Sarcophage d’Osiris

Statue de basalte d’Osiris momifié fécondant Isis transformée en oiseau, exposition temporaire de l’Institut du monde arabe, 2015.

Après avoir assassiné Osiris, son frère Seth dépeça son corps et le découpa en quatorze morceaux qu’il dispersa dans toute l’Égypte.
Heureusement, Isis, la sœur-épouse d’Osiris, parvint à retrouver tous les morceaux à l’exception du pénis divin que des poissons avaient mangé (!). Elle reconstitua donc le corps d’Osiris et lui modela un nouveau sexe artificiel. Puis, grâce à sa magie, elle insuffla à nouveau la vie au dieu et se transforma en oiseau pour s’unir à lui. De là naquit Horus, le dieu à tête de faucon.
Osiris, ranimé, ne revint pas sur terre. Il devint le roi du royaume des morts et laissa son fils le venger et devenir le dieu-souverain de l’Égypte.

Palette antique

Je viens de découvrir l’outil de travail d’un des plus vieux ancêtres de mes amis peintres et coloristes : cette émouvante palette en ivoire égyptienne date de 1390–1352 environ avant notre ère. Le cartouche porte le nom royal d’Amenhotep III, «Nebmaâtrê Mérienrê », c’est à dire « Rê est le possesseur [Maître] de la justice, Aimé de Rê ».

© Metropolitan Museum de New York

Les Textes des pyramides

Chambre intérieure de la pyramide du pharaon Ounas à Saqqarah, XXIVe siècle avant notre ère.

Pour la première fois, apparaissent les Textes des pyramides gravés sur ses murs. Ce sont des inscriptions religieuses qui reprennent l’ensemble des idées sur la mort et des coutumes funéraires égyptiennes.

Selon les archéologues, ils dépeignent en fait des pratiques archaïques, parfois déjà abandonnées au moment où ils sont gravés dans la pierre, comme la construction de mausolées en briques ou bien… le cannibalisme :

« C’est ledit Ounas qui mange les hommes, qui se nourrit des dieux. […] C’est Khonsou, couteau des Seigneurs, qui les dépècera pour Ounas et qui extirpera pour lui ce qui est dans leur ventre. […] C’est Chesmou qui les sacrifiera pour Ounas et qui en cuit un morceau sur les fourneaux du repas du soir ! C’est ledit Ounas qui mange leur magie-hekaou et avale leur pouvoir-akh ! »

Hymne cannibale traduit par Claude Carriera.

Découverts par Gaston Maspéro en 1881, les Textes des pyramides sont ici photographiés en 1900.

Carmenta

À chaque époque ses combats…

À la fin du IIe siècle avant notre ère, les Romaines se virent privées par le Sénat du droit de… voyager en voiture. Aussitôt, elle se mirent en grève et refusèrent de « faire des enfants » tant que ce droit ne leur serait pas rendu. Ce fut vite fait.

Apparemment, le Sénat ne leur en voulut pas trop. Il accepta que, tous les 11 et 15 janvier, cette victoire féminine soit commémorée par deux jours de fêtes consacrés à la déesse Carmenta, protectrice de toutes les futures mamans.

Carmenta, miniature de Robinet Testard tirée d’un manuscrit du « De mulieribus claris » de Boccace, vers 1488-1496, BNF, Fr.599, f.22v.

Madame X de John Sargent

John Singer Sargent (12 janvier 1856 – 14 avril 1925) dans son atelier avec le portrait de Madame X, à Paris en 1884, photographie attribuée à Adolphe Giraudon.

Sargent mit un an à peintre le portrait de Virginie Gautreau, une mondaine parisienne, appelé ensuite « Madame X ». S’il est aujourd’hui considéré comme l’un de ses meilleurs tableau, il suscita un grand scandale à l’époque. Le décolleté, accentué dans la première version par une bretelle tombante fut jugé d’une sensualité bien trop provocante, voire malsaine.

Les critiques se déchaînèrent après sa présentation au Salon de 1884 au point que les commandes se tarirent et que Sargent pensa arrêter la peinture pour la musique ou même les affaires. Finalement, il n’en fit rien mais quitta tout de même Paris pour Londres. Là, il laissa le tableau bien en vue dans son atelier mais ne le vendit au The Metropolitan Museum of Art, New York seulement en 1916, après la mort de son modèle. Il y est toujours.

Sortie d’Alix senator le 25 août 2021

Vous n’aurez pas longtemps à attendre avant de retrouver les prochaines aventures du sénateur Alix en librairie. “Le Disque d’Osiris”, le tome 12 d’Alix Senator sera disponible dès le 25 août prochain.
En attendant, voici la toute première case de l’album. Vous voyez, elle se déroule dans la nécropole d’Abydos, la ville consacrée au dieu Osiris. De là à dire qu’il sera très présent dans l’album…

Thomas Becket, l’archevêque en cent morceaux

Le 29 décembre 1170, Thomas Becket, archevêque de Cantorbery, est assassiné dans sa cathédrale par des partisans de son meilleur ennemi, le roi d’Angleterre Henri II. On a longtemps cru à un complot mené par celui-ci mais il semble bien que les hommes aient agi de leur propre initiative, juste pour lui faire plaisir.

Mais le meurtre d’un tel ecclésiastique, quelques jours après Noël et dans sa propre église, ne pouvait que susciter un scandale international. Il fallait bien qu’au moins un roi soit responsable d’une telle horreur…

Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Comme Thomas Becket défendait les prérogatives de l’Église contre les velléités autocratiques de son souverain, le pape Alexandre III s’empressa de le canoniser en février 1173. Henri II, sans doute affreusement vexé, dut faire pénitence sur sa tombe pour ne pas être excommunié.

Pire encore, Thomas Becket fut ensuite vénéré comme martyr dans toute l’Europe chrétienne. Pour satisfaire les fidèles, son corps fut découpé en une centaine de morceaux placés dans de magnifiques reliquaires comme celui que je vous montre ci-dessous, conservé au Victoria and Albert Museum de Londres.

Il en reste aujourd’hui seulement une bonne moitié. Henri VIII, le lointain successeur d’Henri II avait la mémoire longue et la rancune tenace. Il fit détruire toutes les chasses qui se trouvaient encore à Cantorbery à son époque.

Chasse de reliques de Thomas Becket, conservée au Victoria and Albert Museum, Londres.

Abymes et l’École des Chartes

C’était en 1998 dans les locaux de la Sorbonne. J’avais les cheveux rouges, je soutenais ma thèse d’archiviste paléographe et je ne savais pas encore que j’allais devenir scénariste de Bande Dessinée. Toute une époque ! 🙂
Des années plus tard, j’ai raconté cette soutenance (ou presque) dans le tome 3 d’Abymes réalisé avec Denis Bajram.
Et voilà qu’une case de cette page se retrouve aujourd’hui dans le livre publié par l’École des Chartes, « mon » école et surtout celle des conservateurs d’archives, de bibliothèques et de musées pour fêter son bicentenaire. La boucle est bouclée.

Camille Claudel

Camille Claudel en 1884.

Née le 8 décembre 1864, Camille Claudel se passionne pour la sculpture dès son plus jeune âge. Elle attire bientôt l’attention du sculpteur Alfred Boucher, très reconnu à cette époque, et devient son élève avec d’autres jeunes filles. Mais il doit partir pour la Villa Médicis à Rome et demande alors à Auguste Rodin de le remplacer comme professeur.

Camille Claudel au bonnet, Auguste Rodin, 1885, musée Afro Brasil (São Paulo). © Sailko

Le travail de Camille Claudel impressionne beaucoup celui-ci qui la prend parmi ses praticiens dès 1884. Selon la légende, c’est elle qui aurait sculpté par exemple les mains des « Bourgeois de Calais ». Parallèlement, elle aurait influencé Rodin pour plusieurs autres œuvres comme « Le Baiser » ou « La Porte de l’Enfer ». En tout cas, les deux artistes se rapprochent et finissent par vivre une idylle qui durera jusqu’en 1892. Mais le sculpteur ne quittera jamais sa compagne officielle pour Camille Claudel, bien qu’elle ait souvent envisagé le mariage avec lui de son côté.

Sakountala, Camille Claudel, 1905, Musée Rodin, Paris.

Au cours de ces années de compagnonnage artistique, la maîtrise de la jeune femme s’accroît et son style de vient de plus en plus personnel. Elle s’attarde non seulement à travailler les nus chers à Rodin mais aussi, et de plus en plus, les motifs de drapé et toute une « statuaire de l’intimité », faite de scènes quotidiennes et de moments saisis sur le vif.

Les Causeuses (1897), Camille Claudel, Musée Rodin, Paris. © Thibsweb

Après 1892, Camille Claudel finit de se libérer totalement de l’influence de Rodin. En 1897, elle trouve une mécène, la comtesse Arthur de Maigret, qui lui permet de vivre de la sculpture. Mais une brouille intervient en 1905 et la sculptrice peine alors à trouver d’autres financements. Elle n’a qu’une seule commande de l’Etat en 1907. Si elle reçoit pendant ces années-là quelques soutiens de critiques comme Octave Mirbeau, elle est alors assez vue globalement par la société qui l’entoure. Paradoxalement, elle qui cause le scandale en sculptant des nus comme le ferait un homme, est une conservatrice antidreyfusarde et antirépublicaine.

De plus, dès 1905, Camille Claudel développe de profonds troubles paranoïaques. Elle vit recluse dans appartement en accusant Rodin de son manque de succès, alors qu’il l’a pourtant aidé plusieurs fois depuis leur rupture en payant son loyer et en lui présentant critiques et marchands d’art.

La Vague (1897), Camille Claudel, Musée Rodin, Paris. © Lomita

En 1912, alors qu’elle connaît une misère de plus en plus profonde, elle détruit elle-même ses œuvres pour « se venger de ses ennemis ». Tous la considèrent comme folle et l’année suivante, dès la mort de son père qui seul la protégeait encore, sa mère et son frère, l’écrivain Paul Claudel, la font interner.

Camille Claudel restera dans différents asiles jusqu’à sa mort en 1943, peut-être de malnutrition comme ce fut le cas de nombreux aliénés durant la Deuxième Guerre Mondiale. Ses amis essaieront en vain de la faire sortir et même Rodin restera impuissant à l’aider.

Elle ne sculptera plus jamais.

L’Âge mûr (1899), Camille Claudel, Musée Rodin, Paris. © Thibsweb

Le Mary Celeste

Le 4 décembre 1872, on retrouva au large des Açores un des plus célèbre vaisseaux fantômes de l’histoire maritime : le Mary Celeste. Il avait souffert : ses voiles étaient en mauvais état, sa cale en partie remplie d’eau. Mais il ne menaçait pas de couler. Sa cargaison d’alcool dénaturé était encore là ainsi que le contenu des cabines. Mais l’équipage et les passagers avaient complètement disparu. Peut-être avaient-ils emprunté la barque qui manquait mais on ne les retrouva jamais.

Le tribunal maritime de Gibraltar fut impuissant à comprendre ce qui s’était passé. Comme souvent, ce manque d’explication fit naître de nombreuses rumeurs et théories plus ou moins fondées. Ainsi, en 1884, un jeune médecin de marine, un certain Arthur Conan Doyle, s’en inspira pour publier un récit anonyme dans le Cornhill Magazine : J. Habakuk Jephson’s Statement . Il ajouta beaucoup de détails qui s’éloignaient de la réalité et fit des morts de la Mary Celeste les victimes d’un homme étrange, se disant le vengeur de l’Afrique et désirant y créer un empire rivalisant avec les pays occidentaux. Il faut dire qu’on n’était à peine une vingtaine d’années après l’abolition de l’esclavage et la Guerre de Sécession. Le futur créateur de Sherlock Holmes pensait que tout le monde comprendrait qu’il s’agissait d’une fiction, mais certains le prirent au sérieux. Le consul de Gibraltar diligenta même une enquête pour tout vérifier.

Trombe marine dans la baie de Tampa (Floride), © Joey Mole

Avant et après Conan Doyle, beaucoup d’autres auteurs, journalistes ou experts diversement qualifiés donnèrent leur version du naufrage. Ils firent la richesse du mythe que nous connaissons aujourd’hui.

Voici quelques-unes de leurs versions, des plus réalistes aux plus farfelues :
– L’équipage a abandonné le navire à la suite d’une violente trombe et s’est ensuite perdu en mer.
– Il a peut-être rencontré plutôt un iceberg ou subi un « tremblement de mer ».
– Le voilier s’est trouvé immobilisé en mer et a commencé à dériver vers des hauts-fonds. Il a été abandonné pour éviter le naufrage.
– Un incendie a fait craindre une explosion à cause du chargement d’alcool.
– Le tout est une escroquerie à l’assurance qui a mal tourné.
– Le Mary Celeste a été attaqué par des pirates berbères du nord du Maroc.
– Le capitaine a été pris d’une fureur religieuse et a massacré tout le monde avant de se suicider.
– L’équipage aurait découvert un vapeur abandonné avec un trésor à bord. Ils se seraient partagé ce trésor avant de partir dans les chaloupes à vapeur vivre une nouvelle vie.
– Tous les marins ont été dévorés par un calmar géant.
– Ils auraient succombé à une expérience mystique reliée à l’Atlantide.
– Tout ça aurait un rapport avec le Triangle des Bermudes…
– Et les extra-terrestres, hein ?