Sémiramis

Sémiramis est une reine assyrienne du 9e siècle avant notre ère. Son histoire réelle est peu connue mais elle a donné naissance à une des grandes légendes du Proche-Orient antique. Elle commence en tragédie et finit en apothéose et, vous verrez, elle a quelques similitudes avec le mythe de Romulus.

La reine Sémiramis (1905), par Cesare Sacaggi.

Tout débute donc avec une divinité, non pas avec Mars, mais avec sa compagne de toujours : la déesse de l’Amour, la Vénus locale. Elle est très en colère contre Dercéto une autre déesse, une sorte de sirène, qui vit en célibataire près d’Ascalon, au Proche Orient. Pour la punir de ne pas s’intéresser à l’amour, Vénus ou plutôt Ishtar, lui donne l’envie irrépressible de s’unir à un jeune mortel. Quelques mois plus tard, Dercéto accouche d’une petite fille et, comprenant avec horreur ce qui s’est passé, tue son amant, abandonne son enfant et plonge pour toujours au fond de son lac préféré.

Heureusement, le bébé est recueilli par des colombes, les oiseaux d’Ishtar/Vénus, puis par des bergers qui lui donnèrent son nom de Sémiramis. Devenue grande, sa beauté attire l’attention d’un général qui l’épouse, puis du roi de Ninive qui ordonne à son mari de se suicider pour pouvoir l’épouser à son tour. Les rois, comme les dieux, ne reculent devant rien à l’époque.

Mais son mariage ne porte pas chance au souverain de Ninive. Il meurt peu de temps après la naissance du fils qu’il a avec Sémiramis.

Elle lui succède et règne durant 42 ans. Son plus grand fait de gloire est de fonder la ville mythique de Babylone. Pour se faire, elle détourne l’Euphrate et entoure le nouvel espace urbain d’une muraille de 70 km de long (!). Puis elle dote la ville de splendides monuments : un immense réseau de palais, un temple dédié au roi des dieux, Marduk, et surtout les fameux jardins suspendus, une des sept merveilles du monde antique.

Et Sémiramis ne s’arrête pas là. Elle se fait guerrière et conquiert l’Arménie, la Médie, d’autres royaumes asiatiques, puis l’Égypte et l’Éthiopie. Comme Alexandre après elle, elle emmène ses armées jusqu’au fleuve Indus. A son retour, elle apprend que son fils conspire contre elle. Selon certaines versions de la légende, il réussit tout de même à l’assassiner. Selon d’autres, elle se suicide en se jetant dans un bûcher. Selon d’autres enfin, elle retire juste du pouvoir avant, comme sa mère, de disparaître à tout jamais. Mais toutes les versions concordent sur un ultime point : au moment de sa mort, Sémiramis est transformée en colombe et emportée au ciel pour y devenir une déesse.

Tout est bien qui finit bien.

Pluie de sang et papillons

Dans les premiers jours de juillet 1608, une pluie de sang (oui, une vraie !) se mit à tomber sur les faubourgs d’Aix-en-Provence, déclenchant une vague de terreur dans toute la ville. On crut à la colère divine voire à la fin du monde.

Heureusement, une des rares personnes à garder son sang-froid fut Nicolas-Claude Fabri de Peiresc, un conseiller du Parlement qui était aussi un homme de lettres et un érudit. Il devait plus tard devenir l’avocat de son ami Galilée.

© Thomas Bresson

En 1608, il ne paniqua donc pas. Il recueillit quelques gouttes du sang tombé du ciel sur le mur du cimetière de la cathédrale. Il l’observa et finit par faire le rapprochement entre ce sang et le nombre particulièrement élevé de chrysalides de papillons qu’il avait observées dans les faubourgs d’Aix dans les jours précédents.Le sang était en réalité du méconium, un excrément liquide et rougeâtre, que produisent les papillons tels que le Vulcain quand ils sortent de leur chrysalide. Ce début juillet 1608, ils avaient été exceptionnellement nombreux à le faire en même temps, provoquant une véritable pluie rouge sur certaines rues.

Mais, malgré les explications de Peiresc, nombreux furent ceux qui continuèrent de croire à un prodige ou une malédiction divine et la peur demeura encore quelques temps sur la ville.

Vanité aux portraits

Voici Vanité aux portraits, par David Bailly, 1651, conservée au Stedelijk Museum de Leyde aux Pays-Bas.

Au XVIIe siècle,les bulles de savon sont souvent utilisées dans les tableaux pour exprimer la brièveté de la vie. On les retrouve ici avec d’autres symboles habituels de mortalité : crâne, fleurs fanées, sablier…

Ils sont là pour nous montrer la « vanité », le caractère vain et trop vite passé, de la plupart des choses de la vie : plaisirs simples (vin, pipe) mais aussi science (livres) et arts (musique, sculptures, peinture…).

Le passage du temps est aussi indiqué sur cette toile d’une manière plus inhabituelle : le peintre, âgé de 67 ans au moment où il la réalise, s’y est représenté deux fois. Il est l’homme âgé du petit tableau central mais aussi le jeune homme qui le tient en main.

Thésée et le Minotaure à la Renaissance

Voici un extrait d’une peinture Renaissance représentant le mythe de Thésée et du Minotaure. Elle a été réalisée en Italie au XVIe siècle par un anonyme de l’École du Maître des cassoni Campana et conservée au Louvre.

Dans le labyrinthe, le prince athénien, attendu par Ariane et sa sœur Phèdre, tue le Minotaure vu comme une variation du centaure, un homme au bas du corps de taureau, plutôt que sous sa forme habituelle pour nous d’homme à tête de taureau.

Si on regarde ensuite la peinture complète, on s’aperçoit qu’elle enchaîne, sans les séparer, les différentes étapes du mythe un peu dans le désordre.

– Au premier plan à gauche, on voit, Ariane, accompagnée de sa sœur Phèdre, donner son fameux fil à Thésée. Derrière eux, toujours à gauche, on les voit déjà discuter tous les trois devant une sorte de palais.

– Entre ces deux scènes, on a le bateau dans lequel Thésée est venu en Crète avec d’autres jeunes Athéniens et Athéniennes pour être sacrifié au Minotaure.

– Plus à droite, Thésée se dirige vers le labyrinthe.

– Derrière celui-ci, on voit le même genre de créature combattre des guerriers et finir par être capturée par eux : peut-être est-ce le père du Minotaure, le fameux « taureau » envoyé par Poséidon, le dieu de la Mer, dont Pasiphaé, la reine de Crète, tombe amoureuse. Il aurait alors déjà un buste d’homme comme son futur fils.

– Enfin, au centre de l’arrière-plan, on voit des bateaux aux voiles noires s’éloigner sur la mer : c’est le bateau de Thésée qui retourne à Athènes, victorieux mais ayant oublié de mettre des voiles blanches pour prévenir son père, Égée, de l’issue heureuse de son aventure.

Akrotiri, la perle de Santorin

L’île de Santorin, Théra dans l’Antiquité, a été ravagée par une gigantesque explosion volcanique vers 1600 avant notre ère. Au XXe siècle, des archéologues ont fait (à tort) de ce cataclysme l’origine du mythe de l’Atlantide. Spyridon Marinatos, le premier d’entre eux, est venu dans l’archipel pour essayer de corroborer son hypothèse à partir de 1967. Il y découvrit que la catastrophe avait détruit au passage une prospère cité de plusieurs milliers d’habitants. Ce lieu de fouille est appelé aujourd’hui Akrotiri.

 

La vie s’y organisait autour de bâtiments à étages qui servaient autant à l’artisanat (poterie, métallurgie, fabrication d’amphore, de tissus… ) qu’à l’habitation. La prospérité venait du commerce de ces fabrications locales ainsi que de celui du vin, de l’huile, du miel. Elle a permis l’importation de viandes et d’artefacts variés de Grèce, mais aussi la construction d’un premier réseau d’égouts et la réalisation de fresques qui n’ont rien à envier à celles de Cnossos.

Heureusement, l’éruption a fait très peu de victimes à Akrotiri : la plupart des habitants ont réussi à fuir à temps. Quand les tremblements de terre annonciateurs du pire ont débuté, ils ont vidé entrepôts et maisons et sont allés se mettre en sûreté. On ignore ce qu’ils sont devenus exactement. En tout cas, ils ne sont pas revenus chez eux. L’éruption a rendu leur île inhabitable pour plusieurs siècles.

Santorin, la Crète et l’Atlantide

Le temple du Minotaure, le mystérieux sanctuaire atlante que découvre Alix dans sa dernière aventure, se situe près d’une île des Cyclades, Théra, appelée Santorin de nos jours. Ce n’est pas un hasard.

L’Atlantide est une civilisation imaginaire décrite par Platon, un philosophe du Ve siècle avant notre ère. On l’a cherchée ensuite partout dans le monde, mais c’est seulement le XX e siècle qui l’a associée avec la Crète et plus encore avec Santorin, située à 100 kilomètres environ au nord de la grande île.

L’île de Santorin, an 2000 – EOS photo NASA

Tout a commencé avec l’archéologue Spyridon Marinatos. En 1939, il a effectué des fouilles en Crète et posé l’hypothèse que la pierre ponce trouvée dans le sol provenait d’une éruption du volcan de Santorin. Pour lui, un tsunami causé par cette même éruption a entraîné la chute de la civilisation minoenne et le mythe de l’Atlantide est né du souvenir déformé de cette catastrophe.

De fait, Santorin a connu une énorme éruption vers 1600 avant notre ère, une des plus puissantes de notre Histoire. Le volcan a été pulvérisé ou s’est effondré sur lui-même. La mer est entrée en contact avec la lave qui devait atteindre les 1000° C. Ce brutal choc thermique a engendré un gigantesque tsunami. Au moins trois vagues de plus de vingt mètres de haut ont pénétré les côtes de la Crète sur des centaines de mètres emportant tout sur leur passage. Mais on pense aujourd’hui que cela a été insuffisant pour causer la décadence de l’île. Elle ne s’est produite vraiment que quelques siècles et quelques autres catastrophes plus tard.

Le cataclysme a-t-il néanmoins inspiré l’Atlantide ? Rien n’est moins sûr non plus. Il n’est pas évoqué par Platon, ni par aucun autre auteur de l’Antiquité. Sa date ne correspond pas à celle donnée pour la disparition de la cité légendaire et la géographie de celle-ci est très différente de celle de Santorin. Le plus probable est donc que le rapprochement fait entre la catastrophe réelle et le récit platonicien est aussi erroné qu’il peut être stimulant pour l’imagination.

Le Disque de Phaistos

En 1908, l’archéologue Luigi Pernier a découvert un bien curieux objet dans les ruines du palais minoen de Phaistos, en Crète : un disque d’argile de 16 cm de diamètre couvert de hiéroglyphes inconnus disposés en spirales.

Peut-être s’agit-il d’un texte dans une écriture encore indéchiffrée à ce jour. Il daterait du IIe millénaire avant notre ère. Mais aucun autre objet du même type n’a encore été découvert et certains savants pensent qu’il peut s’agir d’un faux réalisé début XXe siècle.

Je n’ai pas eu l’occasion d’en parler dans le dernier Alix Senator, mais j’en aurais bien fait un exemple de la mystérieuse écriture atlante que Kachta et Tefnout cherchent à décrypter en vain pour l’instant.

Dragon étouffant un éléphant

Au Moyen-Âge, les savants pensaient que le dragon – ce serpent géant avec des pattes et des ailes – était le pire ennemi de l’éléphant. C’est ce que nous montre l’enluminure ci-dessous réalisée en Angleterre avant 1187 et conservée à la Morgan Library and Museum (New York).

C’est en fait une très vieille idée. Déjà dans le livre VIII de son Histoire naturelle, le Romain Pline l’Ancien nous décrit les combats épiques des deux animaux qui vivent, comme chacun sait, en Inde et en Éthiopie :

« Le dragon a de la peine à s’élever à la hauteur de l’éléphant; en conséquence, […] il se jette sur lui du haut d’un arbre : l’éléphant sait qu’il n’est pas assez fort pour lutter contre les nœuds qui l’étreignent; aussi cherche-il à écraser son ennemi contre les arbres […] : le dragon prévoit le danger, et tout d’abord il lui enlace les jambes avec sa queue; l’éléphant défait les nœuds avec sa trompe; le dragon enfonce sa tête dans les narines de l’éléphant, et à la fois lui ferme la respiration et le blesse dans les parties les plus délicates.
Quand ils se rencontrent à l’improviste, le serpent se dresse et attaque son adversaire, principalement aux yeux; De là vient qu’on trouve souvent des éléphants aveugles, consumés par la faim et le chagrin. […]
On rapporte encore autrement ce combat : l’éléphant, dit-on, a le sang très froid, aussi est-ce surtout pendant les chaleurs que les serpents le convoitent; en conséquence, cachés dans les rivières, ils guettent l’éléphant qui vient boire; ils s’enlacent autour de sa trompe et le mordent à l’oreille, parce que c’est le seul endroit qu’il ne puisse défendre avec sa trompe; ils boivent tout son sang, tant ils sont énormes. L’éléphant, ainsi épuisé et mis à sec, tombe; le dragon enivré est écrasé, et meurt. »
(Traduction Ph. Remacle)

Les images de la semaine

Toutes les semaines, je poste sur les réseaux sociaux (Instagram et Facebook) des images qui me plaisent beaucoup sans mériter un vrai article sur le site. Alors je les rassemble pour une publication du week-end.

Voici celles de cette mi-avril :

– On dirait une île pour super-vilain, non ?

Vous êtes :
– un savant injustement controversé en quête d’un petit paradis où installer son laboratoire et les sympathiques créatures issues de ses expériences ?
Ou
– un dinosaure sur le retour en quête d’une contrée accueillante sans gorille géant ni aventurier sans scrupule ?
Ou encore
– le n°1 d’une organisation internationale clandestine cherchant juste à améliorer l’humanité en la débarrassant de ses éléments improductifs en quête d’un repaire où James Bond ne vous découvrira jamais ?
J’ai ce qu’il vous faut : Aoga-shima, une île volcanique japonaise, aussi magnifique qu’isolée dans l’archipel d’Izu.

Source photographique : whenonearth.net

– Femme sauvage :

Parmi les créatures étranges mystérieuses que rencontrent ceux qui voyagent au loin, il n’y a pas que les licornes, il y a aussi les… femmes sauvages et poilues.
Ci-dessous :
Jeune femme sauvage en compagnie d’une licorne.
Gravure pour une carte à jouer de Maître E. S. (nom de convention d’un graveur allemand anonyme connu uniquement par ses œuvres), vers 1460-1467, Staatliche Graphische Sammlung, Munich.

– Eve et Adam vus par l’Islam moghol

Ève et Adam n’appartiennent pas seulement aux traditions juives et chrétiennes. Ils sont aussi présents dans le Coran et donc représentés par les artistes musulmans et orientaux : icipeinture représentant Adam et Ève, réalisée par Manafi al-Hayawan, vers 1294-1299 à Maragh, en Iran moghol.

 

 

 

La déesse aux serpents

« Déesse aux serpents », datée de 1600 avant notre ère, trouvée à Cnossos et conservée au Musée archéologique d’Héraklion. © Jebulon

 

Voici la déesse aux serpents, une des plus célèbres statuettes de l’art minoen.

Elle a été retrouvée dans les ruines de Cnossos et restaurée par Arthur Evans, le premier archéologue à avoir redécouvert l’endroit. Mais Evans avait tendance à « réinventer » les objets qu’il trouvait et on se demande aujourd’hui si certaines parties ( dont la tête) voire l’objet entier ne sont pas des faux.

Reste que d’autres statuettes reprenant la même thématique ont été découvertes aussi depuis. Elles sont souvent interprétées comme des représentations d’une déesse-mère à la féminité à la fois sauvage et subversive. Base d’une religion matriarcale, elle aurait dominé un panthéon crétois constitué d’un jeune dieu et de divinités mineures liées à la nature : esprits de la végétation (griffons, animaux ailés), arbres ou monts sacrés.