Femme du jour : Sylvia Likens

J’ai un peu hésité avant de vous raconter cette terrible histoire aujourd’hui car il s’agit vraiment du « pire crime commis dans l’État d’Indiana », comme le qualifient les journaux de l’époque.

C’est le 26 octobre 1965 que la police d’Indianapolis découvre le corps torturé de la jeune Sylvia Likens, née le 3 janvier 1949, chez la femme chargée de veiller sur elle, Gertrude Baniszewski.

Effondrée celle-ci montre aux enquêteurs un mot écrit par Sylvia juste avant sa mort à l’attention de ses parents. Elle dit avoir accepté de coucher avec tout un groupe de garçons en échange d’argent mais l’affaire a dégénéré. Ils l’ont brûlée, battue, torturée. Les hommes, horrifiés, s’empressent de partir à la recherche des bourreaux de Sylvia… mais juste avant qu’ils ne quittent la maison, Jenny, la sœur de la victime, a le temps de leur chuchoter à l’oreille : « Sortez-moi d’ici et je vous dirai tout »

Son récit est encore plus glaçant que celui fait par Sylvia dans sa lettre. La malheureuse n’a pas été victime d’une bande de jeunes hommes mais de Gertrude, des enfants de celle-ci et plusieurs autres adolescents du quartier !

Tout commence trois mois plus tôt quand les parents de Sylvia et de Jenny, des forains, décident de repartir sur les routes en laissant leurs filles à Indianapolis, la ville où elles ont toujours vécu et ont tous leurs amis. C’est d’autant plus facile que Gertrude Baniszewski, la mère d’une de ces amies, Paula, est prête à les accueillir contre 20 $ par semaine. Au départ tout se passe bien. Mais un paiement arrive en retard, puis un autre…

Gertrude commence alors à battre les deux filles. Plus qu’après Jenny, c’est après Sylvia qu’elle en a. On ne saura jamais vraiment pourquoi. En tout cas, les mauvais traitements ne s’arrêtent plus. Pire, Gertrude y associe très vite ses enfants dont la fameuse Paula. Pour se justifier, elles n’hésitent pas à accuser Sylvia de méfaits imaginaires : elle a volé des bonbons ou un costume de gymnastique, elle a humilié Gertrude en admettant en public avoir déjà eu un petit ami. Pire elle a accusé Paula et Stéphanie, une autre fille de Gertrude, de se prostituer alors que, « bien sûr » c’est elle, Sylvia, qui se prostitue. Pour tout cela, elle doit être punie. Elle est battue, humiliée, brûlée à la cigarette. On lui grave même sur le ventre « Je suis une prostituée et j’en suis fière ». Et je vous dispense de lire le reste.

Enfermée au sous-sol, la malheureuse dépérit progressivement. Elle tente bien de s’échapper après avoir entendu Gertrude et ses enfants parler de l’abandonner dans les bois pour l’y laisser mourir, mais elle est rattrapée à la porte d’entrée. Aux mauvais traitements qui continuent s’ajoute alors la privation presque totale de nourriture. À peine trois mois après son arrivée dans la maison, Sylvia est à bout. Gertrude n’a plus qu’à la forcer à écrire la fameuse lettre qui confirmera à quel point elle était « une mauvaise fille, une prostituée » et donnera une explication plausible de sa mort.

Ci-dessous : Sylvia Likens, Gertrude Baniszewski et la maison où tout se déroula.

Le procès de la famille Baniszewski et de ses complices a lieu quelques mois plus tard. Gertrude plaide l’aliénation mentale. Elle échappe à la peine de mort mais est condamnée à perpétuité en mai 1966. Elle obtiendra la liberté conditionnelle 29 ans plus tard. Ses complices écopent également de peines de prison, notamment Paula (qui, pour l’anecdote, est enceinte d’un homme marié au moment du procès). Condamnée aussi à vie, elle verra sa peine commuée ensuite et sortira en 1972.

L’affaire fera couler beaucoup d’encre aux États-Unis, d’autant plus qu’on est à une époque où le féminisme cherche particulièrement à s’affirmer. En 1979, Kate Millett écrit ainsi un livre sur cette sinistre histoire : The Basement: Meditations on a Human Sacrifice. Pour elle, en résumant très vite, le meurtre de Sylvia Likens est le symbole de toute l’histoire de la répression des femmes, comme si Gertrude avait voulu apprendre à sa victime ce que c’était vraiment qu’en être une.

 

Femme du jour : Kane Tanaka

Née au Japon le 2 janvier 1903,  l’année où Marie Curie remporta le prix Nobel de physique avec son mari et Antoine Becquerel, Kane Tanaka est à 117 ans l’actuelle doyenne de l’humanité enregistrée par le Guinness des records.

Elle s’est mariée en 1922 (!) et a eu quatre enfants avant d’en adopter un cinquième et vit actuellement en maison de retraite.

Sa longévité, pour être exceptionnelle, fait néanmoins écho à celle d’autres Japonais comme sa prédécesseuse : Chiyo Miyako, morte à l’âge de 117 ans et 81 jours. Il faudra néanmoins à Kane Tanaka patienter encore un peu avant de battre le record de Jeanne Calment : 122 ans et 164 jours.

Photo : @GWRPRESS

Femme du jour : Jeanne Lanvin

Je lisais il y a quelques temps un (très bon) livre sur un peuple de l’Antiquité quand je me suis aperçue que sur ses 300 pages, il n’en consacrait que… 5 aux femmes, dans le chapitre « Vie privée ». Bon avant de s’énerver, il y a des raisons objectives expliquant cette sous-représentation, à commencer par l’absence relative des sources. On ne peut pas demander aux historiens d’inventer pour combler l’absence d’intérêt des Anciens pour la question féminine. Mais cela ne nous empêche pas aujourd’hui d’évoquer cette question car on sait quand même beaucoup de choses. Et dans ce cas précis, je suis sûre que l’historien aurait pu faire un peu plus d’efforts.

En tout cas, cela m’a donné envie de vous parler davantage des femmes du passé en me servant de mon petit éphéméride Facebook. Je compte donc essayer d’évoquer chaque jour (enfin presque) une femme ou un personnage féminin dont c’est l’anniversaire sur ce mur. Je vais essayer aussi de prendre les profils les plus variés possible : artistes, reines, scientifiques, criminelles, saintes, déesses, héroïnes romanesques, figures symboliques, femmes politiques, écrivaines, sportives… pour montrer toute la diversité des vies et des destins féminins. Bien sûr, il faudra faire des choix et il y aura forcément des oubliées. Ce sera aussi parfois très court, parfois très long… selon mes envies. Toutes ces femmes n’en sortiront pas obligatoirement grandies. Et, pour repousser un peu les limites de cet exercice (ne parler que des personnes célèbres, c’est ne pas parler de 99,99% des femmes), je compte bien en profiter pour évoquer un peu aussi de la société tournant autour de mes héroïnes.

Robe scintillante créée par Jeanne Lanvin en 1939

Pour commencer, voici Jeanne Lanvin (1er janvier 1867 – 6 juillet 1946), fondatrice de la plus vieille maison de couture encore en activité actuellement. Avec Gabrielle Chanel, Elsa Schiapelli ou Jeanne Paquin, elle fait partie d’une génération de femmes qui marque durablement la haute-couture française.

Née dans une famille de 11 enfants, elle doit commencer à travailler à 13 ans comme livreuse de chapeau pour une boutique du Faubourg-Saint-Honoré avant de devenir apprêteuse puis garnisseuse. Mais, dès 1885, elle a la chance de pouvoir ouvrir sa propre boutique grâce à une pièce d’or donnée par une cliente et un crédit accordé par ses futurs fournisseurs.
Une dizaine d’années plus tard, sa première collection de vêtements pour enfant inspirée par sa fille l’a fait remarquer de toute la critique. La légende dit que son goût pour la couture de vêtements lui vient de son regret de n’avoir jamais eu de poupée (et donc de ne jamais pouvoir les habiller) quand elle était petite. En tout cas, le succès est tel qu’elle peut lancer une collection « femme » en 1909.

Sa maison se développe ensuite dans toutes les directions dans les années 20. Elle se lance dans la décoration, les parfums, les vêtements pour homme… C’est son heure de gloire. Sa maison restera prospère ensuite jusqu’à sa mort en 1946 et même au-delà.

Détail amusant pour mes amis coloristes : Jeanne Lanvin crée elle-même plusieurs couleurs dont elle garde l’exclusivité en fondant ses propres ateliers de peinture en 1923 : le bleu Lanvin, le rose Polignac, le vert Vélasquez…

Portrait Jeanne Lanvin (1925), par Clémentine-Hélène Dufau, Paris, musée des arts décoratifs.

 

Alix senator 10 : la couverture

Petit cadeau de fin d’année : voici la couverture du tome 10 d’ Alix Senator, la Forêt carnivore, qui sortira le 8 avril prochain. Un tome très particulier puisque notre sénateur préféré revient en Gaule sur les traces de son passé.

Bayeux by night ou les boules de sorcières

En cette période de solstice d’hiver, l’ambiance derrière la cathédrale me fait plus penser à Halloween qu’à Noël, surtout quand les boules de verre suspendues aux branches de l’arbre de la liberté illuminent les ténèbres nocturnes. J’ai alors l’impression qu’il y a des esprits prisonniers dans l’arbre.

Ça me rappelle l’origine des boules que nous suspendons à nos sapins de Noël.
Jusqu’au XIXe siècle, les sapins de Noël alsaciens étaient décorés de fleurs et de fruits.

Mais vers 1830, on commença à remplacer ces fruits en Allemagne par des boules en verre mercuré ou soufflé : les boules de sorcière. Elles avaient été créées au siècle précédent en Angleterre et étaient censées protéger les maisons des mauvais esprits, des sorcières…
Généralement en verre vert ou bleu, elles pouvaient faire jusqu’à une vingtaine de cm de diamètre et on les accrochait à la fenêtre ou… dans un arbre.

On pensait alors que leurs couleurs vives attiraient le mauvais œil et que leurs reflets le neutralisaient en le renvoyant vers la sorcière qui en était à l’origine. Si on avait de la chance, l’esprit de la jeteuse de sort pouvait même se retrouver piégé dans la boule. Le « pendre » était alors une protection contre toutes les autres créatures malfaisantes. Bref, on obtenait le même résultat qu’en pendant la sorcière elle-même, opération beaucoup plus délicate (et moins esthétique).

Progressivement, ces boules magiques devinrent des objets de décoration si bien qu’elles survécurent à l’arrêt des chasses aux sorcières. On commença à les accrocher aux sapins de Noël. Elle arrivèrent en France, selon la légende, en 1858, quand la sécheresse priva les Vosges et la Moselle de fruits.

Les hippopotames de Pablo Escobar

Ou comment un baron de la drogue a introduit une nouvelle espèce animale en Colombie.

En faisant une petite recherche sur les hippopotames, je suis tombée ce matin sur cette curieuse histoire.
Si vous avez vu la série « Narco », vous savez qu’Escobar a fait aménager un zoo dans son hacienda colombienne dans les années 80. Il y a fait amener 4 hippopotames… pour que l’odeur de leurs excréments trompent le nez des chiens à la recherche de cocaïne. L’histoire ne dit pas si ça a marché. Mais en 1993, le trafiquant est abattu par la police et son zoo démantelé comme son cartel.
Ses complices sont envoyés en prison et ses animaux dans d’autres zoos colombiens. Mais personne ne veut des hippopotames. Trop lourds, trop couteux à déplacer et à nourrir, ils sont abandonnés à leur triste sort… Ils n’ont jamais connu la liberté et ne peuvent rejoindre aucun troupeau existant car il n’en existe tout simplement pas en Amérique du Sud. C’est seulement en Afrique qu’on trouve encore de nos jours des hippopotames vivants dans la nature.
Ceux d’Escobar se retrouvent donc seuls dans leur lac, artificiel mais proche du rio Nare. Loin de se laisser dépérir, ils profitent de leur toute nouvelle liberté pour partir à l’exploration de ce bras d’eau et finissent par s’y installer… et s’y reproduire. Après tout, le climat est tropical, la nourriture abondante et les prédateurs inexistants dans la région. Un vrai petit paradis.
De nos jours, on compte entre 60 et 80 individus. Ils sont devenus les mascottes du village voisin. Mais ils commencent aussi sérieusement à perturber l’environnement qui s’est moins bien adapté à leur présence que l’inverse, d’autant qu’ils continuent à étendre leur territoire aux dépens des espèces préexistantes.
Le mieux serait sans doute que ces animaux soient déplacés dans un parc créé spécialement pour eux. Mais inutile de dire que si le gouvernement colombien n’avait pas les moyens de s’occuper de 4 individus en 93, il les a encore moins de prendre en charge tout un troupeau aujourd’hui. Les hippopotames d’Escobar ne sont pas prêts de quitter de leur verte vallée.

Ci-dessous :
Vanessa, une femelle rejetée par le troupeau et recueillie dans l’ancienne hacienda d’Escobar transformée en parc national (avec l’ancienne maison du narco devenue le « Musée Escobar » !).

Ce qui est vrai dans Astérix

Vu dans le magasine Pilote, version Pocket (!) grâce à Xavier Mauméjean (merci) : “ce qu’il y a de vrai dans Astérix”. Décidément, je n’ai rien inventé avec les vrais/faux sur Alix Senator, j’ai juste modernisé le concept en passant du journal au site internet.

 

 

 

La catastrophe de Malpasset/Fréjus

D’intenses inondations causent de nombreuses drames ces jours-ci dans le sud-est de la France. Hélas, de tels phénomènes sont loin d’être nouveaux, même si le bouleversement climatique ne fait rien pour les arranger.

Le 2 décembre 1959, ils furent même la cause d’une des pires tragédies civiles arrivées en France. Après une quinzaine de jours de pluies torrentielles, le barrage de de Malpasset qui alimentait en eau l’agglomération de Fréjus/St Raphaël, rompit brusquement. Les 50 millions de mètres cubes d’eau du lac de retenue s’échappèrent d’un coup et une onde de 40 à 50 mètres de haut s’abattit à plus de 70 km/h sur les quartiers ouest de Fréjus. Aucun système d’alarme n’existait à l’époque et les habitants n’eurent pas le temps de fuir. 423 perdirent la vie ce soir-là. Les dégâts matériels furent immenses.

Des années plus tard, la justice conclut à la non-responsabilité des constructeurs du barrage. Leurs assurances ne versèrent donc aucune indemnités aux victimes survivantes qui durent se débrouiller par leurs propres moyens ou faire appel à la générosité du public.

Liu Cixin en Bande Dessinée

Je peux enfin vous l’avouer : j’ai le grand plaisir de faire partie du casting international qui a adapté des nouvelles du grand auteur de science-fiction chinois Liu Cixin en Bande Dessinée, sous l’égide attentionnée de Corinne Bertrand et des éditions chinoises FT Culture.

Cette aventure inédite a été l’occasion de collaborer à nouveau avec Steven Dupré, mon complice du Club des prédateurs, ainsi qu’avec Patrick Van Oppen et Cyril Saint-Blancat aux couleurs. Notre album, pardon notre “roman graphique” comme dit l’annonce, devrait paraître au printemps prochain non seulement en Chine mais aussi en France aux Éditions Delcourt.

Voir aussi :

ActuSF : Liu Cixin bientôt édité chez Delcourt