Les Très riches Heures : Août

Voici le folio du mois d’août des Très riches Heures du duc de Berry. Comme je vous l’expliquais le 1er juillet, ce livre d’heures contient un calendrier avec tous les rites chrétiens annuels. Commandé par Jean de Berry (1340 – 1416), il ne fut terminé qu’après sa mort vers 1485-86.

La page dédiée à août montre à l’arrière-plan le château d’Étampes (Essonne) dont le donjon ou tour de Guinette est toujours debout de nos jours. Le duc de Berry l’acheta à la mort du comte d’Etampes et l’offrit au mari de sa petite-fille. Une interprétation fait donc des personnages nobles du premier plan le duc et ses petits-enfants. Mais cette identification est très discutée.

Derrière ces figures aristocratiques, on voit des paysans se livrant aux travaux des champs ou se baignant dans une rivière. Leur nudité est parfois interprétée comme une manière de les montrer comme des êtres vulgaires et grossiers. On aurait alors une opposition claire entre les nobles et les paysans qui serait un reflet de l’idéologie du commanditaire du livre d’heure. Jean de Berry idéaliserait les aristocrates mais mépriserait les paysans.

©Photo. R.M.N. / R.-G. Ojéda

Dans les très riches Heures, vous pouvez découvrir aussi :

les autres mois : janvier, février, mars, avril, mai, juillet, août, septembre, octobre, novembre , décembre

une fête chrétienne illustrée dans le livre : l’Ascension

Un étonnant “homme zodiacal”

Paris-Brest-Paris

Aujourd’hui le tour de France arrive sur les Champs Élysées mais j’avoue que, quand on me parle de vélo, je pense surtout… pâtisserie.

Plus exactement, je pense au Paris-Brest, ce délicieux gâteau à la crème pralinée en forme de roue de vélo. Ce n’est pas une coïncidence. En 1910, Louis Durand, pâtissier à Maisons-Laffite, créa le Paris-Brest en hommage à la course cycliste Paris-Brest-Paris.

Longue de 1 200 km, elle se déroula de 1891 à 1951. La première année vit l’apparition du pneumatique démontable pour vélo. le vainqueur Charles Terront roula sans dormir pendant 71h22, laissant le second à plus de 8 heures derrière lui et le dernier à plusieurs jours.
C’était une autre époque.

André Geerts

Il y a huit ans, nous quittait un auteur pour qui j’ai toujours une particulière affection : André Geerts.

D’abord auteur de dessins humoristiques, il publie dans divers journaux ainsi que dans le magazine Spirou. Pour lui, André réalise aussi des histoires complètes.
Puis, en 1983, il crée la série à laquelle il va se consacrer ensuite presque totalement: Jojo. Toute en poésie et en tendresse, elle connaîtra 18 albums avant de s’éteindre avec son créateur en 2010.
Denis et moi avons eu la chance de le fréquenter longuement quand nous habitions Bruxelles. J’avais même failli à l’époque travailler avec lui et Christophe Bec, un autre fan, sur un nouveau Jojo.
Aujourd’hui, la gentillesse et la présence toujours attentive d’André continuent de me manquer.

 

 

1346 : Caen tombe au début de la Guerre de 100 ans

Le 26 juillet 1346, a lieu un des événements marquants le début de la guerre de 100 ans entre la France et l’Angleterre : le siège de Caen.

Débarqué le 12 juillet à Saint-Vaast-la-Hougue, à la pointe du Cotentin, le roi Edouard III d’Angleterre est à la tête de 40 000 hommes d’armes. Après avoir conduit une chevauchée meurtrière de deux semaines en Normandie, il met le siège devant Caen. Son fils, le Prince Noir, prend l’abbaye aux Dames tandis que d’autres capitaines prennent l’abbaye aux Hommes (les deux grandes abbayes fondées par Guillaume le Conquérant) et s’installent dans les faubourgs de la ville.
En face, la garnison française ne compte même pas 5 000 hommes dont moins de 1 000 hommes d’armes. De plus, Raoul de Brienne, qui défend la ville, n’est pas d’accord avec les bourgeois sur la stratégie à adopter. Malgré ça, la résistance de la ville est acharnée. Toute la population participe farouchement à sa défense.

Le soir venu, seul le château de Caen (défendu, pour l’anecdote par Guillaume Bertrand, évêque de Bayeux) résiste encore. Edouard III est finalement vainqueur. Mais il est furieux d’avoir dû mener un « combat long et disputé » alors que la prise de la ville aurait dû être si facile.
Dans sa colère, il ordonne le massacre de toute la population et l’incendie de la cité. « Heureusement » un de ses compagnons parvient à le calmer en partie. Le roi ne donne finalement le droit à ses soldats de piller la ville « que » pendant trois jours.

Pendant qu’Edouard III se recueille sur la tombe de Guillaume le Conquérant, son ancêtre, ses hommes massacrent au moins 2 500 personnes, rançonnent les nobles et les bourgeois, violent les femmes, et accumulent assez de butin pour remplir une centaine de bateaux.
Ils repartent le 31 juillet pour la suite de leur chevauchée normande à l’exception de 1 500 d’entre eux. Aussitôt, la population se soulève et ils sont à leur tour massacrés par les défenseurs du château.

Ci-dessous :
– Illustration du siège de Caen dans les Chroniques de Jean Froissart, auteur inconnu, XVè siècle, manuscrit conservé à la Bibliothèque Nationale
– Plan de Caen, issu de François de Belleforest, La Cosmographie universelle de tout le monde. Paris, 1575.
Ce plan est largement postérieur au siège de Caen mais je ne résiste pas à l’envie de le poster pour vous donner une idée de la structure ancienne de la ville.

O tempora, o mores !

“Ô temps ! Ô mœurs !”
Je ne sais pas pourquoi, le grand feuilleton politique de l’été me donne envie de citer Cicéron aujourd’hui. Cette locution, O tempora, o mores ! se trouve dans son premier discours contre Catilina. L’orateur y fustige la décadence de son époque qui a oublié le “mos majorum”, les coutumes des ancêtres.
Cela dit, à titre personnel, je ne regrette pas les temps anciens, pas plus que je ne crois que le nouveau monde soit si différent de l’ancien…

Quant à Catilina, ce n’est pas une charmante jeune femme qui a repoussé les avances de Cicéron comme un camarade de classe l’a répondu un jour à notre professeur de latin :

“Pour résumer brièvement l’affaire, Catilina est un sénateur romain à la réputation sulfureuse : plus chef de bande qu’homme politique, il n’hésite pas à faire le coup de poing pour imposer ses idées. En 63 avant J.C., après avoir échoué à trois reprises à l’élection du consulat, Catilina renonce à emprunter la voie légale et opte pour la manière forte : il prend la tête d’une conjuration dont le but est d’éliminer une partie des hommes politiques (Cicéron inclus), de renverser le Sénat et de prendre le pouvoir. Cicéron, alors consul, apprend l’existence de ce complot et dénonce Catilina au Sénat – ce sont les “Catilinaires” en question. Catilina s’enfuit en Étrurie auprès de ses partisans, mais il est tué en 62 avant J.C. Les autres conjurés, restés à Rome, sont exécutés sur les ordres de Cicéron. Acclamé par le peuple, il sera pourtant condamné à l’exil quelques années plus tard, pour avoir fait assassiner sans procès des citoyens romains… ”

Extrait du blog La toge et le glaive : La toge et le glaive

Lord Dunsany

Vous ne connaissez sans doute pas cet écrivain irlandais né le 24 juillet 1878. Pourtant, Edward John Moreton Drax Plunkett 18è baron de Dunsany, est l’un des fondateurs majeurs de la fantasy moderne et surtout un des écrivains qui a le plus influencé Howard P. Lovecraft, avec Edgar A. Poe.

L’œuvre la plus connue de Dunsany, La Fille du roi des elfes, écrite en 1924 tient à la foi du conte merveilleux et de la fantasy épique. Mais une autre de ses compositions, Les Dieux de Pegāna de 1905, inspira au maître de Providence son Cycle onirique et ses Contrées du rêve.

Bref, Dunsany est un incontournable si vous aimez la « sword and sorcery » ou le fantastique teinté de mythologie.

Corne d’abondance glacée

Le 23 juillet 1904, Charles Menches, un vendeur de glace de l’Exposition universelle de Saint-Louis aux États-Unis, vit un drame personnel. Il n’a plus d’assiette pour servir ses glaces à ses clients. Mais soudain une idée jaillit dans son cerveau en panique. Il se tourne vers le pâtissier voisin, Ernst Hamwi, et lui achète un lot de ses fines et délicieuses zlabias, des sortes de gaufrettes. Il lui demande de les rouler en forme de cônes et les remplit de crème glacée. La « cornucopia » (du latin: corne d’abondance) ou cornet de glace vient de naître.
Le succès est immédiat. A tel points que d’autres vendeurs de glace de la foire et Ernst Hamwi lui-même, réclament le titre d’inventeur. Très vite, d’autres pâtissiers s’en mêlent aussi. Un New-Yorkais, Italo Marchioni, prétend même servir ses glaces dans des coupes comestibles depuis 1896 !
Aujourd’hui encore, on ignore qui fut le véritable inventeur des cornes d’abondance glacées mais une chose est sûre: elles rapportent chaque année plusieurs milliards d’euros/de dollars à leurs fabricants.
A titre indicatif, l’usine Nestlé de Beauvais produit à elle seule plus de 210 millions de cornets Extrême chaque année !

©Bruno Marielle/Vanessa Gault/Prismapix

« Belle vue. Magnifique désolation »

Le 20 juillet à 21h 56min 20s (heure de Houston), Neil Armstrong pose le pied sur la lune devant des centaines de millions de spectateurs.
19 minutes plus tard, Edwin « Buzz » Aldrin le rejoint. Ses premières paroles sont « Belle vue. Magnifique désolation ».
Les deux hommes ont quitté la terre le 16 juillet dans l’énorme fusée Saturn V avec Michael Collins, le pilote du module de commande qui doit rester en orbite lunaire (pas de chance !).
Leur séjour sur la lune dure finalement 21h 36 min dont 2h 30 min de sortie extravéhiculaire.
Tous reviennent sur terre sans difficulté majeure.
Leur mission, Apollo 11, est un grand succès. Dans le contexte de la Guerre Froide, elle entérine l’avance prise par les États-Unis sur l’URSS dans la course à l’espace.

ci-dessous :
– Buzz Aldrin sur le sol lunaire
– L’empreinte de Buzz Aldrin sur la lune.

Brennus et la bataille de l’Allia

Le 18 juillet 390 ou 387 avant Jésus-Christ a lieu un événement qui traumatise les Romains pour plusieurs siècles : la bataille de l’Allia, du nom de la rivière près de laquelle elle se déroule.

Là, à seulement une quinzaine de kilomètres de la Ville, les troupes du tribun consulaire Quintus Sulpicius Longus subissent une des pires défaites de l’histoire romaine face à l’armée gauloise de Brennus, inférieure en nombre mais beaucoup plus expérimentée.
Paniqués par les chants de guerre gaulois, surpris par l’assaut de leurs adversaires qui ont d’emblée déjoué leur tactique, les Romains se font massacrer. Ceux qui parviennent à fuir se noient en masse. Les survivants rejoignent une cité étrusque tout proche et renoncent à rentrer tout de suite à Rome.

La Ville est abandonnée aux Gaulois qui la mettent à sac à l’exception du Capitole qui résiste plusieurs mois avant de se rendre. Les survivants doivent s’humilier et payer une énorme rançon à leurs vainqueurs pour s’en débarrasser enfin.

Cet épisode du sac de Rome par les Gaulois donne lieu ensuite à l’invention de nombreux épisodes héroïques et est exagéré par la plupart des auteurs/historiens romains.
Trois cents ans plus tard, quand César part à la conquête des tribus gauloises, la mémoire de l’Allia est encore bien présente à Rome. Elle fait douter certains de la capacité du proconsul à triompher de ses adversaires et poussent les autres à espérer une revanche qui lave enfin leur humiliation.

Depuis, cette victoire gauloise contre les Romains et le sac de Rome qui a suivi n’ont pas cessé d’alimenter l’imaginaire français pour le pire et le meilleur.
Au XIXè siècle, l’image du barbare se teinte d’une connotation érotique comme on le voit dans le tableau de Paul Jamin ci-dessous. Mais, parallèlement, dans le cadre de l’affirmation de la nation française et de la lutte contre l’Allemagne, Brennus devient aussi un symbole nationaliste.
C’est tout naturellement donc qu’Alix part à la recherche de son épée dans les Légions perdues pour empêcher Pompée de s’en servir pour rallumer la guerre en Gaule (ce qui donne l’occasion à Martin de présenter Brennus et la prise du Capitole)
À notre époque encore, l’équipe victorieuse du championnat de France de Rugby reçoit en récompense le « bouclier de Brennus ». On dit souvent qu’il doit son nom du chef gaulois alors qu’il s’agit en fait simplement de celui de son créateur : Charles Brennus, un maître graveur du XIXè siècle passionné de sport.
Mais c’est beaucoup moins héroïque !

Anne de Clèves

C’est sur la foi du portrait posté plus bas que le roi Henri VIII d’Angleterre – le Barbe Bleu local – choisit Anne de Clèves comme quatrième épouse en 1539. Hélas, le roi fut très déçu par leur première rencontre. Il jugea la jeune femme de 24 ans d’une beauté très moyenne.
Obligé néanmoins de l’épouser en janvier 1540 pour ne pas faire capoter son alliance avec sa famille, il fit annuler le mariage dès le mois de juillet suivant. Il n’avait jamais été consommé.
La reine accepta très facilement son sort: Henri avait 24 ans de plus qu’elle, pesait près de 150 kilos (alors que le surpoids commençait à être très dévalorisé), avait un ulcère nauséabond à la jambe, passait pour un amant brutal et avait déjà fait décapiter une de ses épouses pour la remplacer par une maîtresse morte depuis en couches…
Paradoxalement, par la suite, Anne de Clèves et Henri VIII gardèrent des rapports cordiaux voire affectueux. Elle lui survécut 10 ans.

C-dessous :
Anne de Clèves par Hans Holbein le Jeune, 1539, Musée du Louvre.