Jhen : Guerre de Cent ans et Normandie anglaise

Le monde de Jhen a au moins un point commun avec celui du jeune Alix : il est en proie à des guerres multiples que rien ne semble pouvoir arrêter.

La France est ainsi en conflit avec l’Angleterre depuis… 1337. C’est la fameuse Guerre de Cent Ans. Le début du XVe siècle a été favorable aux Anglais. De 1417 à 1419, Henri V a conquis la Normandie. Caen est tombée dès le 19 septembre 1417 (huit jours après Bayeux) et Rouen le 13 janvier 1419, entrainant la reddition de la plupart des places de la région qui résistaient encore.

Les premières cases du Conquérant, Jhen tome 18.

Parallèlement, en mai 1418, les Bourguignons, alliés des Anglais, sont parvenus à entrer dans Paris et à en chasser le dauphin Charles et ses alliés, les partisans du comte d’Armagnac. La tentative de réconciliation s’est soldée l’année suivante par… l’assassinat du duc de Bourgogne par les hommes du dauphin.

En 1420, le nouveau duc soutient donc l’Anglais Henri V quand il impose le traité de Troyes au roi de France, le fou Charles VI. Le dauphin est déshérité et le souverain lancastre épouse une princesse française. Leur fils doit devenir le double monarque de l’Angleterre et de la France, tandis que la Normandie reste la pleine possession du monarque anglais.

Or, dès 1422, Henri V et Charles VI meurent tour à tour. Henri VI, encore bébé, doit donc succéder à son père et son grand-père sur les deux trônes. Mais le dauphin ne l’entend bien sûr pas ainsi. Il se proclame roi de France alors que sa cause semble proprement désespérée. Il faut la chevauchée de Jeanne d’Arc pour commencer à renverser la situation entre 1429 et 1431.

Quatre ans plus tard, quand commence Le Conquérant, l’aventure de Jhen que je vous propose, la Normandie est plus que jamais anglaise. Rouen est la capitale politique et militaire du duché tandis que la cour des comptes a été installée à Caen. À Caen aussi se trouve la nouvelle université fondée par le duc de Bedford, l’oncle du jeune roi qui exerce la régence pour lui. Marchands, clercs et soldats anglais se sont installés partout. Ils ont obtenu des terres confisquées aux Normands qui ont essayé de résister. Des réactions hostiles existent ça-et-là, mais globalement la conquête est bien acceptée.

La rencontre de Jhen et du duc de Bedford, à Bayeux.

Or en 1435, tout tourne mal pour les Anglais : le traité d’Arras marque la fin de la guerre civile entre les Bourguignons et les Armagnacs. Charles VII peut se consacrer entièrement à la reconquête des terres occupées par ses ennemis d’outre-Manche. Mais il faudra tout de même attendre 1450 pour que la Normandie soit à nouveau rattachée au royaume de France et la Guerre de Cent ans ne se terminera définitivement qu’en 1475.

Traces de la grande guerre… des Gaules

Dans le tome 10 d’Alix Senator qui sort la semaine prochaine, vous verrez que je remercie tout spécialement un bon copain : Pascal Mériaux. Pas le Pascal Mériaux qui fait partie de l’organisation du festival d’Amiens, mais le Pascal Mériaux des Éditions de la Gouttière.

Sans lui, je n’aurais sans doute pas pensé aborder les thèmes de la conquête de la Gaule par les Romains et surtout des terribles séquelles, physiques et psychologiques, laissées par les combats sur les combattants.

Pourtant, Alésia, la défaite gauloise, le sort des vaincus en général sont des thèmes très importants dans l’univers d’Alix. Avant d’être sénateur, il est lui-même un orphelin de guerre réduit en esclavage par ceux-là même qui ont tué son père. Ce sont les Parthes et non les Romains mais cela change peu de choses au final. Pourtant, c’est comme ça, sans Pascal, j’aurais sans doute laissé ces thèmes en friche encore un moment.

Heureusement, en 2017, il nous a parlés, à Denis et moi, d’un projet de collectif qu’il avait pour l’année suivante. Cela devait s’appeler Traces de la Grande Guerre et offrir des visions d’auteurs de la Première Guerre mondiale et des conflits en général. Nous avons tout de suite accepté de participer et nous avons entraîné dans l’aventure le reste de l’Atelier Virtuel. Mon histoire courte, Guerre éternelle, montre un garçon de la préhistoire découvrant que sa forêt allait être le lieu de batailles récurrentes pendant des siècles, des millénaires même. Je pensais surtout au nord de la France en écrivant ce scénario, et puis à ma région natale, la Lorraine, aussi.

Bien sûr, parmi tous ces combattants, je n’ai pas pu m’empêcher d’inclure des Romains. C’était trop tentant. C’est alors que j’ai eu le déclic : le prochain Alix senator que j’allais écrire devait parler de cette « guerre éternelle » et de ses traces indélébiles. J’ai commencé à me documenter sur la guerre des Gaules et à relire les albums d’Alix classique qui en parlaient. Et je me suis lancée…

Extrait de “Guerre éternelle”, dans le collectif Traces de la Grande Guerre, par l’Atelier virtuel. Éditions de la Gouttière.

Sans Pascal donc, sans ses Traces de la Grande Guerre, il n’y aurait pas eu de Forêt carnivore. Ça mérite bien un très grand merci, sur l’album, comme ici sur mon site.

Alix senator 10 : premières pages

Le tome 10 d’Alix senator, La Forêt carnivore, sera disponible dans toutes les bonnes librairies le 3 juin prochain.

Un petit rappel de l’intrigue ?

Après les terribles événements des Spectres de Rome, notre sénateur préféré a décidé de retourner en Gaule . Il veut retrouver ses racines et renouer avec la famille de son cousin Vanik. Mais il va découvrir que, si tout ou presque a changé depuis la conquête de César, le passé est loin d’être mort. La guerre des Gaules ne sera jamais vraiment terminée tant que des revenants hanteront la forêt d’Alésia.

En attendant tout pouvoir lire, voici les premières pages pour vous mettre définitivement l’eau à la bouche. Comme vous voyez, la première page fonctionne en écho avec la couverture ou plutôt c’est la couverture qui fonctionne comme en écho avec elle, comme si la même scène se reproduisait avec plusieurs dizaines d’années d’écart.

Sortie Alix senator et Jhen

Amis lecteurs, les nouvelles aventures d’ Alix Senator et de Jhen seront disponibles dans votre librairie préférée dès le 3 juin prochain.
Je suis très contente de les voir enfin “exister”, même si j’aurais aimé que les circonstances soient différentes évidemment.

Yuanyuan’s bubbles

Ô joie ! Yuanyuan’s bubbles, l’album que j’ai réalisé avec mes deux complices Steven Dupré et Cyril Saint-Blancat d’après une nouvelle du grand auteur de science-fiction Liu Cixin, est sorti en Chine depuis deux jours.

Il est accompagné de trois autres adaptations notamment celle de The wandering Earth, réalisée par deux experts en grand spectacle : Christophe Bec et Stefano Raffaele.

Ces albums sont édités à Pékin par Citic mais vous pourrez les retrouver aux éditions Delcourt sans doute l’année prochaine.

Merci encore à Corinne Bertrand et à FT Culture qui ont rendu possible cette grande aventure !

La Mort Saint-Innocent

Pour contraster avec les belles déesses d’hier et faire un clin d’œil à ceux d’entre vous qui avaient aimé le transi de René de Chalon, voici la Mort Saint-Innocent.

Cette sympathique statue d’1,20 mètre se trouve actuellement au Musée des monuments français. J’aurais aimé m’en servir dans un prochain Jhen mais elle est trop récente : elle a été sculptée et placée au cimetière des Innocents, le fameux charnier du centre de Paris, vers 1530.

Son auteur est inconnu malheureusement. Le bras levé est de son restaurateur du XIXe siècle. Comme je vous le disais à propos de l’Adam de Notre Dame il y a quelques jours, on n’hésitait pas à l’époque à « inventer » et « modifier » les œuvres qu’on voulait restaurer.

Pour les curieux, une longue inscription donne la parole à la Mort sur le bouclier :

« Il n’est vivant tant soit plein d’art
Ne de force pour resistance
Que je ne frappe de mon dard
Pour bailler aux vers leur pitance
Priez Dieu pour les trepasses »

Les deux visages d’Artémis

Il y a une déesse dont je n’ai pas encore parlé dans Alix senator mais qui le mériterait bien, c’est Diane/Artémis, la déesse gréco-romaine de la chasse, sœur d’Apollon, le dieu sauvage cher à Jacques Martin.

Comme son frère elle a de multiples visages, du plus classique au plus inquiétant.
Ci-dessous, je vous montre l’Artémis grecque telle qu’on se l’imagine : la chasseresse accompagnée d’une biche à la beauté sans défaut.

Statue d’Artémis à la biche, dite Diane de Versailles, peut-être inspirée d’un original grec du IVe siècle av. J.-C. par Léocharès. Œuvre romaine d’époque impériale. Son nom Diane de Versailles lui vient du fait que Louis XIV fait transférer la statue dans le château de Versailles, lieu qu’elle occupera jusqu’à son retour au Louvre en 1798.

Ci-dessous en revanche, on a une autre Artémis, plus orientale et étrange : l’Artémis priée dans le temple d’Éphèse, en Turquie actuelle.

Accompagnée de lions, elle porte sur son vêtement toutes sortes d’animaux qui témoignent de son statut de maîtresse des bêtes sauvages. Parfois on trouve aussi des plantes, des insectes, des animaux fantastiques (griffons, sphinx…)sur ses jambes ainsi que sur le nimbe divin qui entoure sa tête.

Mais le plus étonnant est peut-être le grand nombre de « mamelles » qui ornent sa poitrine. On les interprète souvent plutôt comme des testicules des taureaux qui lui ont été sacrifiés, symboles à la fois de fécondité et de domination de la déesse sur les mâles en tout genre.

Je vous laisse maintenant deviner celle que je préfère. 🙂

Statue de l’Artémis d’Éphèse, premier siècle avant notre ère, musée archéologique d’Éphèse (Turquie)

Interview sur Alix Mag

Les prochains Alix senator et Jhen devaient sortir dans quelques jours. Ce ne sera, bien sûr, pas le cas. mais il en faut plus pour arrêter un passionné comme Stéphane Jacquet.

Vous pouvez donc lire ma nouvelle interview sur La Forêt carnivore et le Conquérant dès aujourd’hui sur le site Alix Mag. C’est par ici : Valérie Mangin, d’Alix senator à Jhen

Fdj : la reine Musa

Si vous êtes lecteur d’ Alix senator, vous commencez à bien connaître Livie, la « douce et tendre » épouse d’Auguste. Mais ce n’est pas la seule forte femme de cette époque. Comme elle, Musa était dotée d’une ambition proportionnelle à son manque de scrupules.

Musa entre dans l’Histoire en 20 avant notre ère comme… cadeau offert au roi parthe Phraatès IV par l’empereur Auguste.

Les deux hommes viennent de conclure un traité de paix qui fixe la frontière de leur sphères d’influence respectives au fleuve Euphrate. De plus, Phraatès a accepté de rendre à Auguste les enseignes prises aux légions de Crassus lors de la bataille de Carrhes, une des pires défaites romaines qui a eu lieu une quarantaine d’années plus tôt.

Cela mérite bien quelques petits cadeaux en retour du chef de l’État romain. Il offre donc des esclaves au roi parthe. Musa, une jeune italique, en fait partie. Elle séduit rapidement son maître et devient son épouse favorite. Sous son emprise, il se met à mener une politique pro-romaine et accepte même d’envoyer ses fils issus d’autres unions en Italie pour qu’ils soient éduqués « à la romaine ».

Cela laisse le champ libre à Musa, ou plutôt « Thea Musa », « déesse Musa », comme elle commence à sa faire appeler. Elle a accouché d’un fils elle aussi et elle a de grandes ambitions.

En 2 av. J.-C., elle fait empoisonner Phraatès devenu inutile et met son fils sur le trône. Elle règne au travers de l’adolescent, mais cela ne lui suffit pas : quelques années plus tard, elle officialise sa prise de pouvoir… en l’épousant.

C’est aller trop loin : ce genre d’inceste royal entre parent et enfant, qui existe en Égypte ou bien chez les Perses, n’est pas du tout accepté par les Parthes. Le conseil des anciens désavoue le nouveau couple. Les grands aristocrates se rallient à Orodès, un parent de l’ancien monarque assassiné Phraatès. Musa et son fils, abandonnés par leurs partisans, doivent prendre la fuite. Ils sont finalement tués à leur tour en 4 apr. J.-C.

Tête de la reine Musa, Ier siècle av. J.-C., Musée national d’Iran (Téhéran).