Alix senator 10 : prêt pour l’impression !

Aujourd’hui passion cromalins.
Tout va bien : il n’y a “pas de souci sur les fichiers”.

Femme du jour : Simone de Beauvoir

Née le 9 janvier 1908, Simone de Beauvoir est une des figures les plus connues du féminisme français, même si elle est au centre de beaucoup de controverses.

Elle est issue d’une famille aisée qui connaît de graves difficultés financières pendant son adolescence, au grand désarroi de son père. Elle le décrira plus tard dans Les Mémoires d’une jeune fille rangée : « Quand il déclara : « Vous, mes petites, vous ne vous marierez pas, il faudra travailler », il y avait de l’amertume dans sa voix. Je crus que c’était nous qu’il plaignait ; mais non, dans notre laborieux avenir il lisait sa propre déchéance. »

Devenue adulte, Simone de Beauvoir doit donc travailler. Mais loin de le considérer comme un fardeau dégradant, elle le vit comme une libération et une condition nécessaire à son émancipation personnelle. En 1929, elle et Jean-Paul Sartre qu’elle vient de rencontrer et qui sera toute sa vie son compagnon, se classent aux deux premières places de l’agrégation de philosophie. Simone de Beauvoir enseigne ensuite dans différents lycées.

Portrait de Simone de Beauvoir, ©Le Salon Littérair

En 1943, elle est renvoyée de l’Éducation nationale à la suite d’une plainte pour « excitation de mineure à la débauche » qui aboutira finalement à un non-lieu. Pourtant, il est sûr aujourd’hui qu’elle entretenait bien une liaison avec son élève, de même qu’il lui arrivait de présenter d’autres jeunes filles à Sartre avec qui ils formaient des triangles voire des quatuors amoureux. Elle mentira toute sa vie à ce propos, comme sur bien d’autres relevant de son intimité, provoquant de manière posthume la colère de féministes qui se sentiront trompées par leur icône.

Simone de Beauvoir est réintégrée comme professeure en 1945 mais elle n’enseignera plus jamais. Les années qui suivent, elle fonde la revue Les Temps modernes avec d’autres intellectuels de gauche : Sartre bien sûr mais aussi Raymond Aron, Michel Leiris, Maurice Merleau-Ponty, Boris Vian… Elle consacre aussi son temps à l’écriture de romans et d’essais dans lesquels elle s’engage pour le communisme, l’athéisme ou encore l’existentialisme, tout en voyageant beaucoup. Aux États-Unis, elle rencontre l’écrivain Nelson Algren dont elle tombe amoureuse et à qui elle enverra plus de 300 lettres durant les 15 ans que durera leur relation. Il y mettra fin quand il se rendra compte qu’elle ne quittera jamais Sartre pour lui.

Simone de Bauvoir signant ses livres, © Les Films d’ici

La consécration arrive pour Simone de Beauvoir en 1949 avec la publication du Deuxième sexe, son grand essai féministe. Il se vend à plus de 22 000 exemplaires dès la première semaine et provoque un énorme scandale. L’écrivain chrétien François Mauriac écrit aux Temps modernes : « à présent, je sais tout sur le vagin de votre patronne ». Mais l’ouvrage aura une grande influence sur les écrivaines qui suivront, y compris les théoriciennes américaines de Women’s Lib.

Beauvoir y refuse tout essentialisme/déterminisme. Elle déclare qu’aucune femme n’a de destin tracé dès sa naissance. L’infériorisation du « deuxième sexe » est le fait des hommes (sexistes, lâches et parfois cruels) mais aussi des femmes elles-mêmes (passives, soumises et manquant d’ambition). Pour elle, l’émancipation féminine qui passe par l’accès au monde du travail et le droit à l’avortement, ne peut aboutir que si les deux sexes s’unissent pour y parvenir.

Simone de Bauvoir, Claude Lanzmann, un autre de ses compagnons et Jean-Paul Sartre, le 4 mars 1967 à Gizeh, en Egypte. Photo AFP

Cinq ans plus tard, Simone de Beauvoir reçoit le prix Goncourt pour son roman Les Mandarins qui, sous couvert de personnages imaginaires, évoque sa relation avec Algren.

Elle commence ensuite son autobiographie tout en multipliant les engagements féministes. En 1971, elle rédige le Manifeste des 343 puis fonde avec Gisèle Halimi le mouvement Choisir pour appeler à la légalisation de l’avortement. En 1977, elle participe à la création de la revue Questions féministes, puis en 1981 à Nouvelles questions féministes dont elle sera directrice jusqu’à sa mort en 1986.

Femme du jour : Fanny Bullock Workman

Fanny Bullock fut pendant longtemps la « femme la plus haute du monde ». Alpiniste, exploratrice, cartographe mais aussi écrivaine et féministe convaincue, elle établit plusieurs records d’altitude féminins avant d’écrire huit livres sur ses voyages et de devenir la première Américaine à donner des conférences à la Sorbonne et la seconde à la Royal Geographical Society.

Née le 8 janvier 1859 dans une famille américaine aisée, elle épousa William Hunter Workman et préféra parcourir le monde avec lui plutôt que s’occuper de leurs deux enfants laissés aux bons soins de nurses puis d’écoles privées. Ils commencèrent par effectuer des circuits à vélo en Suisse, en France, en Italie, en Espagne, puis en Algérie et en Inde.

Fanny Bullock Workman et son mari avant 1911

Au terme de ce dernier voyage, ils décidèrent de partir pour l’Himalaya plutôt que de retourner aux États-Unis. Tombés amoureux à la fois de la montagne et de l’alpinisme, ils y retournèrent 8 fois pendant les 14 années suivantes. Bien que dépourvus de matériel d’escalade performant, ils atteignirent plusieurs hauts sommets et explorèrent des glaciers encore inconnus avant leur arrivée. Le record de Fanny fut le sommet du Pinnacle Peak (7000 m) dans le massif du Nun Kun, en Inde.

Dans les récits qu’elle fit plus tard avec William de leurs expéditions, elle accorda toujours une grande attention aux modes de vie des femmes et à leurs difficultés. Aux États-Unis, elle militait d’ailleurs pour le droit de vote des femmes. Malheureusement, elle n’accorda pas le même regard positif aux « indigènes » qu’elle employa avec son mari pendant ses ascensions. Leurs relations avec eux furent chaotiques et marqués par une certaine incompréhension teintée du paternalisme caractéristique du XIXe siècle.

Fanny Bullock Workman dans l’Himalaya vers 1900

Femme du jour : Elena Ceausescu

Vous avez peut-être entendu parler d’Elena Ceausescu récemment, à l’occasion du trentième anniversaire de la chute des régimes communistes d’Europe de l’Est. Elle était l’épouse et le principal soutien politique de Nicolae Ceausescu, le président de la république socialiste de Roumanie de 1967 à décembre 1989, un grand admirateur de la Corée du Nord et grand adepte du culte de la personnalité. Mais, plus qu’une femme de dictateur, Elena était aussi un fameux escroc.

Aux côtés de son mari, elle connut une ascension politique fulgurante et devint même sa vice-première ministre en 1987. Née Lenuta Petrescu le 7 janvier 1916 à Petresti, en Roumanie, elle entra au Parti communiste en 1937, dix ans avant d’épouser Nicolae. Ce mariage fut l’occasion pour elle de falsifier son certificat de naissance : elle se rajeunit de trois ans et changea son prénom de Lenuta (« petite Hélène » en roumain) en Elena, à la connotation moins affective.

Ce ne furent que les premières d’une longue suite de falsifications et d’usurpations en tout genre. Très peu instruite, simple assistante de laboratoire à l’origine, elle fit tout pour se faire passer pour une scientifique de niveau international. Elle accapara la direction générale de l’Institut de recherches chimiques roumain et devint membre de l’Académie des sciences.

Les savants qui acceptèrent de valider son statut, d’écrire les articles qu’elle signait par exemple, firent une magnifique carrière. Les autres, ceux qui avaient refusé d’entrer dans son jeu tels le professeur Cristofor I. Simionescu qui avait refusé de valider sa thèse en chimie, furent écartés des postes prestigieux, voire limogés et emprisonnés. Cela n’empêcha pas de grandes universités étrangères de décerner des diplômes honorifiques à Elena, leurs gouvernements tenant à maintenir de bons rapports avec la Roumanie.

Mais l’illusion prit fin en 1989 quand le Bloc de l’est s’effondra. La dictature des Ceausescu, qui plongea leur pays dans une terrible misère, finit dans un bain de sang. Elena et son mari furent fusillés après une procédure judiciaire expéditive du même type que celle qu’ils réservaient à leurs malheureux opposants.

[ Edit : Une lectrice me fait remarquer à juste titre qu’il y avait beaucoup d’autres choses à dire sur les Ceaucescu. Effectivement, il y a énormément à dire sur leur dictature. Trop pour un simple post FB. Même en en restant à leur catastrophique politique nataliste (interdiction de l’avortement, impôts frappant les couples sans enfants, durcissement des conditions de divorce…) et aux drames qu’elle a engendrés (tout le monde se souvient des terribles images des orphelinats roumains) c’est trop. C’est un vrai dossier documenté qu’il faudrait ou un roman graphique. C’est pourquoi j’ai préféré m’en tenir ici à quelques anecdotes illustrant la personnalité d’Elena et surtout le fait que le régime reposait alors sur le mensonge, le culte de la personnalité, l’intimidation (voire pire) et que les pays étrangers étaient très complaisants envers ces travers. ]

Elena et Nicolae Ceausescu à la dernière convention du Parti communiste roumain en novembre 1989. © Associated Pres

Femme du jour : Jeanne d’Arc

Après Cléopâtre, la femme la plus célèbre de l’Antiquité, voici Jeanne d’Arc, peut-être une des plus fameuses du Moyen-Âge. Elle serait née vers 1412 en Lorraine durant la nuit des rois, c’est-à-dire la nuit du 6 janvier pendant laquelle les Chrétiens commémorent, l’Épiphanie, la visite des rois mages au Christ à peine né. Mais cette date éminemment symbolique a sans doute été inventée pour ajouter du merveilleux à sa biographie qui n’en manquait déjà pas.

En 1429, elle qui est d’origine paysanne parvient à rencontrer le roi Charles VII et à le convaincre de sa mission sacrée. Ses « voix », les saints Michel, Marguerite d’Antioche et Catherine d’Alexandrie lui auraient demandé de libérer la France des Anglais. On est alors en pleine guerre de 100 ans et une grande partie du royaume des Capétiens est occupé par les troupes venues d’outre-Manche.

– Seule représentation contemporaine connue de Jeanne d’Arc, esquissée en marge d’un registre par Clément de Fauquembergue, greffier du parlement de Paris, le 10 mai 1429. N’ayant jamais vu la Pucelle, le greffier la dessine par ouï-dire. Archives nationales, Registre du Parlement de Paris.

Jeanne, mise à la tête de l’armée française, parvient à libérer la ville d’Orléans et surtout à dégager un couloir jusqu’à Reims pour que Charles VII aille s’y faire sacrer.

Mais dès l’année suivante, sa chance abandonne Jeanne : elle est capturée par les Bourguignons alliés des Anglais à Compiègne et vendue à ceux-ci par Jean de Luxembourg. Jugée à Rouen pour hérésie par le fameux Pierre Cauchon, évêque de Beauvais, elle est condamnée et brûlée vive le 30 mai 1431.

– Jeanne d’Arc à cheval. Enluminure du manuscrit d’Antoine Dufour, Les vies des femmes célèbres, Nantes, musée Dobrée, 1504.

Mais si son histoire s’arrête-là, son mythe ne fait que commencer. Il explose littéralement au XIXe siècle. Jeanne est alors récupérée par les partis de gauche comme de droite qui voient en elle une fille du peuple brûlée par l’Église et abandonnée par le roi ou bien une sainte héroïne défendant la patrie. Au carrefour des deux, le grand historien Michelet en fait une « sainte laïque ».

– Jeanne d’Arc au sacre du roi Charles VII, dans la cathédrale de Reims, huile sur toile de Dominique Ingres, Paris, musée du Louvre, 1854.

Mais, au final, c’est la droite nationaliste qui sort victorieuse de la querelle autour de la symbolique johannique. Jusqu’à récemment, elle a même tenté de la monopoliser, comme en témoigne l’importance de la fête de Jeanne d’Arc orchestrée par le Front national chaque 1er mai entre 1988 et 2015.

– Jeanne d’Arc, statue en pied, en armure, de Prosper d’Épinay, cathédrale Notre-Dame de Reims. © Eric Pouhier.

Femme du jour : Cléopâtre VII

Cléopâtre a beau être sans doute la femme le plus célèbre de l’Antiquité, on ignore sa date de naissance exacte. On sait juste qu’elle vient au monde pendant l’hiver 69 ou 68 avant notre ère. D’origine grecque – sa dynastie descend d’un général d’Alexandre le Grand qui s’est emparé de l’Égypte à la mort du conquérant, elle tente toute sa vie de renouer avec les traditions anciennes de son royaume et surtout de lui rendre sa grandeur passée.

Statue de la reine Cléopâtre VII, seconde moitié du Ier siècle av. J.-C., Musée de l’Ermitage, Saint-Pétersbourg.
Ce n’est pas facile : elle hérite d’une Égypte en proie aux révoltes populaires, à des famines récurrentes et déjà sous la mainmise des Romains. Son règne commence d’ailleurs par une guerre contre son propre frère et époux, à laquelle seule l’arrivée de César met un terme en sa faveur. Si Cléopâtre parvient à séduire le général par son ingéniosité et son charisme, et peut-être à le convaincre de ne pas purement et simplement annexer l’Égypte, elle échoue à sortir son royaume de la tutelle italienne.
Cléopâtre et César par Jean-Léon Gérôme, 1866.
Elle a plus de réussite ensuite avec Marc Antoine. Venu vivre avec elle à Alexandrie, il semble prêt à constituer pour leurs enfants un grand royaume oriental fort et indépendant. Mais c’est compter sans le jeune Octave qui ne veut surtout pas laisser son rival devenir aussi puissant. La guerre, inévitable, se dénoue par la bataille d’Actium où Antoine et Cléopâtre sont vaincus. Leur adversaire prend Alexandrie l’année suivante. Les amants savent que tout est fini et se suicident l’un après l’autre en août 30 av. J.-C. C’est la fin de l’Égypte indépendante.
Marc Antoine et Cléopâtre, interprétés par Richard Burton et Elizabeth Taylor dans Cléopâtre de Joseph L. Mankiewicz en 1963
 
Cléopâtre a finalement échoué mais elle est entrée dans la légende. Légende noire d’abord, celle des poètes et des historiens romains qui, à la suite d’Octave devenu Auguste, ne verront en elle qu’une « putain » dangereuse pour la « virtus », la virilité des hommes romains, et une « reine » s’en prenant directement aux idéaux républicains – ce qui est assez amusant quand on sait ce que fera Auguste de la République romaine. Légende dorée ensuite des romanciers et des cinéastes qui en feront une héroïne aussi fastueuse que tragique qui fascine encore aujourd’hui.
Stèle figurant Cléopâtre VII faisant offrande à Isis, Musée du Louvre.

Femme du jour : Karine Ruby

La plupart d’entre vous ne connaissent sans doute pas le nom de cette jeune femme au destin tragique. Pourtant, c’est une des plus grandes sportives françaises de la décennie 2000-2010. Il faut dire que son domaine de prédilection, le snowboard, est peu médiatisé et que le sport féminin en général ne l’est guère plus, même si cela a tendance à s’arranger. Il a représenté entre 16 et 20 % du volume horaire de diffusion de retransmissions sportives en 2016, contre 14 % en 2014 et 7 % en 2012, selon le CSA.

Mais revenons à Karine Ruby. Elle est née le 4 janvier 1978 en Haute-Savoie et, surtout, a remporté le slalom géant en snowboard aux Jeux olympiques de Nagano en 1998 avant de finir deuxième lors des Jeux suivants à Salt Lake City.

Elle a aussi gagné 6 médailles d’or et 4 d’argent aux championnats du monde de snowboard en slalom parallèle, slalom géant et cross entre 1996 et 2005 ainsi que 67 victoires en Coupe du monde et 19 globes de cristal (trophée donné à la gagnante du classement général de cette même Coupe du monde).

Mais les carrières sportives sont souvent très courtes : Karine Ruby dut se retirer des compétitions dès 2006 après s’être blessée au genou en 2004 et avoir enduré une double fracture des vertèbres dorsales en 2005.

Elle devint ensuite guide de haute-montagne dans le massif du Mont-Blanc. Mais sa passion pour la montagne finit malheureusement par lui couter la vie. Le 29 mai 2009, à seulement 31 ans, elle chuta avec deux autres alpinistes d’une vingtaine de mètres dans une crevasse du Glacier du géant.

Photo © Le Monde/AP/PeterDejong

Femme du jour : Sylvia Likens

J’ai un peu hésité avant de vous raconter cette terrible histoire aujourd’hui car il s’agit vraiment du « pire crime commis dans l’État d’Indiana », comme le qualifient les journaux de l’époque.

C’est le 26 octobre 1965 que la police d’Indianapolis découvre le corps torturé de la jeune Sylvia Likens, née le 3 janvier 1949, chez la femme chargée de veiller sur elle, Gertrude Baniszewski.

Effondrée celle-ci montre aux enquêteurs un mot écrit par Sylvia juste avant sa mort à l’attention de ses parents. Elle dit avoir accepté de coucher avec tout un groupe de garçons en échange d’argent mais l’affaire a dégénéré. Ils l’ont brûlée, battue, torturée. Les hommes, horrifiés, s’empressent de partir à la recherche des bourreaux de Sylvia… mais juste avant qu’ils ne quittent la maison, Jenny, la sœur de la victime, a le temps de leur chuchoter à l’oreille : « Sortez-moi d’ici et je vous dirai tout »

Son récit est encore plus glaçant que celui fait par Sylvia dans sa lettre. La malheureuse n’a pas été victime d’une bande de jeunes hommes mais de Gertrude, des enfants de celle-ci et plusieurs autres adolescents du quartier !

Tout commence trois mois plus tôt quand les parents de Sylvia et de Jenny, des forains, décident de repartir sur les routes en laissant leurs filles à Indianapolis, la ville où elles ont toujours vécu et ont tous leurs amis. C’est d’autant plus facile que Gertrude Baniszewski, la mère d’une de ces amies, Paula, est prête à les accueillir contre 20 $ par semaine. Au départ tout se passe bien. Mais un paiement arrive en retard, puis un autre…

Gertrude commence alors à battre les deux filles. Plus qu’après Jenny, c’est après Sylvia qu’elle en a. On ne saura jamais vraiment pourquoi. En tout cas, les mauvais traitements ne s’arrêtent plus. Pire, Gertrude y associe très vite ses enfants dont la fameuse Paula. Pour se justifier, elles n’hésitent pas à accuser Sylvia de méfaits imaginaires : elle a volé des bonbons ou un costume de gymnastique, elle a humilié Gertrude en admettant en public avoir déjà eu un petit ami. Pire elle a accusé Paula et Stéphanie, une autre fille de Gertrude, de se prostituer alors que, « bien sûr » c’est elle, Sylvia, qui se prostitue. Pour tout cela, elle doit être punie. Elle est battue, humiliée, brûlée à la cigarette. On lui grave même sur le ventre « Je suis une prostituée et j’en suis fière ». Et je vous dispense de lire le reste.

Enfermée au sous-sol, la malheureuse dépérit progressivement. Elle tente bien de s’échapper après avoir entendu Gertrude et ses enfants parler de l’abandonner dans les bois pour l’y laisser mourir, mais elle est rattrapée à la porte d’entrée. Aux mauvais traitements qui continuent s’ajoute alors la privation presque totale de nourriture. À peine trois mois après son arrivée dans la maison, Sylvia est à bout. Gertrude n’a plus qu’à la forcer à écrire la fameuse lettre qui confirmera à quel point elle était « une mauvaise fille, une prostituée » et donnera une explication plausible de sa mort.

Ci-dessous : Sylvia Likens, Gertrude Baniszewski et la maison où tout se déroula.

Le procès de la famille Baniszewski et de ses complices a lieu quelques mois plus tard. Gertrude plaide l’aliénation mentale. Elle échappe à la peine de mort mais est condamnée à perpétuité en mai 1966. Elle obtiendra la liberté conditionnelle 29 ans plus tard. Ses complices écopent également de peines de prison, notamment Paula (qui, pour l’anecdote, est enceinte d’un homme marié au moment du procès). Condamnée aussi à vie, elle verra sa peine commuée ensuite et sortira en 1972.

L’affaire fera couler beaucoup d’encre aux États-Unis, d’autant plus qu’on est à une époque où le féminisme cherche particulièrement à s’affirmer. En 1979, Kate Millett écrit ainsi un livre sur cette sinistre histoire : The Basement: Meditations on a Human Sacrifice. Pour elle, en résumant très vite, le meurtre de Sylvia Likens est le symbole de toute l’histoire de la répression des femmes, comme si Gertrude avait voulu apprendre à sa victime ce que c’était vraiment qu’en être une.

 

Femme du jour : Kane Tanaka

Née au Japon le 2 janvier 1903,  l’année où Marie Curie remporta le prix Nobel de physique avec son mari et Antoine Becquerel, Kane Tanaka est à 117 ans l’actuelle doyenne de l’humanité enregistrée par le Guinness des records.

Elle s’est mariée en 1922 (!) et a eu quatre enfants avant d’en adopter un cinquième et vit actuellement en maison de retraite.

Sa longévité, pour être exceptionnelle, fait néanmoins écho à celle d’autres Japonais comme sa prédécesseuse : Chiyo Miyako, morte à l’âge de 117 ans et 81 jours. Il faudra néanmoins à Kane Tanaka patienter encore un peu avant de battre le record de Jeanne Calment : 122 ans et 164 jours.

Photo : @GWRPRESS

Femme du jour : Jeanne Lanvin

Je lisais il y a quelques temps un (très bon) livre sur un peuple de l’Antiquité quand je me suis aperçue que sur ses 300 pages, il n’en consacrait que… 5 aux femmes, dans le chapitre « Vie privée ». Bon avant de s’énerver, il y a des raisons objectives expliquant cette sous-représentation, à commencer par l’absence relative des sources. On ne peut pas demander aux historiens d’inventer pour combler l’absence d’intérêt des Anciens pour la question féminine. Mais cela ne nous empêche pas aujourd’hui d’évoquer cette question car on sait quand même beaucoup de choses. Et dans ce cas précis, je suis sûre que l’historien aurait pu faire un peu plus d’efforts.

En tout cas, cela m’a donné envie de vous parler davantage des femmes du passé en me servant de mon petit éphéméride Facebook. Je compte donc essayer d’évoquer chaque jour (enfin presque) une femme ou un personnage féminin dont c’est l’anniversaire sur ce mur. Je vais essayer aussi de prendre les profils les plus variés possible : artistes, reines, scientifiques, criminelles, saintes, déesses, héroïnes romanesques, figures symboliques, femmes politiques, écrivaines, sportives… pour montrer toute la diversité des vies et des destins féminins. Bien sûr, il faudra faire des choix et il y aura forcément des oubliées. Ce sera aussi parfois très court, parfois très long… selon mes envies. Toutes ces femmes n’en sortiront pas obligatoirement grandies. Et, pour repousser un peu les limites de cet exercice (ne parler que des personnes célèbres, c’est ne pas parler de 99,99% des femmes), je compte bien en profiter pour évoquer un peu aussi de la société tournant autour de mes héroïnes.

Robe scintillante créée par Jeanne Lanvin en 1939

Pour commencer, voici Jeanne Lanvin (1er janvier 1867 – 6 juillet 1946), fondatrice de la plus vieille maison de couture encore en activité actuellement. Avec Gabrielle Chanel, Elsa Schiapelli ou Jeanne Paquin, elle fait partie d’une génération de femmes qui marque durablement la haute-couture française.

Née dans une famille de 11 enfants, elle doit commencer à travailler à 13 ans comme livreuse de chapeau pour une boutique du Faubourg-Saint-Honoré avant de devenir apprêteuse puis garnisseuse. Mais, dès 1885, elle a la chance de pouvoir ouvrir sa propre boutique grâce à une pièce d’or donnée par une cliente et un crédit accordé par ses futurs fournisseurs.
Une dizaine d’années plus tard, sa première collection de vêtements pour enfant inspirée par sa fille l’a fait remarquer de toute la critique. La légende dit que son goût pour la couture de vêtements lui vient de son regret de n’avoir jamais eu de poupée (et donc de ne jamais pouvoir les habiller) quand elle était petite. En tout cas, le succès est tel qu’elle peut lancer une collection « femme » en 1909.

Sa maison se développe ensuite dans toutes les directions dans les années 20. Elle se lance dans la décoration, les parfums, les vêtements pour homme… C’est son heure de gloire. Sa maison restera prospère ensuite jusqu’à sa mort en 1946 et même au-delà.

Détail amusant pour mes amis coloristes : Jeanne Lanvin crée elle-même plusieurs couleurs dont elle garde l’exclusivité en fondant ses propres ateliers de peinture en 1923 : le bleu Lanvin, le rose Polignac, le vert Vélasquez…

Portrait Jeanne Lanvin (1925), par Clémentine-Hélène Dufau, Paris, musée des arts décoratifs.