Un curieux vient de me demander si le mot « canicule » avait un rapport avec « canis », le chien en latin. Eh bien oui.
« Canicula » est le diminutif féminin de « canis », cela veut dire littéralement « petite chienne ». Depuis le 1er siècle avant Jésus-Christ, les Romains nomment ainsi l’étoile Sirius qui fait partie de la constellation du Grand Chien.
En Europe, « Canicula » se lève et se couche en même temps que le soleil entre le 24 juillet et le 24 août. Les savants de l’Antiquité ont donc fait très tôt le rapprochement entre ces mouvements de l’étoile et la venue des grandes chaleurs.
Pline l’Ancien écrit ainsi dans son Histoire Naturelle : « Quant à la Canicule, qui ignore que, se levant, elle allume l’ardeur du soleil ? Les effets de cet astre sont les plus puissants sur la terre : les mers bouillonnent à son lever, les vins fermentent dans les celliers, les eaux stagnantes s’agitent. Les chiens aussi sont plus exposés à la rage durant tout cet intervalle de temps ; cela n’est pas douteux. »
A la suite des savants, les poètes férus d’astronomie reprennent le motif de la canicule et de ses conséquences néfastes dans leurs vers. Horace parle même de « la rouge Canicule qui fera éclater les muettes statues ».
Pour contrer cette calamité estivale, une seule solution est alors proposée : sacrifier des chiennes rousses lors de la fête de l’Augurium canarium.
Ci-dessous, des chien.ne.s roux.sses qui n’ont rien de romain.e.s mais que j’ai trouvés mignon.ne.s. (La prochaine fois, je fais un article en rapport avec les chatons… ou les pandas…)
“Ô temps ! Ô mœurs !”
Je ne sais pas pourquoi, le grand feuilleton politique de l’été me donne envie de citer Cicéron aujourd’hui. Cette locution, O tempora, o mores ! se trouve dans son premier discours contre Catilina. L’orateur y fustige la décadence de son époque qui a oublié le “mos majorum”, les coutumes des ancêtres.
Cela dit, à titre personnel, je ne regrette pas les temps anciens, pas plus que je ne crois que le nouveau monde soit si différent de l’ancien…
Quant à Catilina, ce n’est pas une charmante jeune femme qui a repoussé les avances de Cicéron comme un camarade de classe l’a répondu un jour à notre professeur de latin :
“Pour résumer brièvement l’affaire, Catilina est un sénateur romain à la réputation sulfureuse : plus chef de bande qu’homme politique, il n’hésite pas à faire le coup de poing pour imposer ses idées. En 63 avant J.C., après avoir échoué à trois reprises à l’élection du consulat, Catilina renonce à emprunter la voie légale et opte pour la manière forte : il prend la tête d’une conjuration dont le but est d’éliminer une partie des hommes politiques (Cicéron inclus), de renverser le Sénat et de prendre le pouvoir. Cicéron, alors consul, apprend l’existence de ce complot et dénonce Catilina au Sénat – ce sont les “Catilinaires” en question. Catilina s’enfuit en Étrurie auprès de ses partisans, mais il est tué en 62 avant J.C. Les autres conjurés, restés à Rome, sont exécutés sur les ordres de Cicéron. Acclamé par le peuple, il sera pourtant condamné à l’exil quelques années plus tard, pour avoir fait assassiner sans procès des citoyens romains… ”
Le 18 juillet 390 ou 387 avant Jésus-Christ a lieu un événement qui traumatise les Romains pour plusieurs siècles : la bataille de l’Allia, du nom de la rivière près de laquelle elle se déroule.
Là, à seulement une quinzaine de kilomètres de la Ville, les troupes du tribun consulaire Quintus Sulpicius Longus subissent une des pires défaites de l’histoire romaine face à l’armée gauloise de Brennus, inférieure en nombre mais beaucoup plus expérimentée.
Paniqués par les chants de guerre gaulois, surpris par l’assaut de leurs adversaires qui ont d’emblée déjoué leur tactique, les Romains se font massacrer. Ceux qui parviennent à fuir se noient en masse. Les survivants rejoignent une cité étrusque tout proche et renoncent à rentrer tout de suite à Rome.
La Ville est abandonnée aux Gaulois qui la mettent à sac à l’exception du Capitole qui résiste plusieurs mois avant de se rendre. Les survivants doivent s’humilier et payer une énorme rançon à leurs vainqueurs pour s’en débarrasser enfin.
Cet épisode du sac de Rome par les Gaulois donne lieu ensuite à l’invention de nombreux épisodes héroïques et est exagéré par la plupart des auteurs/historiens romains.
Trois cents ans plus tard, quand César part à la conquête des tribus gauloises, la mémoire de l’Allia est encore bien présente à Rome. Elle fait douter certains de la capacité du proconsul à triompher de ses adversaires et poussent les autres à espérer une revanche qui lave enfin leur humiliation.
Depuis, cette victoire gauloise contre les Romains et le sac de Rome qui a suivi n’ont pas cessé d’alimenter l’imaginaire français pour le pire et le meilleur.
Au XIXè siècle, l’image du barbare se teinte d’une connotation érotique comme on le voit dans le tableau de Paul Jamin ci-dessous. Mais, parallèlement, dans le cadre de l’affirmation de la nation française et de la lutte contre l’Allemagne, Brennus devient aussi un symbole nationaliste.
C’est tout naturellement donc qu’Alix part à la recherche de son épée dans les Légions perdues pour empêcher Pompée de s’en servir pour rallumer la guerre en Gaule (ce qui donne l’occasion à Martin de présenter Brennus et la prise du Capitole)
À notre époque encore, l’équipe victorieuse du championnat de France de Rugby reçoit en récompense le « bouclier de Brennus ». On dit souvent qu’il doit son nom du chef gaulois alors qu’il s’agit en fait simplement de celui de son créateur : Charles Brennus, un maître graveur du XIXè siècle passionné de sport.
Mais c’est beaucoup moins héroïque !
Le Brenn et sa part de butin par Paul Jamin, 1893.
Un extrait des Légions perdues, Alix, par Jacques Martin, 1965, éditions Casterman.
On ne connaît pas exactement la date de naissance de César ou plutôt de Caius Julius Caesar IV. En général, on la place le 12 ou le 13 juillet 100 ou 102 av. J.-C.
Contrairement à ce que l’on dit souvent, sa mère, Aurelia Cotta, n’accoucha pas par césarienne. Dans l’Antiquité, on ne pratiquait cette opération que sur les mères mortes ou mourantes car on savait pas alors comment éviter le décès de la parturiente.
Son père, Caius Julius Caesar III, appartenait à une famille patricienne mineure. Il ne dépassa pas le rang de préteur, de magistrat chargé de rendre la justice à Rome. Il mourut subitement en mettant ses chaussures en 92 av. J.-C.
Le petit Caius grandit dans une insula, un immeuble, du quartier de Subure, le quartier le plus mal famé de Rome.
Il était donc a priori destiné à faire une carrière de magistrat honorable mais pas exceptionnelle. Accéder au consulat, comme le fit un frère de son père, aurait déjà dû être un combat pour lui. Les guerres civiles en décidèrent autrement.
Plus tard, pour pallier à une ascendance qu’il jugeait sans éclat, César se proclama le descendant de Iule, fils du Troyen Énée, lui-même fils de Vénus.
Celui qui réussit à devenir dictateur perpétuel de Rome et désira peut-être en devenir le roi, ne pouvait que descendre des dieux !
Ci-dessous : Jules césar par Thierry Démarez pour le tome 3 d’Alix senator premium, éditions Casterman.
J’avoue que j’étais passée à côté de Bob l’éponge au moment de sa sortie. Je suis en plein rattrapage grâce à Netflix. Cette accumulation de bêtise hilarante s’en prend à tout y compris à la mythologie ! Voici Bob l’éponge transformé en dieu romain par Neptune après l’avoir vaincu dans un concours d’hamburgers au crabe dans la Spatule de Neptune (saison 1, épisode 19)
Le 12 juin 1963 sortait dans les salles Cléopâtre, l’ « épopée intime » de Joseph L. Mankiewicz.
L’énorme peplum de plus de 4 heures coûta plus de 35 millions de dollars de l’époque (soit près de 300 millions de dollars actuels). Il faillit bien couler la Fox qui le produisait.
Il coûta également sa santé à Elizabeth Taylor dont les journaux annoncèrent même la mort. Cela n’empêcha pas la jeune femme d’être la première actrice à obtenir un cachet d’un million de dollars et surtout de tomber amoureuse de son partenaire, Richard Burton. Ils quittèrent tous les deux leur conjoint pour vivre une relation tumultueuse d’une quinzaine d’années. Elle fit presque couler autant d’encre que celle d’Antoine et Cléopâtre.
En 1964, le film reçut 4 oscars techniques mais les premières critiques furent très mauvaises. Elizabeth Taylor en particulier fut la cible de beaucoup de moqueries.
Personne n’aurait parié à l’époque que le film deviendrait un classique et serait encore diffusé de nos jours.
Parce que c’est lundi et qu’il faut commencer la semaine en beauté:
le sergent Garcia et le gouverneur de Californie s’aperçoivent qu’ils sont tous les deux déguisés en Néron au bal costumé donné par Zor… pardon don Diego de la Vega dans Mascarade pour un meurtre (Zorro, saison 2, épisode 35, oui, 1959, c’était l’époque où les saisons des séries pouvaient avoir 39 épisodes !)
Du 7 au 15 juin avaient lieu à Rome les vestalia, les fêtes en l’honneur de la déesse Vesta, maîtresse du feu sacré de Rome.
Les cérémonies se déroulaient dans son temple où on ouvrait le « penus Vestae », le sanctuaire, habituellement dissimulé derrière un rideau. Là, se trouvaient tous les objets sacrés liés au culte et surtout les Pénates, les gardiens archaïques du foyer, du peuple romain.
Les matrones y entraient pieds nus et cheveux dénoués pour y demande la bénédiction de la déesse pour elles et leurs familles. Elles apportaient en échange de multiples offrandes dont le foetus d’un veau retiré directement du ventre de sa mère (bon appétit !)
Le dernier jours, le penus était refermé et le temple solennellement nettoyé et purifié.
A partir du IIè siècle avant Jésus-Christ, les vestalia devinrent aussi la fête des boulangers, des meuniers et même des ânes (eh oui 🙂 ) qui fabriquaient ou transportaient la farine destinée aux sacrifices religieux.
Juste à côté de la halle Freyssinet où a eu lieu le festival de bande dessinée d’Amiens, se trouve le chantier archéologique d’une partie du théâtre romain d’Amiens à l’époque où la capitale picarde s’appelait encore Samarobriva Ambianorum.
Situé à la lisière de la cité, cet impressionnant bâtiment avait été construit sur le site d’entrepôts ou peut-être d’une caserne incendiée vers l’an 120 de notre ère. Ses gradins de bois se déroulaient sur environ 120/140 m de diamètre et ils pouvaient accueillir plus de 5 000 spectateurs.
Le théâtre fut utilisé jusqu’à la grave crise du IIIè siècle pendant laquelle tout le quartier fut abandonné. Il servit de décharge puis de nécropole.
On voit encore aujourd’hui des traces des différentes utilisations du site : murs des entrepôts, du théâtre, tombe et bien sûr, caves des maisons de l’époque moderne.
Les fouilles seront terminées dans quelques mois et laisseront la place au chantier de construction d’un immeuble.
Malheureusement, les restes antiques ne pourront pas être conservés et seront alors détruits (ça, je ne m’y ferai jamais…)
Merci encore à Josabeth Millereux-Le Béchennec, l’archéologue du chantier, de me l’avoir fait visiter. Ça a été passionnant.
Voici quelques photos du site et une reconstitution du monument par Jean-Claude Golvin.
Aujourd’hui, dernier dimanche de mai, nous célébrons en France la fête des mères.
C’était il y a 15 jours chez nos amis belges.
De telles célébrations existent depuis l’Antiquité : le 1er mars, on fêtait à Rome les Matronalia. C’était l’occasion d’offrir des cadeaux aux « matrones » et de célébrer l’anniversaire de la consécration du temple de leur protectrice, la déesse Junon.
C’était aussi une manière de rappeler, que tous les féministes s’accrochent à leur siège, que les premières matrones romaines, les Sabines enlevées et épousées de force par les Romains, avaient pris fait et cause pour ceux-ci. Elles les avaient finalement réconciliés avec leurs pères qui leur avaient déclaré la guerre.
Mais la fête des mères telle que nous la connaissons est apparue seulement au début du 20e siècle chez nous et aux États-Unis. En France, c’est le 10 juin 1906, qu’a lieu dans le village d’Artas une première cérémonie en l’honneur des mères de familles nombreuses. D’autres suivent ailleurs dans le pays.
En 1929, la journée des mères est officiellement adoptée dans le cadre de la politique nataliste suivant la Première Guerre Mondiale. Avec le maréchal Pétain, elle prend en 1942 une connotation encore beaucoup plus idéologique: la mère de famille est exaltée comme « l’inspiratrice de la civilisation chrétienne » de la France et la porteuse de toutes ses valeurs fondamentales.
Après guerre, la fête des mères est conservée mais redevient ce qu’elle était au début du siècle: une fête familiale et nataliste. Elle est bientôt rejointe par la fête des pères et celle des grand-mères.
Aujourd’hui, elle est célébrée dans plus de 130 pays.