Dé à 20 faces antique

On dirait que les anciens Grecs pratiquaient le jeu de rôle eux aussi : voici un magnifique dé à 20 faces de l’époque ptolémaïque, quand les Grecs dominaient l’Égypte. Il est conservé au Metmuseum.

En fait, non, bien sûr, ce dé n’était pas utilisé pour savoir quel PNJ se cachait derrière la porte du tombeau ultime ou si vous alliez survivre à votre chute dans la fosse aux crocodiles…
Mais presque : ce dé servait à la divination. Chaque face comportait une lettre et, avec un peu de chance, on arrivait à former un mot au bout de quelques lancers. Bon, la réponse devait souvent n’avoir aucun rapport avec la question mais plus un oracle est mystérieux, plus il dit de vérités, c’est bien connu.

Publié le Catégories Histoire antique
Partager LinkedIn

Très Riches Heures du duc de Berry : le festin de janvier

Mieux vaut tard que jamais : voici l’illustration du mois de janvier des Très Riches Heures du duc de Berry.

©Photo. R.M.N. / R.-G. Ojéda
Le duc lui-même est représenté sur la droite, en bleu, avec une coiffe en fourrure brune. À côté de lui, on voit l’inscription « Approche approche », sorte de « bulle » avant l’heure et, effectivement, des proches, prélats et laïcs, avancent vers lui.
Devant la table, deux serviteurs, des écuyers tranchants (chargés de découper la viande) portent l’écharpe blanche des partisans des Armagnacs.
La France est alors en pleine guerre civile. Suite à la folie du roi Charles VI, le pays est dirigé par un conseil de régence. Outre la reine Isabeau, ses membres les plus influents sont Jean sans Peur, duc de Bourgogne, et Louis d’Orléans, frère du souverain et gendre de Bernard VII d’Armagnac. Deux hommes aussi puissants et ambitieux ne peuvent pas s’entendre longtemps et leur conflit personnel dégénère très vite en véritable guerre. Les « Bourguignons » et les « Armagnacs » s’affrontent donc pendant 25 ans, de 1410 à 1435 !
Le duc de Berry appartient au parti des Armagnacs. Le festin représenté ci-dessus est peut-être celui qu’il a organisé le 1er janvier 1415 pour tenter de réconcilier ses alliés avec leurs ennemis bourguignons dans le cadre de la paix d’Arras qu’ils vont signer le mois suivant. Malheureusement, cette paix se révélera n’être qu’une trêve et les hostilités reprendront très vite.
L’idée de guerre est d’ailleurs présente dans le motif d’arrière-plan de la scène: de grandes tapisseries qui montrent des scènes de la mythique guerre de Troie.

Vous pouvez découvrir aussi dans les Très Riches Heures :

les autres mois : janvier, février, mars, avril, mai, juillet, août, septembre, octobre, novembre , décembre

une fête chrétienne illustrée dans le livre : l’Ascension

Un étonnant “homme zodiacal”

 

 

Angoulême 2019

Comme chaque année, je serai présente au prochain festival de la Bandes dessinée d’Angoulême.
Je signerai mes albums sur le stand Casterman :
– Jeudi 24 janvier de 15h à 16h30
– Vendredi 25 janvier de 15h30 à 17h
– Samedi 26 janvier de 18h à 20h
J’y serai avec Denis Bajram mais Thierry Démarez et Steven Dupré sont restés à la maison pour préparer nos prochains albums.

William Prout, spécialiste de la digestion

Né le 15 janvier 1785, William Prout était un savant britannique dont la spécialité était la chimie.

On lui doit, entre autres, beaucoup d’analyses des sécrétions des organismes vivants, dont il croyait qu’elles étaient produites par la ruptures des tissus (!). Ainsi, en 1823, il découvrit que les sucs de l’estomac renfermaient de l’acide chlorhydrique qui pouvait être séparé des sucs gastriques au moyen de la distillation. En 1827, ce fut lui qui établit la classification lipides, protides, glucides. Elle lui valut la médaille Copley de la Royal Society de Londres.

(Cet article est dédié à Thibaud De Rochebrune, mon futur co-auteur)

Ci-dessous :
William Prout d’après une miniature de Henry Wyndham Philips, XIXe siècle.

Orange mécanique

… Ou harcèlement et auto-censure avant les réseaux sociaux.

Le 13 janvier 1971 sortait en salle, Orange mécanique, de Stanley Kubrick.Film de science-fiction autant que satire sociale, il raconte les dérives d’un sociopathe ultra-violent que son gouvernement va tenter de réhabiliter au moyen de séances de conditionnement extrêmement malsaines.

Le film ne fut pas censuré à sa sortie comme on le voit souvent écrit mais Kubrick reçut beaucoup de lettres de menaces et d’insultes. Des attroupements d’opposants virulents au film eurent même lieu devant sa maison.
Lassé de ce harcèlement et craignant pour la sécurité des siens, le réalisateur finit par demander à Warner Bros, qui diffusait le film, de le retirer des salles anglaises. Ce qui fut fait. Kubrick empêcha aussi toute diffusion en vidéo ou à la télévision britannique de son œuvre. Cette auto-censure dura jusqu’à la mort du réalisateur : Orange mécanique ne fut projeté à nouveau à Londres qu’en l’an 2000 !

À méditer à l’heure où la critique des œuvres vire de plus en plus souvent au harcèlement sur les réseaux sociaux. Avec, en réponse, l’autocensure des auteurs. Espérons que la colère des foules de tous bords n’en vienne pas à nous priver des Orange mécanique de demain.

Votez Rumiko Takahashi !

Tribune publiée originellement sur Actualitte.com

Chers amis auteurs et autrices de BD, comme chaque année depuis 2013, nous sommes invités à voter pour élire le prochain Grand Prix de la ville d’Angoulême. Nombreux sont ceux dont nous admirons les œuvres et qui n’ont pas encore été récompensés. Et surtout « nombreuses ». Depuis sa création en 1974, le Grand Prix n’a été décerné qu’une seule fois à une autrice : Florence Cestac en l’an 2000.

Claire Brétécher, souvent citée, n’a reçu en fait que le Prix du 10e anniversaire. À l’heure où la question de l’invisibilisation des femmes et plus généralement celle de leur égalité avec les hommes sont plus que jamais au cœur des préoccupations sociétales, il est très tentant de vous demander de voter simplement pour une autrice, quelle qu’elle soit, par principe. Mais ce serait dire que le sexe d’une autrice importe plus que son œuvre. Ce serait la dévaloriser d’une autre façon.

Alors non, je ne vous propose pas de voter que pour une femme, je vous propose surtout de voter pour « un grand auteur ».

Rumiko Takahashi fait partie de ces mangakas, qui ont marqué durablement plusieurs générations d’entre nous. Nous l’avons pour beaucoup découverte grâce aux animes tirés de ses récits et diffusés à la télévision à partir de 1988, avant de lire ses livres eux-mêmes après 1994. Ses séries les plus connues sont, bien sûr, Maison Ikkoku (Juliette, je t’aime), Ranma ½ ou Urusei Yatsura (Lamu).

 

Mais Rumiko Takahashi n’est pas seulement une des plus grandes autrices de comédies loufoques et romantiques ou de shonen d’arts martiaux, elle excelle aussi dans le récit historique, le fantastique ou même l’horreur. Quel que soit le sujet, sa créativité débordante, sa narration aussi claire qu’inventive et son dessin extrêmement attachant lui ont fait toucher le plus grand public.

La récompenser, c’est aussi réaffirmer que la Bande dessinée n’a pas à avoir honte d’être une culture populaire, que le « tout public » n’est pas forcément synonyme de « médiocrité » et que s’adresser en priorité aux adolescents ne veut pas dire qu’on ne fait pas œuvre d’auteur.

 

La Maison Ikkoku (Juliette, je t’aime)

J’emploie les termes « Bande dessinée », mais je devrais, bien sûr, plutôt dire « Manga ». Voter pour Rumiko Takahashi, c’est aussi voter pour une créatrice japonaise, donc faire un choix doublement radical et résolument actuel. Pendant très longtemps le palmarès du Grand Prix est resté très franco-belge.

Les Américains Will Eisner et Robert Crumb, primés en 1975 et 1999, faisaient figure d’exceptions. Depuis 2011 et le Prix attribué à Art Spiegelman, les choses ont un peu évolué. Mais seul un Japonais, Katsuhiro Otomo, a reçu le Grand Prix en 2015. Akira Toriyama a dû se contenter du Prix du quarantenaire deux ans plus tôt.

 

Ranma 1/2

Alors, et c’est une amoureuse de la Bande Dessinée franco-belge qui vous le dit, il est temps d’amplifier l’ouverture des Grands Prix sur le monde et de rendre compte de l’impact qu’ont eu les mangakas sur notre imaginaire, notre sensibilité et nos propres créations.

Rumiko Takahashi est arrivée quatrième des votes l’an passé. Faisons en sorte qu’elle reçoive enfin en 2019 le Grand Prix qu’elle mérite depuis bien longtemps.

 

Janus, le dieu du premier jour

Hier, 1er janvier, on célébrait dans la Rome antique le dieu qui a donné son à notre mois de janvier : Janus.
Avec ses deux visages qui regardent l’un vers le passé et l’autre vers l’avenir, il préside aux commencements, aux fins, aux passages et aux portes (bref, il aurait tout aussi pour être la divinités préférées des rôlistes).
Censé avoir régné avec Saturne, fêté le mois dernier, sur l’Âge d’or du Latium, il dispose du premier prêtre de Rome, le « rex sacrorum » et c’est toujours à lui qu’on sacrifie la première bête du troupeau.

Son temple est situé près du forum: ses portes sont ouvertes en temps de guerre et fermées en temps de paix, contrairement à celles des autres sanctuaires de la ville. Bon, connaissant un peu les Romains, je pensais bien qu’elles n’avaient pas dû être fermées souvent mais c’est encore pire que ce que je pensais : de la construction du temple au VIIe siècle à Auguste, ses portes ne furent fermées que deux fois ! et pas pour longtemps.
Sous le premier empereur, la paix gagna en importance et les fameuses portes furent fermées trois fois en quelques dizaines d’années.

Auguste accordait d’ailleurs une importance particulière à Janus et au mois de janvier. Voyant son règne comme le passage entre deux époques et surtout soucieux de devenir lui aussi « le premier », le « princeps », il fit même déplacer son anniversaire officiel de septembre à janvier.

– Un buste de Janus, Musée du Vatican. © Fubar Obfusco

– Le Temple de Janus par Pierre Paul Rubens, 1635, Musée de l’Ermitage, Saint-Pétersbourg. © Abcgallery.com


– L’ « arc de Janus », eau-forte de Piranèse, 1748-1774.
Toujours debout aujourd’hui ce monument n’est ni un vrai arc de triomphe, ni un monument dédié à Janus. Edifié au IVe siècle de notre ère, ce tétrapyle monumental servait surtout aux marchand du forum boarium – un marché aux bestiaux – voisin pour faire leurs transactions. Il fut transformé en forteresse au Moyen-Âge par la famille des Frangipani (oui, comme la « frangipane » de la galette que vous allez bientôt manger, je vous en reparlerai si vous voulez)

Bûche du solstice

Mon dernier souvenir de 2018 fut une succulente bûche aux amandes.
En son honneur, je vais vous parler aujourd’hui de l’origine de ce dessert de fin d’année.

Parmi les rites archaïques marquant le solstice d’hiver, on trouve un peu partout le fait de faire brûler un tronc d’arbre en offrande aux dieux afin qu’ils donnent en retour de bonnes récoltes l’année suivante.

Cette habitude s’est ensuite christinianisée : lors de la veillée de Noël on enflammait une grosse bûche qui devait, dans l’idéal, brûler douze jours, jusqu’à l’Épiphanie. Le bois devait provenir d’un arbre porteur de fruits comestibles : arbre fruitier, châtaignier… On l’arrosait de vin ou de lait et on la bénissait avec une branche de buis. Le but final était le même qu’autrefois : s’assurer que les prochaines récoltes seraient bonnes. Les tisons et les cendres étaient ensuite conservées pour assurer la protection de la maison contre les sorcières ou autre esprits malfaisants.

Dans certaines régions comme la Normandie, les parents cachaient des friandises dans la bûche en disant aux enfants d’aller prier dans un coin de la pièce. A leur retour, la bûche leur avait donné des bonbons 🙂

Mais l’invention de la bûche « gâteau » est beaucoup plus récente. Elle date du XIXe siècle sans qu’on connaisse le nom de son inventeur. Peut-être est-elle née à Lyon vers 1860 ou un peu plus tôt chez un pâtissier de Saint-Germain-en-Laye. Quoi qu’il en soit, elle n’est devenue populaire comme dessert de Noël ou de nouvel an qu’après la deuxième Guerre Mondiale.

Sa consommation entraîne-t-elle de bonnes récoltes l’année suivante ? La question est ouverte. J’attends vos futurs témoignages.