L’actualité

Hanoucca

Cette année, la fête juive de Hanoucca avait lieu de la soirée du dimanche 2 décembre à celle d’aujourd’hui, le 10.

Cette célébration commémore la réinauguration de l’autel des offrandes dans le second Temple de Jérusalem vers 165 av. J.-C. Deux ans plus tôt, le roi Antiochus IV, qui dirigeait une grande partie des territoires conquis autrefois en Orient par Alexandre le Grand et appartenait à une dynastie d’origine grecque, avait ordonné la dédicace d’un autel à Zeus dans le Temple.
Mais, depuis 175 av. J.-C. une partie du peuple de Judée était soulevée contre lui à la suite de la famille des Maccabées. C’est cette révolte qui permit finalement la réatribution du Temple au culte juif.

Selon la tradition, pendant la nouvelle consécration, eut lieu le miracle de la fiole d’huile. On raconte que, quand on voulut allumer la menorah – le chandelier à 7 branches – du Temple, on se rendit compte qu’il ne restait plus qu’une seule fiole d’huile qui n’avait pas été profanée, c’est-à-dire de quoi faire briller le candélabre une seule journée. Mais un miracle eut lieu : avec cette huile, les desservants parvinrent à faire briller les lumières 8 jours durant, le temps de refabriquer de l’huile.

La plupart des rituels liés à hanoucca font référence à ce miracle comme l’allumage d’un chandelier à 9 branches ou la consommation de friandises à l’huile d’olive. On joue aussi souvent avec des toupies dont chaque face est marquée d’une lettre hébraïque qui signifieraient « un miracle a eu lieu là-bas ».

Ci-dessous :
– chandelier à 9 branches ©jforum.fr
– beignet de hanoucca ©naomiecook
– Toupies de hanoucca ©toupie-shop.com

 

Publié le Catégories Éphéméride
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Le pain d’épice, une friandise chinoise

Eh oui, ce pain au miel traditionnel de Noël vient de très loin. C’est un lointain descendant du « Mi-kong » chinois, une pâtisserie cuisinée à base de farine de froment, de miel et, bien sûr, d’épices. Son voyage jusqu’à nos contrées occidentales fut aussi violent que sa dégustation est gourmande.

Connu dès le Xe siècle, il est consommé par les guerriers de Gengis Khan qui l’emmènent avec eux jusqu’au Moyen Orient. Là, les chevaliers croisés le découvrent à leur tour et le rapportent en Allemagne vers le XIIe ou le XIIIe siècle.

Il est adopté par les monastères et c’est par leur réseau qu’il se diffuse ensuite partout en Europe. Il arrive en Alsace au plus tard au XVe siècle. En 1476, les boulangers y fondent la corporations des « Meisterlebzelter », « maîtres en pain d’épices ». Aujourd’hui, le pain d’épice est toujours un classique de la gastronomie alsacienne.

Réalisé avec 4 épices : la cannelle, la girofle, le gingembre, l’anis, il est consommé partout en France. Depuis le début du XIXe siècle, c’est même une pâtisserie très populaire. La Foire du Trône parisienne est la descendante directe de la foire au pain d’épices qui s’est tenue là à partir de 1805. Vers 1890, elle comptait près d’un millier de marchands ! A l’époque, le pain d’épice de base était même moins cher que le pain classique. On en faisait déjà de toutes les formes : bonhommes, animaux, saint Nicolas… glacés au sucre ou fourrés à l’orange. Pas étonnant que les frères Grimm ait fait de la maison de la méchante sorcière qui veut manger Hansel et Gretel une maison en pain d’épices.

Photo © marieclaire.fr

Le père Fouettard

Ce sinistre personnage est l’acolyte de saint Nicolas dont je vous ai parlé le 6 décembre. Mais, alors que le saint distribue bonbons et cadeaux, lui distribue plutôt les coups de martinets aux enfants qui n’ont pas été sages pendant l’année.

Plusieurs légendes expliquent sa naissance. Selon l’une d’elles, il serait né à Metz, en Lorraine, en 1552 pendant que l’armée de Charles Quint faisait le siège de la ville. Ses habitants firent un mannequin à l’effigie de l’empereur et le promenèrent dans la ville avant de le brûler.

Depuis, il a essaimé en Belgique, en Suisse, en Allemagne… Il y adopte diverses apparences mais il est toujours sombre, avec une longue barbe, de la fourrure ou des vêtements noirs et bien sûr un fouet ou des branchage pour châtier les « méchants ».

Saint Nicolas et le père Fouettard, version « homme des bois » © herault-tribune.com

Dans certaines régions, c’est un charbonnier ou un ramoneur. Son côté noir est dû à la suie dans laquelle est il est censé vivre constamment. Mais, ailleurs, il tend franchement à la caricature raciste: « Zwarte Piet », sa variante des Pays-Bas a le visage peint en noir et les cheveux crépus. Des personnes de plus en plus nombreuses demandent d’ailleurs sa disparition pour cette raison, ou, pour le moins une franche modernisation de la tradition. Il serait temps d’y penser en effet.

– Zwarte Piet, caricature raciste © oneikathetraveller.com

 


 

Saint Nicolas

Quand j’étais petite fille en Lorraine, le 6 décembre était une des journées que j’attendais le plus dans l’année parce que « saint Nicolas », le saint patron des Lorrains, venait à l’école apporter des bonbons aux enfants sages. Le « père Fouettard » se chargeait en théorie des autres. J’étais dans une école publique et laïque mais la tradition était si fortement ancrée à Nancy que personne n’aurait songé à la supprimer à l’époque. Ça aurait juste eu l’air d’une punition.

Qui était saint Nicolas ?

Historiquement, saint Nicolas était l’évêque de Myre, dans le sud de la Turquie actuelle où il est mort vers 345. On sait peu de choses sur lui. Son principal fait d’arme serait d’avoir participé au grand concile (assemblée d’évêques) de Nicée et d’y avoir combattu l’arianisme, une hérésie qui dit que la nature du Christ est d’abord humaine et non totalement divine comme celle de « Dieu le Père ».

Vol de reliques

Après sa mort, ses reliques furent conservées dans l’église de Myre qui prit son nom jusqu’en 1087. Mais, vers cette époque, l’armée byzantine fut vaincue par les troupes musulmane du sultan voisin. Craignant que les restes du saint ne tombent dans des mains « infidèles » plusieurs villes italiennes décidèrent de les mettre en sûreté… c’est-à-dire de les voler et de les ramener en Italie. Les marins de Bari réussirent à gagner Myre plus rapidement que ceux de Venise et à emporter les précieux ossements. Ils se trouvent toujours dans la basilique San Nicola de Bari. Enfin… sauf une phalange qui aurait été volée aux voleurs par un chevalier lorrain qui l’aurait rapportée à Saint-Nicolas-de-Port.

Basilique San Nicola de Bari, © Francesco9062

Les trois petits enfants

Par la suite, saint Nicolas demeura un saint très populaire à la fois pour l’église orthodoxe et l’église catholique. L’hagiographie (le récit de la vie des saints) regorge d’historiettes qui le mettent en scène.
Celle que je préfère est celle du « saint et des trois petits enfants ». Trois jeunes enfants « qui s’en allaient glaner au champ », c’est-à-dire récupérer les épis de blé qui avaient échapper aux moissonneurs, auraient été capturés par un boucher, tués, découpés en morceaux et mis au saloir, un baquet de sel pour que leur viande se conserve mieux. Le saint qui passait par là les aurait ressuscités et aurait puni le méchant boucher. De là, la tradition qui veut que Nicolas gâte chaque année les enfants.

En fait, ce récit résulte de la déformation d’un autre plus ancien. Trois officiers de l’empereur romain Constantin furent accusés à tort de fomenter un complot et condamnés à mort. A la veille de leur mort, ils tournèrent leurs pensées vers le saint et l’empereur vit celui-ci en rêve. Nicolas lui affirma l’innocence des officiers et réclama leur libération sous peinte d’infliger au monarque un terrible châtiment. Bien sûr, Constantin relâcha les hommes et demanda pardon au saint de ses errements. L’histoire fut souvent représentée ensuite sur les objets vendus en souvenir aux pèlerins de Bari. Mais le saint était représenté bien plus grand que les trois officiers et la tour/prison placée à côté d’eux pouvait facilement passer pour un baquet. D’où l’erreur.

Nicolas de Myre et les trois officiers, vers 1485, église Sainte-Marie de Mühlhausen, en Allemagne ©Friedrichsen.

 

Bayeux by night

Boules de Noël, boules de sorcière

Que serait un sapin sans ses boules ? Dès le XVIe siècle, les sapins de Noël alsaciens étaient décorés de fleurs et de fruits. Je vous ai raconté hier qu’on y accrochait notamment des pommes pour rappeler le fameux arbre du paradis.

Mais vers 1830, on commença à remplacer ces fruits en Allemagne par des boules en verre mercuré ou soufflé : les boules de sorcière. Elles avaient été créées au siècle précédent en Angleterre et étaient censées protéger les maisons des mauvais esprits, des sorcières…
Généralement alors en verre vert ou bleu, elles pouvaient faire jusqu’à une vingtaine de cm de diamètre et on les accrochait à la fenêtre ou… dans un arbre.

« Witch ball » suspendue en Ecosse © Rosser1954

On pensait alors que leurs couleurs vives attiraient le mauvais œil et que leurs reflets le neutralisaient en le renvoyant vers la sorcière qui en était à l’origine. Si on avait de la chance, l’esprit de la jeteuse de sort pouvait même se retrouver piégé dans la boule. Le « pendre » était alors une protection contre toutes les autres créatures malfaisantes. Bref, on obtenait le même résultat qu’en pendant la sorcière elle-même, opération beaucoup plus délicate.

« witch ball », XIXe siècle. © William Ellison

Progressivement, ces boules magiques devinrent des objets de décoration si bien qu’elles survécurent à l’arrêt des chasses aux sorcières. On commença à les accrocher aux sapins de Noël. Elle arrivèrent en France, selon la légende, en 1858, quand la sécheresse priva les Vosges et la Moselle de fruits. Un verrier de Meisenthal commença alors à fabriquer des boules en verre.

On en trouve aujourd’hui dans toutes les matières mais Meisenthal continue de produire ses décorations en verre. En 2014, la fabrique devenue le Centre international d’art verrier a encore vendu plus de 35 000 boules de Noël.

Boule Fizz de Meisenthal, créé en 2016

Le Sapin de Noël

Il s’agit d’une des traditions les plus vivaces qui entourent Noël (et ma préférée aussi).

Le sapin de Noël tire son origine de l’habitude de nombreux peuples de l’Antiquité de décorer leurs maisons aux alentours du solstice d’hiver (21 décembre) de branches à feuillage persistant, symbole de renaissance. A Rome, pendant les Saturnales, on suspendait du laurier, du buis ou de l’olivier chez soi et on laissait brûler constamment des lampes pour éloigner les esprits malins.

Un sapin de Noël chez Oscar Andersen en Norvège entre 1911 et 1926.

Mais, si on en croit la tradition catholique, le sapin de Noël tel que nous le connaissons serait apparu à la fin du VIe siècle en Gaule. Pendant une veillée de Noël, saint Colomban aurait emmené les moines du monastère de Luxeuil (Haute-Saône actuelle) jusqu’au sommet de la montagne voisine où se trouvait un vieux sapin encore adoré par les païens de la région. Les religieux accrochèrent leurs lanternes à ses branches et dessinèrent une croix lumineuse à son faîte avec leurs torches. Les paysans les virent de loin et accoururent voir ce spectacle inédit. Le saint en profita, bien sûr, pour les convertir. On ne se refait pas.

Une autre légende raconte que saint Boniface de Mayence, l’« apôtre des Germains », après avoir abattu le chêne de Thor adoré dans la région de Hesse, se servit de la forme triangulaire d’un sapin pour expliquer la Trinité divine aux peuples locaux. Il opposait aussi le sapin, arbre de l’Enfant Jésus, au pommier dont Adam et Eve mangèrent les fruits et qui causa leur chute. Bon, saint Boniface eut beau être très créatif en matière de symbole, il ne convainquit pas tout le monde : il fut massacré avec ses compagnons en Frise en 754.

le sapin de Noël qui décore le parvis de Notre Dame à Paris en 2018 © https://www.paristribune.info/

Plus tard au Moyen-Âge, les symboles du sapin et du pommier se sont rejoints plutôt que s’opposer. Dans les mystères, c’est un sapin, orné de pommes rouges – le fruit défendu -, qui sert à représenter l’arbre du Paradis pendant l’hiver. Dès le XVe siècle, cet « arbre du Paradis » est installé aussi aux sièges des corporations, à l’entrée des hôpitaux… dans les pays germaniques.

En 1492, l’Œuvre Notre-Dame, chargée de l’entretien de la cathédrale de Strasbourg installe un sapin dans chaque paroisse de la ville. A la même époque, toujours en Alsace, les particuliers commencent à orner leurs maisons de branches de sapin (enfin, c’est de cette époque que datent les premiers témoignages de cette pratique). Au XVIIe siècle, on passe au sapin entier. Après la guerre de 1870 et l’abandon de l’Alsace à l’Allemagne, de nombreux habitants de la région choisissent de venir vivre en France et importent avec eux la tradition du sapin de Noël.

Elle se retrouve un peu partout aujourd’hui. En 2014, plus de 5,7 millions de sapins naturels et 1 million de sapins artificiels ont ainsi été achetés dans notre pays.

« Tree » de Paul Mac Carthy installé sur la place Vendôme à Paris en 2014. Exposée dans le cadre de la programmation Hors les murs de la FIAC, cette œuvre fit scandale. Certains y voyant un sapin de Noël et d’autres un sex-toy. ©Jacques Brinon/SIPA

 

 

Les très riches Heures du duc de Berry : décembre

Voici la représentation du mois de décembre dans le livre liturgique de Jean de Berry, ce grand aristocrate de la fin du Moyen-Âge, fils du roi de France, Jean II le Bon.

Le duc aimaient beaucoup l’architecture. Il fit réparer ou agrandir un grand nombre de châteaux. Dans son fief, il fit reconstruire le palais ducal et bâtir la saint-Chapelle de Bourges sur le modèle de celle de Paris. Il ne faut donc pas s’étonner si de nombreux bâtiments figurent dans son livre d’heures. Ici, pour décembre, on aperçoit le donjon et les tours du château de Vincennes où le duc était né en 1340.

Ils sont à moitié dissimulés par des arbres au feuillage encore quasiment automnal et une scène de curée qui évoque elle aussi plutôt l’automne que l’hiver. Que cette illustration ait été réalisée par les frères Limbourg vers 1410 ou par leur continuateur des années 1440, l’auteur a fait preuve d’originalité. Dans les autres calendriers médiévaux, on représente plus volontiers l’abattage du cochon qui nourrira ses propriétaires pendant la saison morte et annonce la fête et le repas de Noël. La neige, en revanche, est un motif très rare à l’époque. Elle n’est présente que pour le mois de février et… c’est une des toutes premières fois si ce n’est la toute première fois dans une peinture médiévale !

©Photo. R.M.N. / R.-G. Ojéda

Dans les très riches Heures, vous pouvez découvrir aussi :

les autres mois : janvier, février, mars, avril, mai, juillet, août, septembre, octobre, novembre , décembre

une fête chrétienne illustrée dans le livre : l’Ascension

un étonnant “homme zodiacal”

Le violet : de la tristesse au féminisme

Il n’y a pas que les « gilets jaunes » qui défilaient hier : il y avait aussi le mouvement #NousToutes qui protestait contre les violences faites aux femmes. Il a choisi comme couleur le violet et, bien sûr, ce n’est pas un hasard.

A l’origine, pourtant, on en est loin. En Occident, le violet est d’abord la couleur de la tristesse et de la pénitence. Les rois de France portent le deuil en violet et non en noir. De son côté, le clergé catholique porte une tenue liturgique violette pendant toutes les périodes de jeûne comme le Carême, et les confréries de pénitents arborent souvent un manteau violet. Il faut dire qu’au Moyen-Âge, on voyait cette couleur comme un noir atténué, un « subniger » en latin.
Au XIXe siècle, l’idée demeure avec les peintres symbolistes et impressionnistes pour qui le violet exprime entre autres la lumière du soir, la lumière « qui meurt ».

Pourtant, à cette époque, le violet commence à prendre une autre connotation : il est repris par les mouvements suffragettes qui réclament le droit de vote pour les femmes. Mélange du bleu des garçons et du rose des filles, il se veut alors un symbole d’égalité. Après mai 68, cette couleur revint en force toujours dans les mouvements féministes. Elle est toujours présente depuis.

Jusqu’à présent je n’ai parlé sur ce site que d’une autre couleur… le jaune. Pour retrouver le petit article, c’est par ici : le jaune, symbolique d’une couleur