. Un space opera opposant un nouvel Attila à un empire romain galactique, ce n’était quand même pas un sujet pour une femme. Et puis, j’avais un mari auteur de SF, alors c’était lui qui les avait écrits, forcément… Il a fallu de longues années pour que tout le monde me considère non comme une « bonne scénariste » mais simplement comme « une scénariste ».
Aujourd’hui, de nombreuses questions se posent toujours : l’égalité de traitement entre autrices et auteurs n’est pas encore pleinement acquise. Il n’y a qu’à voir la bronca qui s’est élevée des rangs d’une partie des auteurs à l’annonce que Rumiko Takahashi avait reçu le grand Prix d’Angoulême cette année. Elle avait été élue uniquement parce qu’elle était une femme et non (et surtout) parce qu’elle était une grande autrice… Ce n’était pas compatible apparemment.
Mais bon… Les choses ont tout de même évolué positivement depuis les années 50. Alors, ce lundi, je crois que je vais relire quelques romans de Nathalie Henneberg, juste comme ça, pour le plaisir.

La mort de Félix Faure ou le danger de vouloir assurer à tout prix

Ce vieux monsieur respectable est Félix Faure, président de la République de 1895 à 1899. Plus que pour ses actions politiques, il est connu pour les circonstances de sa mort le 16 février 1899.

Ce jour-là, il fit venir, comme de coutume, sa maîtresse, Marguerite Steinheil, dans le salon bleu de l’Élysée. Au même moment, il terminait un entretien avec l’archevêque de Paris et le prince de Monaco venus intercéder pour le capitaine Dreyfus, la grande affaire judiciaire de l’époque.
Les discussions ayant sans doute refroidi ses ardeurs, le président prit une dose massive d’aphrodisiaque (son habituel à base de quinine ou bien un autre, plus puissant, à base de cantharide). Hélas, peu de temps après son entrée dans le salon où l’attendait son amie des cris, et pas de plaisir, se firent entendre.
Vous devinez la suite. Son chef de cabinet retrouva Félix Faure à l’agonie et dénudé sur un canapé. Selon la tradition, c’est une fellation qui aurait eu raison de son cœur déjà fragile.
Vous imaginez le scandale à l’époque…

Cette version des faits a d’ailleurs été très contestée par la suite: les tenant de la théorie du complot pensent que Félix Faure a été empoisonné par des Dreyfusards (des pro-Dreyfus) tandis que des historiens de la médecine penchent, plus sérieusement, pour un simple accident vasculaire cérébral sans rapport avec ses activités sexuelles. On ne saura sans doute jamais la vérité.

Ci-dessous:
– portait officiel de Félix Faure (Pierre Petit photographe)
– la mort de Félix Faure, représentée dans Le petit Journal

 

 

Les Lupercales ou Marc Antoine tout nu (enfin presque…)

À la mi-février, on célébrait dans la Rome antique les Lupercales, des fêtes de purification en l’honneur du dieu Faunus lupercus, « Faunus qui repousse les loups » loin des troupeaux.

On lui sacrifiait un bouc à l’intérieur de la grotte dans laquelle la louve était censée avoir allaité Romulus et Remus, les fondateurs légendaires de la ville. Puis, le prêtre apposait son sang sur le front de deux adolescents vêtus de peaux d’animaux. Il éclataient de rire et, après s’être armés de lanières taillées dans le cuir du bouc sacrifié, rejoignaient les 22 autres luperques et allaient fouetter (!) tous ceux et surtout toutes celles qu’ils croisaient sur leur passage. Le fête de la purification était aussi une célébration de la fécondité retrouvée au sortir de l’hiver.

Mais le rapport avec Marc Antoine me direz-vous ? En 44 av JC, c’est lui, alors consul de Rome, qui était le premier des luperques. Cette mauvaise langue de Cicéron le décrit comme « nudus, unctus, ebrius », nu, huilé et ivre. Couvert de sa seule peau de bouc, il tenta par deux fois de poser un diadème sur la tête de César et par deux fois, César le repoussa… sous les acclamations de ses partisans qui espéraient peut-être le voir devenir le monarque de Rome.
Un mois plus tard, c’était les ides de mars. Après le meurtre de César, Marc Antoine s’enfuit pour échapper à ses assassins. Il se dépouilla de ses insignes de consul pour ne pas être reconnu et se retrouva donc une fois de plus tout nu ou presque… Comme quoi, à Rome, du tragique au grotesque, il n’y a jamais qu’un pas souvent vite franchi.

Ci-dessous :
– Les Lupercales, vers 1635, musée du Prado © Andrea Camassei
– Richard Burton en Marc Antoine dans le Cléopâtre de Joseph L. Mankiewicz en 1963 (je vous laisse l’imaginer en peau de bouc)

Saint Valentin

Les reliques de saint Valentin de Terni et moi souhaitons une joyeuse fête à tous les amoureux.

Pour les curieux, saint Valentin était, selon la tradition catholique, un prêtre du IIIe siècle après Jésus-Christ. Il mariait les amoureux chrétiens contre la volonté de l’empereur Claude II le Gothique qui avait besoin d’hommes célibataires pour ses armées.
Dénoncé, Valentin fut envoyé en prison où il rendit miraculeusement la vue à Julia, la fille de son geôlier. Furieux de l’aventure, Claude ordonna alors l’exécution du prêtre. Il fut battu puis décapité sur la via Flaminia, à Terni, un 14 février.
Bien sûr, toute la famille de Julia se convertit alors au christianisme et la jeune fille planta un amandier près de la tombe de Valentin, faisant de cet arbre le symbole de tout amour.

Plusieurs villes conservent ses reliques. Le crâne que vous voyez ci-dessous se trouve à Rome, dans la basilique Sainte-Marie de Cosmedin.