Femme du jour : Simone de Beauvoir

Née le 9 janvier 1908, Simone de Beauvoir est une des figures les plus connues du féminisme français, même si elle est au centre de beaucoup de controverses.

Elle est issue d’une famille aisée qui connaît de graves difficultés financières pendant son adolescence, au grand désarroi de son père. Elle le décrira plus tard dans Les Mémoires d’une jeune fille rangée : « Quand il déclara : « Vous, mes petites, vous ne vous marierez pas, il faudra travailler », il y avait de l’amertume dans sa voix. Je crus que c’était nous qu’il plaignait ; mais non, dans notre laborieux avenir il lisait sa propre déchéance. »

Devenue adulte, Simone de Beauvoir doit donc travailler. Mais loin de le considérer comme un fardeau dégradant, elle le vit comme une libération et une condition nécessaire à son émancipation personnelle. En 1929, elle et Jean-Paul Sartre qu’elle vient de rencontrer et qui sera toute sa vie son compagnon, se classent aux deux premières places de l’agrégation de philosophie. Simone de Beauvoir enseigne ensuite dans différents lycées.

Portrait de Simone de Beauvoir, ©Le Salon Littérair

En 1943, elle est renvoyée de l’Éducation nationale à la suite d’une plainte pour « excitation de mineure à la débauche » qui aboutira finalement à un non-lieu. Pourtant, il est sûr aujourd’hui qu’elle entretenait bien une liaison avec son élève, de même qu’il lui arrivait de présenter d’autres jeunes filles à Sartre avec qui ils formaient des triangles voire des quatuors amoureux. Elle mentira toute sa vie à ce propos, comme sur bien d’autres relevant de son intimité, provoquant de manière posthume la colère de féministes qui se sentiront trompées par leur icône.

Simone de Beauvoir est réintégrée comme professeure en 1945 mais elle n’enseignera plus jamais. Les années qui suivent, elle fonde la revue Les Temps modernes avec d’autres intellectuels de gauche : Sartre bien sûr mais aussi Raymond Aron, Michel Leiris, Maurice Merleau-Ponty, Boris Vian… Elle consacre aussi son temps à l’écriture de romans et d’essais dans lesquels elle s’engage pour le communisme, l’athéisme ou encore l’existentialisme, tout en voyageant beaucoup. Aux États-Unis, elle rencontre l’écrivain Nelson Algren dont elle tombe amoureuse et à qui elle enverra plus de 300 lettres durant les 15 ans que durera leur relation. Il y mettra fin quand il se rendra compte qu’elle ne quittera jamais Sartre pour lui.

Simone de Bauvoir signant ses livres, © Les Films d’ici

La consécration arrive pour Simone de Beauvoir en 1949 avec la publication du Deuxième sexe, son grand essai féministe. Il se vend à plus de 22 000 exemplaires dès la première semaine et provoque un énorme scandale. L’écrivain chrétien François Mauriac écrit aux Temps modernes : « à présent, je sais tout sur le vagin de votre patronne ». Mais l’ouvrage aura une grande influence sur les écrivaines qui suivront, y compris les théoriciennes américaines de Women’s Lib.

Beauvoir y refuse tout essentialisme/déterminisme. Elle déclare qu’aucune femme n’a de destin tracé dès sa naissance. L’infériorisation du « deuxième sexe » est le fait des hommes (sexistes, lâches et parfois cruels) mais aussi des femmes elles-mêmes (passives, soumises et manquant d’ambition). Pour elle, l’émancipation féminine qui passe par l’accès au monde du travail et le droit à l’avortement, ne peut aboutir que si les deux sexes s’unissent pour y parvenir.

Simone de Bauvoir, Claude Lanzmann, un autre de ses compagnons et Jean-Paul Sartre, le 4 mars 1967 à Gizeh, en Egypte. Photo AFP

Cinq ans plus tard, Simone de Beauvoir reçoit le prix Goncourt pour son roman Les Mandarins qui, sous couvert de personnages imaginaires, évoque sa relation avec Algren.

Elle commence ensuite son autobiographie tout en multipliant les engagements féministes. En 1971, elle rédige le Manifeste des 343 puis fonde avec Gisèle Halimi le mouvement Choisir pour appeler à la légalisation de l’avortement. En 1977, elle participe à la création de la revue Questions féministes, puis en 1981 à Nouvelles questions féministes dont elle sera directrice jusqu’à sa mort en 1986.